Bibliothèque de droit privé - Tome 620 - Le droit international privé de la famille à l'épreuve de l'impératif de reconnaissance des situations - 28

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Le droit internationaL privé de La famiLLe
À L'épreuve de L'impératif de reconnaissance des situations
pas du droit civil seront exclues. Cette exclusion concerne notamment, ou principalement,
les questions préalables de statut personnel en matière d'entrée et de
séjour des étrangers, qui obéissent pour partie à une logique différente en dépit de
leur indéniable importance pratique et stratégique. Pour de nombreux observateurs
souvent engagés, en effet, la voie la plus prometteuse pour obtenir une première
forme de reconnaissance obligatoire au sein de l'Union européenne des
mariages entre personnes de même sexe célébrés à l'étranger était de convaincre la
Cour de justice de l'Union européenne de retenir une interprétation favorable de la
Directive 2004/38 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs
familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres22
.
Cet espoir a été comblé, puisque la Cour de justice a considéré, dans le retentissant
arrêt Coman de 201823
, qu'un État membre ne pouvait exciper de son droit interne
prohibant le mariage entre personnes de même sexe pour refuser de considérer
l'époux d'un citoyen européen comme son conjoint, au sens de l'article 2, § 2, de la
directive, et le priver ainsi d'un droit dérivé de séjour sur son territoire24
.
Cette solution a-t-elle vocation à gagner le droit international privé de la
famille ; en d'autres termes faut-il voir dans l'arrêt Coman « un pas supplémentaire
vers la libre circulation des situations familiales au sein de l'Union européenne
»25
? La décision elle-même n'est pas dépourvue d'ambiguïté à cet égard,
, c'est pour exclure explicitement toute implica.
Il semble encore possible de
car si la Cour s'appuie à plusieurs reprises sur sa jurisprudence antérieure en
matière de nom patronymique26
tion en droit de la famille de l'obligation de reconnaissance qu'elle met à la charge
des États membre sur le terrain du droit de séjour27
se contenter de cette trêve, d'autant que la Cour de justice en a récemment, et tout
aussi nettement, réaffirmé les termes lorsqu'elle s'est prononcée sur l'hypothèse
voisine d'un obstacle opposé à la liberté de circulation et de séjour d'une enfant
sur le fondement de l'impossibilité en droit national d'inscrire deux parents de
même sexe dans un acte de naissance28
.
8. De surcroît, seule la reconnaisse directe sera envisagée, à la différence de ce
qui est parfois qualifié de reconnaissance « indirecte » d'un lien de famille sous-jacent,
22. Sur cet argumentaire, v. not. C. Bell, N. Bačić Selanec, « Who is a Spouse under the Citizens'
Rights Directive? The Prospect of Mutual Recognition of Same-Sex Marriage in the EU », European
Law Review, 2016, p. 655-686 ; U. Belavusau, D. Kochenov, « On the 'Entry Options' for the 'Right to
Love': Federalizing Legal Opportunities for LGBT Movements in the EU », EUI Working Paper,
LAW 2016/09.
23. CJUE, gr. ch., 5 juin 2018, Coman, aff. C-673/16, AJDA, 2018. 1603, obs. P. Bonneville et al. ;
D., 2018. 1674, note H. Fulchiron et A. Panet ; ibid., 2019. 347, obs. F. Jault-Seseke ; ibid., 856,
obs. RÉGINE ; ibid., 910, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau ; AJ Famille, 2018. 404, obs. G. Kessler ;
RCDIP, 2018. 816, note P. Hammje ; RTD civ., 2018. 858, obs. L. Usunier ; ibid., 2019. 391,
obs. F. Benoît-Rohmer ; RTD eur., 2018. 673, obs. É. Pataut.
24. La Directive 2004/38, qui régit seulement l'hypothèse où le citoyen de l'Union s'établit dans
un autre État membre que celui dont il possède la nationalité, n'était en réalité pas applicable,
M. Coman ayant la nationalité roumaine de l'État membre requis. Dans une telle situation, la Cour de
justice applique la directive par analogie sur le fondement du droit primaire (art. 21, § 1, TFUE),
v. S. Fulli-Lemaire, A. Panet-Marre, « La protection au titre de la citoyenneté européenne », in
H. Fulchiron (dir.), La famille du migrant, Paris, LexisNexis, 2020, p. 97-115.
25. G. Kessler, « La consécration par la CJUE du droit de séjour du conjoint de même sexe du
citoyen européen : un pas supplémentaire vers la libre circulation des situations familiales au sein de
l'Union européenne ? », JDI, 2019, doctr. 2, p. 27-47.
26. Pts. 37, 38 et 41 de l'arrêt. Sur ces arrêts, v. infra n° 376 et ss.
27. Pts. 45-46.
28. CJUE, gr. ch., 14 déc. 2021, V.M.A., aff. C-490/20.
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