Hors collection - Droit et déontologie des magistrats - 319

LA MAGISTRATURE ADMINISTRATIVE
rhodaniennes de La République en Marche, mais à condition de rester disponible
pour ses fonctions juridictionnelles, de s'exprimer comme militante de manière
non incompatible avec son devoir de réserve et d'observer « un surcroît de vigilance
et de discrétion » (avis nº 2018/1). Dans un avis nº 2017/4, le Collège de déontologie
avait estimé que les responsabilités ministérielles de son mari n'empêchaient pas
cette magistrate de poursuivre son activité juridictionnelle, mais qu'elle devait s'abstenir
de connaître comme rapporteur ou assesseur de toute affaire relevant du
ministèredel'intérieur, notamment du contentieux des étrangers.
Section III
QUALITÉ DE LA DÉCISION ET DÉONTOLOGIE
DES MEMBRES DE LA JURIDICTION
410 › Comme certains des exemples précédents l'ont montré, il peut arriver que
le manquement personnel d'un magistrat administratif (ou plus largement d'un
membre d'une juridiction administrative) vicie la procédure à laquelle il a participé.
Mais
de manière générale, il faut se garder de confondre les qualités de la décision
de justice et notamment le caractère équitable de la procédure, avec le respect par
les juges qui ont statué, de leurs obligations déontologiques.
En premier lieu, les éventuels manquements d'un magistrat à sa déontologie peuvent
n'avoir aucun rapport avec l'exercice de sa fonction juridictionnelle dans une
affairedonnéeet n'avoir aucun effet sur celle-ci.
En second lieu, le vice qui affecte la décision est le plus souvent étranger au comportement
individuel des juges qui l'ont rendue. Pour dissiper une confusion possible,
il convient de revenir sur l'impartialité qui est à la fois une condition essentielle
de la régularité de la procédure administrative contentieuse30 et une règle déontologique
fondamentale. Or, la plupart du temps, la méconnaissance du principe d'impartialité
n'est pas imputée à la violation par un juge de son obligation personnelle
d'impartialité : lorsque dans sa célèbre et désormais ancienne décision « Époux
Kress » (7 juin 2001), la Cour européenne des droits de l'homme avait estimé que
la participation du commissaire du gouvernement (à l'époque) au délibéré du Conseil
d'État était contraire aux exigences d'un procès équitable, elle ne sous-entendait
évidemment pas qu'il aurait contrevenu à sa déontologie ! Il en va de même lorsqu'elle
condamne la France au motif que le justiciable avait pu éprouver « des craintes
objectivement justifiées d'un défaut d'impartialité de la Cour des comptes » : en
l'espèce, ces craintes venaient de ce que la Cour avait dénoncé les faits en termes
sévères dans son rapport public annuel avant de statuer sur une gestion de fait31.
30. Mais aussi de la procédure administrative non contentieuse puisque l'article L. 100-2 du Code des relations entre le
public et l'administration dispose que cette dernière « [...] se conforme au principe d'égalité et garantit à chacun
un traitement impartial ».
31. 6 oct. 2016, nº 63979/11, Beausoleil c. France, AJDA 2017, p. 180, note J.-C. Sorbara. Saisi d'un recours en
cassation contre la décision de la Cour des comptes, le Conseil d'État avait quant à lui rejeté ce moyen (CE, sect.,
21 mars 2016, nº 318825, Mme
319
Richard-Dubarry et Beausoleil, Rec. p. 96, AJDA 2011, p. 1037, note

Hors collection - Droit et déontologie des magistrats

Table des matières de la publication Hors collection - Droit et déontologie des magistrats