Les Intégrales - Leçons pratiques de droit des contrats - 2e - 19

In tr o duc t i o n
de cette théorie le plus souvent87
en matière de baux88
l'encontre de l'intention probable du législateur89
, même lorsqu'il s'agit d'aller à
continue de soulever d'innombrables difficultés, ainsi que cela a déjà été relevé90
. Il reste que la notion de statut légal
.À
partir de quel seuil considèrera-t-on que le contrat s'inscrit dans un ensemble de règles
présentant une certaine consistance et cohérence ? À supposer que l'on soit en présence
d'un tel ensemble, n'appliquera-t-on l'exception tirée de l'existence d'un statut légal que
lorsque la loi nouvelle modifie une règle préexistante, ou aussi lorsque la loi nouvelle
ajoute aux règles préexistantes (et a fortiori crée un nouveau statut légal) ?91
. Quelles
que soient les réponses que l'on apporte à ces questions, l'exception tirée de l'existence
d'un statut légal trahira toujours la prévision des parties, et ce, sans conditions impérieuse
d'application immédiate de la loi nouvelle, prévision qui pourtant constitue le
(87) Mais pas seulement. V., à propos de la loi no
80-335 du 12 mai 1980, qui a admis l'opposabilité de la clause de
réserve de propriété en cas de procédure collective du débiteur, Cass. com., 7 mars 1983, nº 81-13710,
Bull. civ. IV, nº 95 : « la loi du 12 mai 1980 avait seulement consacre un effet independant de la volonte des parties
[en sorte que] la cour d'appel a decide, a bon droit, que la clause litigieuse, bien que stipulee avant la promulgation
de la loi precitee, etait cependant opposable a la masse des creanciers constituee apres l'entree en vigueur de
ladite loi ».
(88) L'application dans le temps, en matière de bail d'habitation, des dispositions de la loi ALUR (2014) est révélatrice.
V. Cass., avis, 16 févr. 2015, nº 15002 : « la loi nouvelle régissant immédiatement les effets légaux des situations
juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, il en résulte que
l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 en ce qu'il donne au juge la faculté
d'accorder un délai de trois ans au plus au locataire en situation de régler sa dette locative s'applique aux baux en
cours à la date d'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014 » (nouvelles règles sur le délai de grâce) ;
Cass. 3e
civ., 17 nov. 2016, nº 15-24552 : « la loi nouvelle régissant immédiatement les effets légaux des situations
juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, il en résulte que la
majoration prévue par l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 s'applique à la
demande de restitution formée après l'entrée en vigueur de cette dernière loi » (nouvelles règles sur le dépôt de
garantie).
Adde, en matière de bail commercial, s'agissant de l'application dans le temps de la loi LME (2008), Cass. 3e
civ.,
3 juill. 2013, Bull. civ. III, nº 89 : « les effets légaux d'un contrat étant régis par la loi en vigueur à la date où ils se
produisent, la cour d'appel qui a exactement retenu que la loi du 4 août 2008, modifiant l'article L. 145-9 du Code
de commerce et imposant de délivrer congé pour le dernier jour du trimestre civil et au moins six mois à l'avance,
était applicable aux contrats en cours et qui a relevé que le congé avait été donné le 30 mars 2009 pour le
30 septembre 2009, en a déduit, à bon droit, que le congé était valable » (nouvelles règles sur le congé), et de
l'application de la loi MURCEF (2001), Cass. 3e
civ., 18 févr. 2009, nº 08-13143, Bull. civ. III, nº 40 : « le juge des
loyers commerciaux avait à bon droit dit que la loi " Murcerf " du 11 décembre 2001, ayant modifié l'article L. 14538,
alinéa 3, du Code de commerce, devait s'appliquer, l'instance ayant été introduite après l'entrée en vigueur de
cette loi et que les effets légaux d'un contrat étaient régis par la loi en vigueur au moment où ils se produisaient »
(nouvelles règles sur le loyer, et v. déjà sur l'application de nouvelles règles relatives aux loyers, Cass. 3e
civ., 8 févr.
