Hors collection - Droit et déontologie des magistrats - 284

DROIT ET DÉONTOLOGIE DES MAGISTRATS
359 › Un manquement d'un membre du barreau à ses obligations professionnelles
à l'audience peut être relevé par la juridiction, qui le cas échéant en saisira
le procureur général ; la gravité des faits pourra alors justifier des poursuites
disciplinaires. Sans vouloir passer pour Laudator temporis acti60, on
regrettera que certains professionnels manquent parfois d'éducation, de distinction,
de politesse. Il est des décontractions déplacées et donc blâmables.
Un effort de courtoisie est indispensable ; un vieux bâtonnier avait l'habitude de
répéter : « puisque nous sommes condamnés à vivre ensemble, autant que ce
soit le plus agréablement possible », on ne saurait mieux dire ! Lors de rencontres,
de colloques, ou de congrès syndicaux, sont parfois tenus des discours,
autant convenus, que dithyrambiques, célébrant la magistrature toujours indépendante
et compétente et glorifiant le barreau symbole admirable de la
défense désintéressée. Mais par-delà ces belles images, les non-dits sont nombreux
et chaque corps gagnerait en crédibilité à reconnaître qu'il y a de médiocres
magistrats et de médiocres avocats.
On le voit, magistrats et avocats sont les uns pour les autres, de redoutables observateurs
: « ces deux métiers sont heureusement faits pour se déranger mutuellement.
C'est leur vocation. C'est leur nécessité sociale »61 et l'unité d'action dans le
prétoire révèle sans concession, travers, dérives et insuffisances. Les incidents,
quand ils se produisent, sont généralement réglés entre chefs de juridiction et
bâtonnier ; le plus souvent, le temps qui est grand médecin, apaise les choses et
permet le retour à la sérénité. Mais certaines situations plus graves appellent des
suites d'ordre institutionnel, car le laxisme déontologique, quand il entache l'honneur
professionnel, est ennemi du bon fonctionnement de la justice62.
III - PERSPECTIVES ET INTERROGATIONS
360 › Ruptures. - Certains avocats font des choix de défense dite de « rupture
» ; le mot reflète bien la réalité : refus de participer comme auxiliaire de
justice à un procès, présenté comme « illégitime ». L'institution judiciaire est
alors attaquée dans son fonctionnement, sinon dans son principe. Les conséquences
peuvent en être malheureuses, voire dramatiques sur le plan humain.
361 › Outils déontologiques. - Le Conseil supérieur de la magistrature a par
ailleurs mené à bien la révision du recueil des obligations des magistrats, mis
en place depuis 2016, un service d'aide et de veille déontologique consultable
par tout magistrat (en fonction ou honoraire) et installé le collège de déontologie
des magistrats de l'ordre judiciaire institué par l'article 28 de la loi du 8 août
2016.
362 › Confidences. - À un bâtonnier qui lui avouait que 5 % des avocats feraient
mieux de faire autre chose, un procureur général répondit, « Croyez-vous qu'il
en soit autrement dans la magistrature ? ».
60. L. Jerphagnon, C'était mieux avant, Laudator temporis acti, Tallandier, 2007.
61. J.-D. Bredin, « Le juge et l'avocat : regards sur leur relation », in La justice d'un siècle à l'autre, PUF, Droit et justice,
p. 171 et s.
62. Juger les juges, Du Moyen Âge au Conseil supérieur de la magistrature, La Documentation française.
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