Hors collection - Réforme du statut de l'entrepreneur individuel - 111

CHAPITRE 2 - LE FONCTIONNEMENT DU PATRIMOINE PROFESSIONNEL
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débitrice, la renonciation de l'article L. 526-25 du Code de commerce présente-t-elle alors un intérêt ?
À notre sens, la réponse doit être positive, nonobstant qu'elle implique deux observations.
188. Cas particulier du compte courant débiteur : la date de l'échéance. - D'abord, il a été souligné
que la renonciation doit mentionner la date d'échéance de l'engagement. Or, dans le cadre d'un
découvert autorisé permanent, il n'en existe pas stricto sensu,l'exigibilité de la dette correspondant à
la date de clôture du compte. Et cette date n'est que rarement définie à l'avance, la convention de
compte étant un contrat à durée indéterminée. De ce point de vue, au regard de la rédaction du
texte, il nous semble que deux questions devront se poser.
Premièrement, les pratiques devront évoluer : il ne serait pas possible, à notre sens, d'indiquer uniquement
comme date d'échéance : « date de clôture du compte courant » ! Et la même remarque peut
d'ailleurs être faite pour tous les contrats à durée indéterminée174
. Afin de profiter d'un gage étendu,
les créanciers devront désormais viser des engagements à durée déterminée, par exemple un découvert
autorisé d'une durée donnée.
Un tel obstacle peut se comprendre au regard de la gravité de l'acte envisagé : la renonciation expose
le patrimoine personnel de l'entrepreneur, celui-là même que la loi du 14 février 2022 cherche à
protéger. Le législateur a souhaité éviter le « tout ou rien » du cautionnement175
; il va aussi éviter le
« en tout temps » de la garantie. Ce faisant, un regret peut néanmoins être exprimé, car c'est peut-être
l'accès au crédit qui s'en trouvera fragilisé. Il est certain que la pratique du découvert autorisé est largement
répandue dans le domaine des affaires, même s'il faut admettre que ce mode de financement ne
concerne, le plus souvent, que de faibles montants. Or, permettre à l'entrepreneur de renoncer, à son
propos, à la séparation de ses patrimoines rassurerait l'établissement teneur du compte et soutiendrait
l'octroi de ce type de « facilité », surtout s'agissant d'activités de très faible ampleur où le patrimoine
professionnel est quasiment vide de biens. Et ce d'autant plus que, cela a déjà été dit, l'atteinte au
patrimoine personnel resterait limitée, ces pratiques ne concernant que de faibles sommes.
Secondement, un autre problème réside dans le fait que, dans le cadre d'un compte courant débiteur,
le solde de celui-ci ne sera dû qu'au jour de la clôture du compte. C'est à cette date, et non au moment
où le découvert autorisé temporaire prend fin, que le débiteur pourra être poursuivi. Partant, il se pose
une interrogation bien connue en droit du cautionnement : comment appréhender l'éventuelle différence
entre le solde du compte au jour de la date d'échéance de l'engagement et le solde exigible au
jour de la clôture du compte176
? Une certitude et un doute peuvent être formulés. La certitude : si le
compte courant continue de fonctionner ultérieurement à l'échéance envisagée dans la renonciation,
les débits intervenant postérieurement à la date de l'échéance ne sauraient être pris en considération,
nonobstant le principe d'indivisibilité du compte. Le débiteur a renoncé à la dualité de son patrimoine
pour une dette donnée, soit jusqu'à une date définie. Les écritures débitrices postérieures ne s'imputeront
que sur son seul patrimoine professionnel. Le doute : en matière de cautionnement, la Cour de
cassation applique une règle favorable à la caution depuis l'arrêt Bard de 1972, retenant qu'elle ne
doit que la plus faible des deux sommes entre le solde provisoire, au jour de l'échéance, et le solde définitif,
lors de la clôture du compte177
.L'argument développé consiste à estimer que les mouvements
174. On pourrait, dans le même sens, songer à un bail à durée indéterminée pour lequel le bailleur voudrait profiter d'une
renonciation de la part de son locataire.
175. M.-Ch. Verdier-Jouclas, préc., p. 104.
176. V. notamment, M. Bourassin et V. Brémond, Droit des sûretés,7e
177. Cass. com., 22 nov. 1972, nº 71-10745 : Bull. civ. IV, nº 298.
éd., Sirey, 2020, nº 419.
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