Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 76 - La responsabilité juridique à l'épreuve de la gestion - 73

CONTRAINTES JURIDIQUES ET ACTEURS PUBLICS
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les chefs de service s'exposent à des sanctions devant les chambres régionales des
comptes dans le cadre de la gestion de fait22. Les dérogations à la règle de non-compensation
sont, par ailleurs, très limitées. Ainsi, le décret 88-139 du 10 février 1988
relatif au régime financier et comptable des régions et portant abrogation de dispositions
relatives aux établissements publics régionaux a admis pour les régions que « les
reversements de trop-payé qui sont effectués pendant la durée de l'exercice sur lequel
le mandatement a eu lieu [puissent] être rétablis au crédit de l'article qui avait
d'abord supporté la dépense »23. Aussi, une circulaire du 6 août 198224
a prévu
qu'un remboursement anticipé d'emprunt ne donnant pas lieu à décaissement
effectif25 « sera désormais analysé comme une opération non budgétaire, ne donnant
lieu ni à inscription budgétaire en dépenses et en recettes [...], ni à l'émission de
mandats de paiement et de titres de recette »26.
Le principe de non-affectation énonce, quant à lui, qu'une recette ne peut couvrir
une dépense particulière27. Ainsi, « toutes les recettes doivent être fondues dans une
caisse commune et on décide des dépenses sans distinction d'origine des fonds »28.
Alors que la règle de non-affectation a été fixée pour l'État, par les textes de droit
budgétaire issus de la Restauration et de la Monarchie de Juillet et reprise par l'ordonnance
organique 59-2 du 2janvier 1959 relative aux lois de finances29,il n'existe pas
de texte clair destiné à son application par les collectivités territoriales. Malgré cette
absence de texte, Gaston Jèze, comme le rappelle Jean-Luc Albert, soulignait au début
du XX
e siècle, que « la règle de la non-affectation des recettes publiques domine les
finances locales comme les finances de l'État »30. Cette solution a été consacrée en
1929 par le Conseil d'État : « en dehors d'une disposition expresse de la loi, aucune
corrélation nécessaire n'existe entre les dépenses et les recettes portées au budget »
municipal31. À noter que malgré les nombreuses dérogations à la règle32, celle-ci est
régulièrement rappelée par la Cour des comptes et les chambres régionales des
comptes33.
119. Trois justifications à ce principe sont connues34 :1) « tout système d'affectation
risque d'aboutir à des autorisations de dépenses indéterminées » (justification
d'ordre juridique) ; 2) « la spécialisation des recettes est dangereuse pour la gestion
22. Pour des exemples, voir : ibid., p. 291.
23. Article 8 du décret 88-139 du 10 février 1988 relatif au régime financier et comptable des régions
et portant abrogation de dispositions relatives aux établissements publics régionaux.
24. Circulaire NOR INT/B/92/00212/C du 6 août 1992 relative au remboursement anticipé des
emprunts des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.
25. « Car ''suivi'' d'un emprunt de même montant auprès du même prêteur, dans le cadre d'une
opération de réaménagement de la dette » in ALBERT J.-L., Les principes applicables aux budgets locaux,
op. cit.
26. Point II, b de la circulaire NOR INT/B/92/00212/C du 6 août 1992 relative au remboursement
anticipé des emprunts des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.
27. BOUVIER M., ESCLASSAN M-C., LASSALE J.-P., Finances publiques, op. cit., p. 289.
28. ALBERT J.-L., Les principes applicables aux budgets locaux, op. cit.
29. L'article 18 (alinéa 1) de l'ordonnance du 2janvier 1959 dispose que « l'ensemble des recettes
(assure) l'exécution de l'ensemble des dépenses ».
30. JÈZE G., Cours élémentaire de science desfinances, Giard, 1912, p. 405.
31. CE, 1er
mai 1929, Robert-Grandjean, req. nº 99151, Rec., p. 439.
32. BOUVIER M., ESCLASSAN M-C., LASSALE J.-P., Finances publiques, op. cit., p. 294.
33. Pour illustration : ALBERT J.-L., Les principes applicables aux budgets locaux, op. cit.
34. Ces trois justifications sont données par BOUVIER M., ESCLASSAN M-C., LASSALE J.-P.,
Finances publiques, op. cit., p. 289-290.

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