Bibliothèque de droit privé - Tome 625 - Quasi-contrat et enrichissement injustifié - 128

128
QUASI-CONTRAT ET ENRICHISSEMENT INJUSTIFIÉ
contre le défendeur pour le surplus (contribution)113. En dehors des cas où le demandeur
a été contraint de payer la dette d'autrui, le droit anglais semble difficilement
admettre le recours du tiers contre le véritable débiteur. Certains auteurs estiment
cependant qu'il conviendrait d'admettre plus largement ce recours, au-delà du seul
legal compulsion,et l'étendre à toutes les hypothèses où le créancier a accepté la
prestation fournie par le tiers solvens, peu important que le solvens ait été contraint
de le faire ou que le débiteur n'y ait pas consenti114.
127. Une comparaison avec le droit français. Tandis que le droit anglais traite
majoritairement la question du paiement de la dette d'autrui au sein de l'unjust
enrichment, ce problème n'est traité que partiellement et de manière secondaire par
le droit de l'enrichissement injustifié en France. Ce cas est particulièrement complexe
en droit français, car il est possible de mobiliser les trois quasi-contrats (gestion d'affaires,
enrichissement injustifié et répétition de l'indu), qui ne sont toutefois envisagés
qu'en dehors des cas où la subrogation légale ne s'applique pas. Il faut toutefois noter
que les recours entre codébiteurs, ou les recours du garant contre le débiteur, sont
traités de manière séparée et ne sont pas associés à l'enrichissement injustifié de
manière générale. Cette association peut donc non seulement paraître étrange aux
yeux d'un juriste français, mais également inutile. Pour mieux comprendre cette structure,
il faut tout d'abord noter qu'il n'existe pas à proprement parler de régime général
de l'obligation en droit anglais, il n'existe donc pas un corps de règles communes
applicables indépendamment de la source d'obligation.
128. La subrogation en droit anglais. Le droit anglais connaît également la
notion de subrogation et, si elle est également associée à l'unjust enrichment, elle
n'est pas exactement appréhendée de la même manière qu'en droit français. Il existe
cependant quelques points communs, le premier étant que les juristes anglais font
également une distinction entre ce qui relève de la subrogation contractuelle et ce
qui relève de la subrogation légale, seule cette dernière étant envisagée sous la catégorie
d'unjust enrichment. Dans les deux systèmes juridiques également, la subrogation
a pour effet de transférer des droits et de placer le subrogé dans la position du
subrogeant. Les ressemblances s'arrêtent toutefois à ce stade. La principale différence
entre le droit français et le droit anglais tient au fait que ce dernier système n'envisage
pas la subrogation de manière autonome, mais comme un remède possible pour prévenir
un enrichissement injuste. Ainsi, pour que le demandeur puisse être subrogé
dans les droits du créancier, encore faut-il que les conditions de l'unjust enrichment
soient au préalable réunies. Autrement dit, la subrogation trouve son fondement dans
l'unjust enrichment, et n'obéit pas, contrairement au droit français, à des conditions
113. Il existe de nombreuses règles entourant le recours en contribution, non seulement parce que de
nombreuses lois spéciales envisagent la question, mais également parce qu'il peut y avoir des différences
selon la source de l'obligation commune (ex : deux co-garants ou deux personnes jugées responsables
d'avoir causé un dommage...), les règles de répartitions peuvent ainsi être différentes. Il n'est toutefois
pas utile de rentrer dans le détail, il convient simplement de noter que ce recours est inclus, en droit anglais,
dans l'unjust enrichment, car le défendeur, débiteur, s'enrichirait aux dépens du demandeur s'il ne reversait
pas à ce dernier la part qu'il aurait dû payer. Pour plus de détails voir notamment C. MITCHELL,
P. MITCHELL, S. WATTERSON, op. cit., nº 19-01 s. ; G. VIRGO, op. cit., p. 246-251 ; A. BURROWS,
op. cit., p. 455-460.
114. Voir notamment A. BURROWS, op. cit., p. 463 : « A payment made to discharge a debt owed to
the creditor and accepted by the creditor as discharging that debt ought to discharge that debt automatically
(ie, without the debtor's acceptance) " .

Bibliothèque de droit privé - Tome 625 - Quasi-contrat et enrichissement injustifié

Table des matières de la publication Bibliothèque de droit privé - Tome 625 - Quasi-contrat et enrichissement injustifié