Hors collection - Régime général des obligations - 4e - 407

La compensation
Or il est difficile de déceler, chez le débiteur qui ignore la compensation, une volonté de
s'engager ou de renoncer à son exception, et l'on voit mal pourquoi une telle renonciation
serait présumée. La règle posée par l'article 1347-5 n'a en réalité rien d'une évidence28
.Le
Code civil aurait sans doute gagné à l'abandonner, tout en prévoyant la possibilité pour le
débiteur de renoncer expressément à invoquer une compensation contre le cessionnaire29
.
.
La question de la renonciation du débiteur cédé aurait d'ailleurs mérité d'être traitée dans
sa globalité, dès lors que ce texte concerne la seule compensation et ne peut être étendu à
d'autres moyens de défense30
603. Réciprocité et transfert de la dette. - La consécration de la
cession de dette conduit à se demander si le cessionnaire passif de l'obligation
pourrait opposer, au créancier cédé, une compensation intervenue
entre ce dernier et le débiteur cédant. L'article 1327, précisant le régime
des exceptions dans la cession de dette, ne répond pas directement à cette
question. Il faut pour cela distinguer selon que la cession de dette
emporte ou non libération du débiteur initial.
Cession de dette libératoire. Lorsque la cession est libératoire, les choses se
présentent sous un jour particulier puisqu'aucune compensation ne peut plus
intervenir entre le créancier cédé et le débiteur cédant : la question de l'opposabilité
de cette exception ne se pose pas véritablement. On peut en revanche
se demander si une compensation dont les conditions avaient été réunies
avant la cession pourrait être opposée, après le transfert, par le cessionnaire.
L'aspect translatif de l'opération incite à l'admettre31
cédant sa dette alors qu'elle était en état d'être compensée, le débiteur cédant
arenoncé àlacompensation32
).
rien dans les travaux préparatoires du Code civil ne justifie de donner une telle extension à la règle ainsi
posée). Comp. MartinD. R. et Andreu L., JCl. Civil, art. 1294 à 1299, 2010, Effets de la compensation, nº 36,
qui réservent l'hypothèse où non seulement le cédé ignorait la compensation, mais où en outre le cessionnaire
était de mauvaise foi puisqu'il en connaissait l'existence.
28. Elle se justifie tout au plus par la particularité de la compensation : le débiteur ne pourra certes pas
l'opposer au cessionnaire, mais il ne fera alors que payer une dette dont il est valablement tenu, et
demeure par ailleurs créancier du cédant, à qui il pourra toujours réclamer son dû. L'inopposabilité de la
compensation ne lui est donc pas aussi préjudiciable que ne le serait l'inopposabilité, par exemple, d'une
nullité. Ce que perd le débiteur, c'est tout au plus l'effet de garantie qu'aurait produit la compensation à son
égard, puisque s'il demeure créancier du cédant, il supporte le risque de son insolvabilité.
29. V. en ce sens, avant-projet Catala, v. article 1244 : « Lors de la cession de l'une des créances compensables
à un tiers, le débiteur cédé peut opposer la compensation au cessionnaire à moins qu'il n'yait expressément
renoncé par un acte écrit ». Le droit européen impose aux États membres, dans les garanties sur
créances en matière financière, de prévoir la possibilité pour les débiteurs de renoncer à « leurs droits de
compensation à l'égard des créanciers de la créance privée et à l'égard des personnes en faveur desquelles
le créancier a effectué une cession, un nantissement ou toute autre mobilisation de la créance privée en
garantie » (Directive 2002/47/CE, du 6juin 2002, art. 3.3). Dans certaines hypothèses, la compensation est
même exclue de plein droit, v. C.mon. fin., art. L. 141-4, I, al. 3 : « Nonobstant toute disposition ou stipulation
contraire, aucun droit de compensation ne peut engendrer l'extinction, en tout ou partie, des créances
remises en garantie à une banque centrale membre du Système européen de banques centrales ».
30. Par comparaison, l'acceptation d'une cession Dailly emporte inopposabilité de toutes les exceptions, et
non uniquement de la compensation (C.mon. fin., art. L. 313-29).
31. Rappr. ANDREU L., Du changement de débiteur, préf. MartinD. R.,thèse,2009, Dalloz,nº 245-1.
32. Cela suppose que les conditions de la compensation aient été réunies, mais également que le cédant
en ait eu connaissance. Tel ne sera pas le cas, par exemple, si les conditions de la compensation se réalisent
entre le moment où les débiteurs successifs sollicitent le créancier, et le moment où ce dernier donne
effectivement son accord à la cession.
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(sauf à considérer qu'en

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