Hors collection - Régime général des obligations - 4e - 511

La prescription extinctive
parties ne sauraient exclure totalement un mécanisme qui tend à assurer
la paix sociale.
Mais qu'entend-on exactement par « durée de la prescription » ? L'expression vise-telle
uniquement la durée du délai de prescription, ou couvre-t-elle l'ensemble des éléments
affectant la durée requise pour prescrire, en ce compris le point de départ de la
prescription ? Cette lecture extensive de l'article 2254 permettrait de déroger à l'article
2224 pour prévoir, par exemple, que la prescription courra dès la naissance du droit
(par opposition au jour où le créancier « a connu » les faits lui permettant d'agir) ou bien
au jour de la connaissance effective des faits permettant d'agir (par opposition au jour où
le créancier « aurait dû » les connaître). La question, qui n'a pas encore été tranchée par
les tribunaux, est discutée en doctrine291
. On observera, en faveur de la liberté des parties,
que la loi les autorise à créer des causes nouvelles de suspension (v. infra no 775) et que la
740).
775. Causes d'interruption et de suspension. - L'article 2254, alinéa
2, indique que « Les parties peuvent également, d'un commun accord,
ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues
par la loi ». Cette disposition fait écho à la jurisprudence antérieure à
la réforme de 2008 décidant que la liste dressée par l'article 2244 ancien
n'était pas d'ordre public292
, et reconnaissant la validité des « accords
. La formuconclus
après la naissance de l'obligation et en cours de délai, par lesquelles
les parties conviendraient de la suspension de ce délai »293
lation du texte implique a contrario qu'il n'est pas possible de supprimer
des causes d'interruption ou de suspension légales.
L'article 2254, alinéa 2, est rédigé de manière excessivement large. Il permet
d'ériger en cause d'interruption l'envoi d'un courrier recommandé, voire
d'un courrier simple ; mais aucune limite ou condition n'est prévue, de sorte
que l'on pourrait se contenter de l'envoi d'une facture par courrier électronique
ou encore d'une simple relance verbale faite par téléphone294
.De
même, la convention pourrait ériger n'importe quelle circonstance en cause
de suspension (ex. traitement d'une réclamation ; dépassement d'un seuil
financier par l'une des parties, etc.). Le risque est au final que la prescription
ne puisse plus jouer de manière effective, car elle sera trop aisément suspendue
ou interrompue. Un tel résultat méconnaîtrait le fait que la prescription
ne touche pas seulement aux intérêts privés, mais intéresse aussi l'intérêt
général. Il serait du reste en porte-à-faux avec le principe - maintenu par la
loi du 17juin 2008 - selon lequel « seule une prescription acquise est susceptible
de renonciation » (art. 2250, v. infra no
780). Seul resterait alors le gardefoududélai
butoir.
distinction n'est pas toujours bien nette entre la suspension et le report du point de départ
de la prescription (v. supra no
291. HONTERBEYRIE A., Rép. Civ., Dalloz, vo
« Prescription extinctive », no 624 et s. ; LEVENEUR L., art. préc., no
292. Cass. 1re civ., 25juin 2002, no 00-14590, préc. note 259.
293. Cass. com., 30mars 2005, no 03-21156, préc., note 258.
294. Dont la preuve pourra être rapportée par production d'un enregistrement de la conversation, dont le
client aura été averti en début d'appel comme cela est aujourd'hui courant.
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