1989, nº 87-1846, Bull. civ. III, nº 33 : « la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques non
définitivement réalisées ayant pris naissance, avant son entrée en vigueur, non en vertu du contrat mais en raison
des seules dispositions légales alors applicables »). Comp. Cass. 1re
civ., 11 avr. 2019, nº 18-16121, pub. Bull.:
« la garantie solidaire [prévue à l'article L. 145-16-2 du code de commerce], dont ce texte limite la durée à trois
ans, ne constitue pas un effet légal du contrat mais demeure régie par la volonté des parties ».
(89) De fait, les solutions sont d'autant plus remarquables que la loi ALUR énumérait les dispositions immédiatement
applicables au rang desquelles ne figuraient pas celles jugées pourtant applicables par la Cour de cassation...
(90) Comme Bach le notait, les « solutions sont difficiles à mettre en œuvre de façon prospective car le critère de la
distinction entre les effets légaux du contrat et les effets contractuels de celui-ci reste à préciser, sinon à découvrir.
» (Rép. civ. Dalloz, VºConflits de lois dans le temps, 2006, nº 575) ; « la distinction entre " contrat " et " statut
légal " est trop imprécise (...), et cela s'explique ; en effet, il n'existe pas de frontière linéaire entre les deux
notions. L'opposition tient dans une différence de degré, plus que dans une différence de nature, car l'on passe
insensiblement d'un cas à un autre, de la notion de " contrat " à celle de " statut légal " , suivant la plus ou moins
grande liberté laissée par le législateur à la volonté individuelle. (...) D'où l'on peut penser que la distinction établie
entre ce qui serait " contrat " et ce qui serait " statut légal " permet seulement, a posteriori, d'enregistrer un résultat
et de justifier une jurisprudence qui, en réalité, n'est pas essentiellement fondée sur elle » (ibid., nº 584).
(91) On comprend davantage les implications de cette théorie lorsque la règle nouvelle ne concerne pas « directement »
les effets d'un contrat. C'est le cas notamment de l'application immédiate de la loi no
75-1334 du 31 déc. 1975
relative à la sous-traitance ayant institué une action directe au profit du sous-traitant (Cass. ch. mixte, 13 mars
1981, Bull. ch. mixte,nº 3 :« l'action directe instituée par l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 trouve son
fondement dans la volonté du législateur et non dans les contrats conclus entre les parties, contrats desquels il
n'était résulté pour elles aucun droit acquis »). Et pourtant, là encore, les incertitudes sont grandes. V., au sujet de
l'action directe du voiturier en paiement de ses prestations instituée par la loi du 6 févr. 1998, Cass. com., 10 mai
2005, Bull. civ. IV, nº 100 : « la loi du 6 février 1998 [loi Gayssot] n'est pas applicable aux contrats conclus
antérieurement à son entrée en vigueur ».
On peut citer, illustrant cette difficulté, l'application d'une règle nouvelle plafonnant les loyers des baux renouvelés
à un bail conclu antérieurement. Alors qu'une cour d'appel avait considéré que la loi nouvelle ne pouvait
«s'appliquer dans le cas d'un renouvellement qui [avait] pris effet avant sa promulgation », la Cour de cassation
considère « [q]u'en statuant ainsi, alors que la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques
non définitivement réalisées ayant pris naissance, avant son entrée en vigueur, non en vertu du contrat mais en
raison des seules dispositions légales alors applicables », la cour d'appel avait violé les règles nouvelles de
plafonnement des loyers (Cass. 3e
civ., 8 févr. 1989, Bull. civ. III, nº 33, nous soulignons. Adde Cass. 3e
civ.,
16 déc. 1987, Bull. civ. III, nº 202). Il est important de relever que des règles relatives au plafonnement des loyers
existaient déjà avant que n'interviennent les règles litigieuses. La solution eut-elle été la même si ces dernières
étaient les premières à instaurer un contrôle des loyers ?
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http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=75-1334 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=75-1334 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=08-13143 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=87-1846 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=18-16121 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=75-1334

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