Bibliothèque de droit public - Tome 328 - L'intérêt général en économie de marché - 230

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L'INTÉRÊT GÉNÉRAL EN ÉCONOMIE DE MARCHÉ
ainsi à l'émergence du marché en tant que mécanisme « parallèle » de réalisation de
l'intérêt général.
Conclusion du Titre II
415. Le droit européen des contrats publics constitue l'un des vecteurs principaux
de l'inflexion de la conception volontariste traditionnelle de l'intérêt général. En
réduisant les privilèges de l'autorité publique contractante ou en contenant leur exercice,
ainsi qu'en promouvant la gestion déléguée contractuelle des activités publiques,
il vise à renforcer l' « ouverture » de l'action publique à l'égard du marché, en en
faisant un acteur à part entière dans le processus de mise en œuvre de l'intérêt général
au niveau national, ce qui, pourtant, réduit la marge de manœuvre politique des autorités
publiques.
CONCLUSION DELA PREMIÈRE PARTIE
416. La conception volontariste « traditionnelle » de l'intérêt général qui dominait
dans la plupart des États membres de l'Union184 avant la création de cette dernière
ainsi qu'au début du processus d'intégration n'a pas été considérée dans son
ensemble et dans le long terme comme compatible avec les principes fondamentaux
du droit de l'Union, ce qui a conduit non seulement les rédacteurs des traités, mais
également le législateur et le juge de l'Union à des choix qui ont entraîné des mutations
majeures de ce paradigme d'intérêt général au niveau national. Sous la pression
du droit de l'Union, le rôle des entités publiques nationales dans la définition et surtout
dans la mise en œuvre de l'intérêt général à leur niveau au moyen de l'action
publique économique se développant à l'intérieur du marché est considérablement
encadré. Le régime de leur activité économique « entrepreneuriale » est banalisé
alors que les spécificités de leur action économique en général ne sont reconnues
qu'exceptionnellement, dans des cas où un consensus politique allant dans le sens
de la banalisation de leur régime et l'amoindrissement de leur rôle au profit du marché
serait inconcevable ou très difficile à atteindre ou encore, afin que cette action économique
soit plus efficacement encadrée, comme notamment dans le cas des contrats
publics.
417. Dans ces domaines, le strict encadrement de l'activité publique économique
nationale par le droit de l'Union entraîne des conséquences significatives.
Entre autres, il conduit à la création de nouveaux marchés, notamment dans les secteurs
anciennement dominés par les grands monopoles publics, il renforce le caractère
« négocié » des contrats publics en limitant significativement les prérogatives du
cocontractant public et en protégeant le cocontractant privé du risque de
l'arbitraire185, mais, surtout, il entraîne la reconnaissance au marché d'un rôle nouveau.
Certes, le marché a toujours été considéré comme un cadre de réalisation de
l'intérêt général dans les sociétés libérales186, mais sous l'influence du droit de
l'Union, et étant donné que les compétences et prérogatives qui sont limitées voire
184. Particulièrement en France et dans les États membres dont le système institutionnel et le droit
public est influencé par ceux français.
185. Cet arbitraire est évalué à travers le prisme des principes du marché.
186. Sur ce point cf. entre autres CLAMOUR G., op. cit., not. p. 226.

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