Bibliothèque de droit social - Tome 83 - Les clauses sociales - 53

LE RENOUVEAU DU DROIT DU TRAVAIL DANS LE DROIT INTERNATIONAL ÉCONOMIQUE 39
tarifaire21
. Pour autant, ces exceptions n'ont jamais fait l'objet d'une interpréta.
Dès lors, l'ouverture à d'autres procédures outrepassant l'approche
tion par l'ORD dans une procédure contentieuse et sont donc restées à ce jour
inutilisées22
tarifaire pour saisir non plus la seule question de l'emploi ou du travail, mais le
droit du travail, semble peu probable. Les tentatives pour intégrer une véritable
clause sociale au sein de l'OMC, afin d'assurer une prise en compte du droit des
travailleurs au niveau multilatéral, ont à ce jour échoué. Le droit du travail a, de
fait, été combattu comme ne justifiant pas une restriction au libre-échange, tant
en matière de commerce de marchandise que de services23
.
57. Cependant, si le tarif douanier se présente comme une technique moins
adéquate en vue d'assurer une prise en compte du droit du travail, il n'en est pas
moins mobilisable en théorie. À titre d'illustration les Tariff Acts adoptés aux ÉtatsUnis
en 1922 et 1930 visaient précisément à concilier la restriction des flux
économiques internationaux et le respect de règles minimales de travail sur le plan
salarial24
. Les États-Unis toujours, à l'occasion de la négociation de l'ACEUM en
remplacement de l'ALENA, ont réaffirmé ce lien entre réglementation du travail et
importation, afin de décourager l'investissement et l'approvisionnement fondée sur
la disponibilité de main-d'œuvre à faible coût au Mexique. La nouvelle version de
l'accord renferme plus particulièrement une disposition exigeant que 40 % de la
valeur d'une automobile (45 % pour un camion léger) soit constituée de matériaux
et de pièces produits ou de tâches effectuées par des travailleurs (y compris l'assemblage
final) dans une usine où le salaire horaire moyen est d'au moins seize dollars25
Pour autant, outre la restriction des prérogatives économiques dont disposent les
.
21. L'article XII.3.d) dispose que : « Les parties contractantes reconnaissent que la politique suivie
sur le plan national par une partie contractante en vue de réaliser et de maintenir le plein-emploi productif
ou d'assurer le développement des ressources économiques peut provoquer, chez cette partie contractante,
une forte demande d'importations qui comporte, pour ses réserves monétaires, une menace du genre de
celles visées à l'alinéa a) du paragraphe 2 du présent article. En conséquence, une partie contractante qui
se conforme, à tous autres égards, aux dispositions du présent article ne sera pas tenue de supprimer ou de
modifier des restrictions, motif pris que, si un changement était apporté à cette politique, les restrictions
qu'elle applique en vertu du présent article cesseraient d'être nécessaires. ». Pour une analyse du contexte
de cet article voir G. MARCEAU, A. DOUSSIN « L'Organisation Mondiale du Commerce » in
J.-M. THOUVENIN, A. TREBILOCK (dir.) Droit international social, Tome 1. Bruxelles, Bruylant,
2013. pp. 339-359. Comme le souligne Francis Maupain l'article peut être rapproché par sa philosophie
de l'article 6.c) de l'accord sur les subventions et les mesures compensatoires, autre pièce du système
juridique de l'OMC. En l'occurrence ce dernier admet les subventions destinées à faire face à des
problèmes sociaux aigus dans une branche de production affectée par la libéralisation des échanges à
la condition qu'elles soient limitées et temporaires. Voir F. MAUPAIN, L'OIT à l'épreuve de la
mondialisation financière : peut-on réguler sans contraindre ? BIT, IIES, 2012, p. 103.
22. R. BISMUTH, D. CARREAU, A. HAMANN, P. JUILLIARD Droit international
éd. 2017, p. 477.
économique, Précis, Dalloz, 6e
23. Pour un rappel de ces tensions voir le panorama réalisé par C. BARRY, S. G. REDDY,
« International Trade and Labour Standards : A Proposal for Linkage », Cornell International Law journal,
vol. 39, 2006, pp. 545-638. Voir également F. MAUPAIN, L'OIT à l'épreuve de la mondialisation financière :
peut-on réguler sans contraindre ? BIT, IIES, 2012, p. 153 et s. L'auteur rattache l'impasse de la clause sociale
aux deux principales justifications avancées. La première tient à l'analogie entre le dumping économique et
le dumping social qu'il qualifie de discutable et sur laquelle nous reviendrons dans le second titre de cette
étude. La seconde, présentée par l'auteur comme une justification juridicoaxiologique équivoque, qui
repose sur l'existence supposée de droits du travail internationalement reconnus.
24. J. HEFFER « L'âge d'or du protectionnisme américain. La politique économique extérieure
siècle. » Histoire, économie et société, 2003, 22e
des États-Unis au xxe
Sociale » RDT 2021 p. 563
année, n° 1, p. 17 ; F. W. TAUSSIG,
The Tariff History of the United States, 8e éd., New York, Capricorn Books, 1964, pp. 65-67.
25. Voir A. PERULLI « Le Traité ACEUM : un nouveau chapitre dans l'histoire de la Clause

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