Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 219

Cha p i t r e 1 - L a p r ot e c t i on de l a v i e e t d e l ' in t é g r it é c o r p o r e lle du ma la de
urgence. Mais dans la mesure où il n'était qu'un auteur indirect du dommage, il put
bénéficier de manière rétroactive de la loi du 10 juillet 2000, si bien qu'il fut en définitive
relaxé des fins de la poursuite273
.
Parfois, l'absence de condamnation du chef de service hospitalier résulte de l'absence de
preuve de l'intervention de ce médecin dans la désignation d'une personne incompétente
en lieu et place de l'interne spécialisé274
. Cependant, même si les chefs de service ont pu
bénéficier de la réforme en qualité d'auteur indirect, la jurisprudence continue de faire
état de condamnations de tels praticiens auteurs indirects de fautes qualifiées ; ce qui
signifie qu'aujourd'hui encore les défaillances grossières et inadmissibles des chefs de
service tombent sous le coup de la loi pénale275
. Récemment encore, dans une affaire
où un patient était décédé des suites d'un surdosage médicamenteux impliquant un
interne d'un centre hospitalier, les juges du fond avaient relaxé le chef de service, alors
que ce dernier ne s'était manifestement pas suffisamment informé, lors de la visite
d'étage qu'il avait faite, des derniers éléments relatifs à l'état de santé du patient, notamment
des résultats du contrôle d'INR, et ne s'était donc pas mis en mesure de corriger la
décision de l'interne. Ils en avaient déduit que cela ne constituait pas une faute de
nature à entraîner sa responsabilité pénale alors qu'il n'est pas établi de lien direct et
certain entre cette faute et le décès. La décision est logiquement cassée ; la haute juridiction
indiquant « qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si la faute commise par le
prévenu entretenait un lien de causalité indirecte avec le décès et dans l'affirmative, si
elle était constitutive d'une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière
de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ou d'une faute caractérisée
et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que le prévenu ne
pouvait ignorer, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision »276
.L'actualité judiciaire la
plus récente montre également que le domaine de la psychiatrie n'échappe pas aux
possibilités qu'offre le droit pénal médical de poursuivre les médecins psychiatres chefs
de service en leur qualité d'auteurs indirects. L'arrêt rendu par la chambre criminelle de
la Cour de cassation le 22 octobre 2019 en est une parfaite illustration277
. Était en cause
une autorisation de sortie non accompagnée dans un parc non clos, octroyée à un malade
potentiellement dangereux sur le plan psychiatrique et ayant des antécédents de fugue,
placé sous le régime de l'hospitalisation d'office, lequel s'était échappé de l'hôpital
psychiatrique où il était soigné pour in fine mortellement poignarder une victime. Le
psychiatre responsable du pavillon hospitalier fut poursuivi et définitivement condamné
en sa qualité d'auteur indirect ayant commis une faute caractérisée.
316 Autres praticiens et causalité indirecte. - Outre les chefs de service, des praticiens qui
n'exercent pas particulièrement des fonctions de contrôle ou d'organisation peuvent être
poursuivis pour avoir indirectement causé une atteinte corporelle au patient. Dans de
telles hypothèses, c'est majoritairement la qualité d'auteur médiat qui est imputée aux
médecins, et notamment aux chirurgiens. Le praticien se voit alors reprocher une abstention
qui ne lui a pas permis d'éviter le dommage du malade278
. À preuve cette affaire
récente dans laquelle une patiente avait fait l'objet d'une thyroïdectomie réalisée par un
médecin oto-rhino-laryngologiste (ORL) au terme de laquelle avaient été posés deux
drains de Redon et un pansement circulaire cervical. Dans la nuit suivant l'intervention
chirurgicale, la patiente appelait à plusieurs reprises l'infirmière en indiquant ne pas se
(273) Cass. crim., 5 sept. 2000, JCPG 2001, II, 10507, note J.-Y. CHEVALLIER ; RSC 2001, p. 157, obs. Y. MAYAUD. La cour
de renvoi se prononce en définitive pour la relaxe du médecin-chef de service, CA Reims, 28 mars 2001, JurisData
nº 2001-151104. V. également pour une application de la loi nouvelle après condamnation d'un chef de service
Cass. crim., 10 janv. 2001, Bull. crim., nº 3.
(274) CA Reims, 28 mars 2001, nº 00/00692.
(275) V. par exemple pour une condamnation, Cass. crim., 3 mai 2006, préc., T. corr. Troyes, 9 févr. 2010, nº 312/10,
inédit ; v. également supra nº 106.
(276) Cass. crim., 16 avr. 2019, nº 18-84566.
(277) Cass. crim., 22 oct. 2019, nº 18-84001, RSC 2020, p. 391, note P. MISTRETTA.
(278) V. par ex. Cass. crim., 21 févr. 2010, nº 09-85791, Dr. pén. 2010, comm. nº 58, obs. M. VÉRON.
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http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=09-85791 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=09-85791
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