Bibliothèque de droit privé - Tome 620 - Le droit international privé de la famille à l'épreuve de l'impératif de reconnaissance des situations - 67

L'ESSOR DE L'INDIVIDUALISME
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Mais il convient aussi d'envisager les évolutions plus particulières à la sphère qui
nous occupe, la famille (§ II).
§ i. lA vitAlitÉ des RevendicAtions individUelles PoRtÉes
PAR les dRoits sUbjectiFs
65. Malgré les efforts déployés par Dabin pour démontrer l'absence, « entre
, il n'est pas douteux que l'essor de l'individualisme se soit très
la notion de droit subjectif et une philosophie individualiste, de liaison organique
essentielle »71
anciennement accompagné de la mise en avant de droits subjectifs, tout particulièrement
à l'encontre de l'État. Fort logiquement, ce second phénomène fait
l'objet de jugements aussi contrastés que le premier, et dans leur prolongement -
ainsi Maury répliquant à Batiffol, qui déplorait que « la tradition individualiste
[bâtisse] autour de la personne un bastion de droits intangibles »72
, que « dans
l'état actuel de la civilisation, les droits individuels [ne sont] autre chose que la
traduction juridique - et la réalisation - du respect de la personne »73
.
66. Il n'est, en tout cas, guère surprenant que les droits subjectifs, qui tout
comme l'individualisme sont volontiers présentés comme emblématiques de notre
temps, aient eux aussi une origine beaucoup plus ancienne. S'il est généralement
admis que l'expression date du XIXe
siècle74
, l'identification de la période qui a vu
l'éclosion du concept a suscité des débats passionnés, qui se sont apaisés plus qu'ils
n'ont été tranchés. La thèse sans doute la plus influente a été exposée par Villey,
qui y a consacré une partie importante de son œuvre75
. Pour cet auteur, « la notion
de droit conçu comme attribut d'un sujet (subjectum juris) et qui n'existerait qu'à
l'avantage de ce sujet »76
terait à Occam, philosophe franciscain initiateur de la « voie nouvelle », ou nominalisme,
au XIVe
caine [...] que les Frères mendiants sont hors du droit ; qu'il leur est permis de
renoncer à être détenteurs de droits »77
convaincre78
71. J. Dabin, « Droit subjectif et subjectivisme juridique », Archiv. phil. dr., 1964 (9), p. 17-35,
p. 34. Il n'est sans doute pas indifférent de relever que les lignes qui précèdent immédiatement le
passage cité suffisent à établir que l'auteur, pourtant présenté souvent comme un chantre des droits
subjectifs, défend une position que l'on ne peut qualifier autrement que résolument objectiviste, au
sens où l'entend Batiffol (v. infra n° 67).
72. Batiffol, Aspects philosophiques... préc., n° 122, p. 276.
73. J. Maury, « Observations sur les " Aspects philosophiques du droit international privé " »,
RCDIP, 1957, p. 229-272, p. 262.
74. J. Rochfeld, op. cit., p. 145.
75. La démonstration la plus complète est menée dans La formation de la pensée juridique
moderne, préc., p. 225-262 ; v. aussi Philosophie du droit, préc., n° 80-82, p. 106-109, Le droit et les
droits de l'homme, Paris, PUF, 1re
philosophie du droit, Paris, Dalloz, 2002, rééd. (1re
éd. Quadrige, 2008, spéc. p. 69-130, et Leçons d'histoire et de
éd. 1957), p. 221-250.
76. M. Villey, Philosophie du droit, préc., n° 80, p. 106.
77. M. Villey, Le droit et les droits de l'homme, préc., p. 124.
78. Not. Batiffol, v. ses Problèmes de base de philosophie du droit, préc., spéc. p. 140-143. V. aussi,
en ce sens, L. Parisoli, Volontarismo e diritto soggettivo - La nascita medievale di una teoria dei diritti
nella scolastica francescana, Rome, Istituto storico dei Cappuccini, 1999, et, synthétisant les travaux
de Weber, qui avait entrepris de démontrer dans sa thèse de doctorat que le capitalisme médiéval avait
joué un rôle fondateur dans l'apparition du concept de droit subjectif, R. Melot, « L'individu défini
, était inconnue de l'Antiquité et du Moyen Âge et remonsiècle,
et « qui eut à défendre contre la papauté la thèse francis.
Si d'éminents auteurs se sont laissés
, d'autres se sont efforcés d'identifier des précurseurs d'Occam,

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