Hors collection - Droit et déontologie des magistrats - 256

DROIT ET DÉONTOLOGIE DES MAGISTRATS
magistrats ont une conscience professionnelle rigoureuse et qu'une sanction disciplinaire,
touchant l'honneur, puisse avoir une efficacité supérieure à la simple sanction
civile personnelle que l'on aurait infligée à un justiciable.
Néanmoins, demander à la discipline de sanctionner là où la responsabilité civile ne
reconnaît que la faute lourde du service public de la justice sous-entend que la procédure
disciplinaire présente certaines garanties procédurales. En effet, serait-il
acceptable, aujourd'hui, de juger disciplinairement un magistrat pour le responsabiliser
sans pour autant lui garantir un procès équitable ? Si la réponse est bien sûr
négative, nous rappellerons ici que la procédure disciplinaire s'est transformée au
cours des dernières années, subissant ainsi un mouvement de judiciarisation par
l'accroissement des garanties procédurales offertes aux magistrats. De même, la
déontologie, en tant que norme édictée par une loi organique bénéficiant d'une jurisprudence
publiée et d'un recueil, ne semble plus être uniquement une norme professionnelle.
Dans tous les cas, un magistrat mis en cause disciplinairement bénéficiera
des garanties du procès équitable ainsi que d'un accès effectif à l'information
dont il aura besoin pour préparer sa défense.
2) L'amélioration de la situation du justiciable ?
320 › Un justiciable indemnisé et apaisé ? - Tout d'abord et bien que ce soit
l'évidence, on ne le dit pas assez souvent : la mise en cause disciplinaire du
magistrat permettrait de réduire les sentiments d'impunité et d'injustice ressentis
par un justiciable lésé a fortiori lorsque celui-ci sait que le magistrat fautif
ne sera pas inquiété personnellement. L'indemnisation reçue par le justiciable
ne semble pas suffisante et l'on s'en réjouit, car, qu'on le veuille ou non, la justice
ne peut être assimilée à une activité comme les autres. Ce faisant, le préjudice
qu'elle peut générer ne peut être envisagé que par le simple prisme financier.
Le sentiment vindicatif du justiciable ne pourra être canalisé si le magistrat
fautif n'est même pas informé qu'une action en responsabilité contre l'État a été
diligentée sur le fondement de ses agissements...
Ensuite, au-delà de ces considérations, le procès ne peut, comme nous l'avons souligné,
se réduire à sa seule sanction. Tout mécanisme décisionnel (disciplinaire ou
civile) est avant tout un débat qui peut amener, dans certains cas, à une sanction.
Autrement dit, mettre en cause personnellement un magistrat dans le cadre d'une
action disciplinaire n'aboutira pas forcément à une sanction (la jurisprudence du
Conseil supérieur de la magistrature le prouve), mais garantira dans tous les cas
un débat pouvant aboutir, espérons-le, à une prise de conscience. Dans la même
idée, le justiciable pourra être éclairé par ce même mécanisme décisionnel, il
pourra peut-être comprendre certains comportements du magistrat, améliorant
ainsi la canalisation de son sentiment vindicatif.
Enfin, la complémentarité entre responsabilité civile de l'État du fait du service
public de la justice et sanction disciplinaire pourrait permettre un élargissement de
l'indemnisation des justiciables. En effet, si la responsabilité civile de l'État peut
engendrer une action disciplinaire envers le magistrat fautif, une action disciplinaire
ne pourrait-elle pas permettre une indemnisation de l'État ? Or, il y a certaines obligations
qui se trouvent assez souvent sanctionnées en matière disciplinaire alors
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