Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 124

DROIT PÉNAL MÉDICAL
§ I - Les peines criminelles et correctionnelles
168 Plan. - Le Code pénal ne distingue pas pour les personnes morales entre les peines
principales et les peines complémentaires. L'article 131-37 du Code pénal indique en
effet seulement que les peines criminelles ou correctionnelles encourues par les
personnes morales sont l'amende, les peines énumérées à l'article 131-39, la peine de
mise en conformité et, en matière correctionnelle, la peine de sanction-réparation.
A- L'amende
169 Une sanction peu effective. - Il y a peu de particularisme concernant l'amende
encourue par les personnes morales au regard de celle prévue pour les personnes physiques
si ce n'est le quantum. La loi indique à cet égard que le taux maximum de l'amende
applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes
physiques par la loi qui réprime l'infraction. Et lorsqu'il s'agit d'un crime pour lequel
aucune peine d'amende n'est prévue à l'encontre des personnes physiques, l'amende
encourue par les personnes morales est de 1 000 000 euros. Bien évidemment, la peine
d'amende apparaît comme la peine par excellence applicable aux personnes morales
dans la mesure où l'emprisonnement n'est pas concevable en la matière. Si l'on applique
ces seuils légaux, un homicide involontaire commis sur un malade par un médecin
employé dans le cadre d'un hôpital ou d'une clinique ferait encourir une peine
d'amende de 225 000 euros à l'établissement reconnu coupable.
Il est frappant de constater que les décisions de condamnation à l'égard des personnes
morales prononcées en matière médicale sont souvent très éloignées des maximums
légaux. Le constat était frappant à l'égard des premières décisions de condamnation des
personnes morales en matière médicale. Tel est le cas dans une affaire où un hôpital
avait mal pris en charge un nouveau-né, ce qui entraîna son décès. L'établissement fut
condamné pénalement pour homicide involontaire au motif que le mauvais fonctionnement
du service dans la prise en charge pédiatrique des nouveau-nés était suffisamment
établi par le retard avec lequel les examens prescrits ont été effectués et exploités ainsi
que par l'absence d'information donnée aux parents quant à l'état de santé de leur
enfant. Mais la juridiction pénale condamna l'hôpital à une simple amende de
2 000 euros, alors même que dans cette affaire le pédiatre fut condamné à dix mois
d'emprisonnement avec sursis70
.
Dans ces prises de position plus récentes, le juge pénal semble cependant plus sévère
avec les personnes morales, le montant des amendes prononcées atteignant, par
exemple, 20 000 euros,71
75 000 euros72
et même parfois 200 000 euros73
. Même si
l'écart semble donc se réduire, il reste encore un important décalage avec les peines
maximales encourues et entre les peines infligées aux médecins et celles prononcées à
l'encontre des établissements de santé, alors même que souvent une peine pécuniaire
élevée ne met pas en danger la survie financière de la personne morale. Et lorsqu'une
peine d'amende importante est prononcée, il n'est pas rare que le juge décide de
l'assortir du sursis, ce qui tempère grandement l'effectivité de la sanction. Ainsi en est-il
dans une affaire où un établissement de santé fut condamné toujours pour homicide
involontaire à 100 000 euros d'amende dont 80 000 avec sursis74
.
(70) T. corr. Bobigny, 22 avr. 2005, nº 9808260012, préc.
(71) Cass. crim., 23 mai 2018, nº 17-81376 ; Cass. crim., 9 mars 2010, nº 09-80543, préc.
(72) T. corr. Bordeaux, 8 mars 2016, inédit.
(73) Cass. crim., 12 octobre 2021, nº 20-86181, RSC 2022, p. 385, note P. MISTRETTA.
(74) T. corr. Orléans, 26 févr. 2004, nº 514S404, inédit.
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