Bibliothèque de droit social - Tome 83 - Les clauses sociales - 57

LE RENOUVEAU DU DROIT DU TRAVAIL DANS LE DROIT INTERNATIONAL ÉCONOMIQUE 43
ce point de vue, et afin de ne pas dévoyer l'idée de concurrence entre acteurs dans
l'accès à un marché national, de ne pas étendre indéfiniment les droits susceptibles
d'être appliqués ou imposés. Seuls ceux qui satisfont à une exigence, non de
simple connexité avec l'activité économique, mais de nécessité dans la réglementation
de toute activité économique, devraient ainsi trouver à être intégrés38
. Dans
une approche réaliste, il est par ailleurs remarquable que ces branches du droit
soient les seules à jouir d'une large présence à l'échelle mondiale. Il est ainsi mal
aisé d'imaginer un pays se dispensant de règles de droit ayant trait au marché du
travail, à la cohabitation de l'homme avec la nature, à la santé. Pour ces deux dernières,
il
convient de constater qu'il s'agit des domaines législatifs envisagés
comme justifiant une exception en matière d'importation par l'article XX du
GATT. Une telle démarche, centrée sur le processus d'élaboration d'un bien ou
d'un service, serait de nature à permettre la prise en compte du droit du travail par
les mécanismes de l'OMC39
. Elle n'est toutefois pas, à ce jour, celle retenue par les
textes, pas plus que par l'ORD. Cependant, cette question, et l'impasse qu'elle
matérialise pour le droit du travail, recoupent celle plus large de l'articulation, et
plus uniquement de l'emprunt de règles issues d'autres branches.
63. À cet égard, la très large articulation du commerce avec le droit de la
propriété intellectuelle invite à questionner la plasticité de ce dernier, et la réelle
prégnance du principe de spécialité sur l'OMC. L'insertion dans le système de
l'OMC de l'accord sur les droits de propriété intellectuelle40
mérite de ce point de
vue d'être relevée. Assurer la prise en compte de cette branche au niveau mondial
ne figurait pourtant pas, en tant que tel, dans les missions dévolues à l'organisation.
Il est en revanche frappant qu'elle constitue un apport indiscutable dans une
perspective de sécurisation des activités économiques et, des revenus tirés des différents
droits attachés à la propriété intellectuelle, pour les entreprises. Cette prise
en charge doit être regardée avec d'autant plus d'intérêt, au vu du rôle de l'organisation
mondiale de la propriété intellectuelle (ci-après OMPI). Ainsi, contrairement
à celle de l'OIT qui a nourri également le rejet du droit du travail hors de
l'OMC, l'existence de l'OMPI n'a pas fait obstacle à une forme d'annexion41
par
le droit international économique.
§ 2. Le ReJet statUtaiRe :
L'inDifféRence aU DROit DU tRaVaiL Dans Les missiOns De L'Omc
64. Au-delà des choix ayant trait à la technique juridique, notamment par la
concentration sur la question tarifaire, l'OMC s'est également appuyée sur les limites
de son champ d'action pour rejeter la question du droit du travail, et donc d'une
38. Dans cette perspective, en partant du tronc commun des droits de l'homme, voir
C. McCRUDDEN, « International Economic Law and the Pursuit of Human Rights : A Framework
for Discussion of the Legality of " Selective Purchasing " Laws Under the WTO Government
Procurement. » Journal of International Economic Law, Vol. 2, n° 1, 1999. pp. 3-48.
39. Voir en ce sens R. HOWSE « The World Trade Organization and the Protection of Workers'
Rights » J. Small & Emerging Bus. L. n° 3, 1999, p. 138 et s.
40. OMC, Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce,
adopté le 15 avril 1994, le texte est entré en vigueur le 1er janvier 1995.
41. M. MAINDRAULT « Les aspects commerciaux des droits sociaux et des droits de l'homme
au travail » Drt soc. 1994 p. 850.

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