Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 82

DROIT PÉNAL MÉDICAL
dommage consiste à avoir mal choisi, mal surveillé ou mal dirigé le personnel paramédical
qui collabore à l'acte médical.
Surtout, il nous semble que la jurisprudence contemporaine est moins encline à reconnaître
la responsabilité pénale médicale dans de tels cas, sans doute sous l'influence de
la logique qui a présidé à la loi nº 2000-647 du 10 juillet 2000, ce qui permet de
renouer avec des solutions plus conformes au principe de responsabilité pénale personnelle
et à l'orthodoxie juridique. Est donc d'un autre temps la jurisprudence qui engage
la responsabilité pénale du chirurgien, et non celle de l'infirmière, au motif que cette
dernière n'a fait que « suivre les instructions du médecin »26
. La jurisprudence contemporaine
témoigne de cette volonté de revenir au principe de responsabilité personnelle pour
engager cumulativement toutes les responsabilités subalternes là ou auparavant seul le
médecin commettant était le plus souvent condamné. Tel est le cas dans une affaire
jugée le 1er
avril 2008 où un enfant de trois ans ayant subi une ablation des amygdales
et des végétations était victime d'un œdème cérébral fatal. Il fut démontré que l'enfant
avait été victime d'une intoxication à l'eau provoquée par la perfusion de deux poches
d'un contenu excessif en un laps de temps trop bref. L'erreur provenait d'une incompréhension
de l'infirmière devant la rédaction non conforme aux règles de l'art du médecin.
La Cour considéra que le médecin anesthésiste qui ne formule pas avec toute la clarté
indispensable la prescription et l'infirmière qui ne demande pas un complément d'information
au médecin prescripteur doivent être déclarés pénalement responsables du
décès27
. Comme le souligne la doctrine commentant l'arrêt, « qu'il soit médecin, infirmier
. Plus récemment, la Cour de cassation a, de
ou sage-femme, chaque membre du groupe ne doit assumer que les conséquences des
actes personnellement accomplis »28
nouveau, eu l'occasion de rappeler les règles de répartition des responsabilités pénales
dans une espèce où une patiente était décédée des suites d'une thyroïdectomie totale
fautive. Dans un arrêt en date du 6 novembre 2018, elle indique, dans une formule particulièrement
claire et pédagogique, pour confirmer la condamnation pénale du médecin et
de l'infirmière que « les fautes retenues à la charge du docteur X... d'une part et de
Mme Z... d'autre part ne s'excluent pas l'une l'autre et sont en lien certain avec le décès
de Muriel B... ; qu'elles s'imbriquent et se cumulent et ont chacune contribué à créer la
situation qui a permis la réalisation du dommage, c'est-à-dire le décès de Muriel B..., en
ce qu'elles ont participé chacune à ce que l'hématome soit découvert trop tardivement
pour qu'une intervention soit efficace ; qu'elles sont donc de nature à engager la responsabilité
pénale de chacun des prévenus dans le cadre des poursuites pour homicide involontaire
[...] »29
.
106 Responsabilité du chef d'équipe du fait des étudiants en médecine. - Là encore, ce sont
les règles classiques d'imputation qui doivent l'emporter avec cependant un particularisme
résultant de la nature des missions incombant à l'interne30
.L'article R. 6153-3 du
Code de la santé publique relatif au statut des internes en médecine dispose que « l'interne
en médecine exerce des fonctions de prévention, de diagnostic et de soins, par délégation
et sous la responsabilité du praticien dont il relève ». Dès lors, la responsabilité de
l'interne peut être recherchée s'il sort de ce cadre légal pour commettre un acte fautif. Il
s'agit là d'une application normale de la responsabilité du fait personnel, et la faute non
intentionnelle sera appréciée in concreto compte tenu des critères posés par
l'article 121-3 du Code pénal et des fonctions visées par l'article R. 6153-3 du Code de
la santé publique.
(26) CA Paris, 17 déc. 1992, JurisData nº 1992-023939.
(27) Cass. crim., 1er
(28) M. VÉRON., obs. ss Cass. crim., 1er
avr. 2008, nº 07-81509, Dr. pén. 2008, comm., nº 93, obs. M. VÉRON. V. également en ce sens
Cass. crim., 16 janv. 2007, nº 06-83179, Dr. pén. 2007, comm., nº 49, obs. M. VÉRON.
avr. 2008, préc.
(29) Cass. crim., 6 nov. 2018, nº 17-82973, RSC 2019 p. 437, obs. P. MISTRETTA.
(30) R. RIALLAND,« L'interne en médecine face à sa responsabilité pénale », Gaz. Pal., 4-5 sept. 2009, p. 22.
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http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=17-82973 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=06-83179 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=17-82973

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