Hors collection - Réforme du statut de l'entrepreneur individuel - 144

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RÉFORME DU STATUT DE L'ENTREPRENEUR INDIVIDUEL
Surtout, l'article 1583 de ce projet affirme expressément que : « Si la loi n'en dispose autrement, la
vente est consensuelle. Elle peut être conclue par écrit sous signature privée ou authentique, verbalement
ou même tacitement ».
Qu'en est-il de la vente du patrimoine professionnel ? Comme l'article L. 526-27 se contente dans son
dernier alinéa de différer l'opposabilité du transfert de propriété à la publication de celui-ci au
BODACC22
, la vente du patrimoine professionnel demeure soumise au droit commun s'agissant de
ses conditions de validité et reste par conséquent un contrat consensuel. Aucun écrit n'est ainsi
exigé, ce qui tranche avec les règles relatives aux cessions de créance, de dette ou de contrat qui en
imposent un, sous peine de nullité depuis la réforme opérée par l'ordonnance du 10 février 2016. Là
encore, la simplicité qu'est censée procurer la transmission universelle que constitue le transfert du
patrimoine professionnel, ne paraît pas compatible avec l'application des règles relatives à ces
cessions et invite à leur neutralisation, comme en matière de fusion, en dépit de la lettre ambiguë de
l'article L. 526-2723
.
256. La détermination du prix. - La section 4 relative au transfert du patrimoine professionnel de
l'entrepreneur individuel ne contenant pas de dispositions relatives au prix, il y a lieu, là aussi, d'appliquer
les règles de droit commun. Si aujourd'hui l'article 1591 exige que le prix soit déterminé et
désigné par les parties, il pourrait être demain déterminé ou déterminable conformément à
l'article 1163 du Code civil, si le nouvel article 1602 proposé par la commission présidée par
M. Philippe Stoffel-Munck venait à être adopté. Les principes traditionnels ayant ainsi vocation à
perdurer, il convient d'être vigilant sur deux points dans le contexte particulier de la vente du patrimoine
professionnel.
Tout d'abord, comme le volume du passif d'un patrimoine professionnel peut excéder le montant des
actifs, la valeur de celui-ci pourrait parfaitement être négative d'un point de vue comptable. Dans
cette hypothèse, faudrait-il admettre l'existence d'une vente à prix négatif24
, alors même que cette
notion est contestée et contestable ? Il est permis d'en douter, car l'entrepreneur individuel voit en
quelque sorte sa responsabilité personnelle limitée par la séparation des patrimoines instaurée par la
loi du 14 février 2022. Une vente à prix symbolique devrait donc suffire, sans qu'il soit nécessaire que
l'entrepreneur individuel vendeur ne soit tenu de verser une quelconque somme d'argent à l'acquéreur
au titre de la reprise du passif. D'ailleurs, quel patrimoine serait tenu d'une telle dette ? Il ne pourrait
guère s'agir que du patrimoine personnel, puisque le patrimoine professionnel aurait été cédé. Pourtant,
ne serait-il pas difficile de considérer qu'il s'agit d'une dette qui n'est pas née à l'occasion de son
exercice professionnel ? Un tel engagement monétaire ne pourrait, en réalité, faire sens que si la
séparation des patrimoines était inopposable à d'importants créanciers. En effet, dans cette hypothèse,
la vente du patrimoine professionnel ne libérerait pas l'entrepreneur individuel des dettes correspondantes
et son patrimoine personnel resterait engagé, ce qui peut alors justifier d'organiser une reprise
du passif.
Ensuite et comme cela vient d'être évoqué, lorsque le passif excède l'actif, la vente du patrimoine
professionnel déficitaire à un prix symbolique suffira à libérer l'entrepreneur individuel, dès lors que
la séparation des patrimoines est opposable aux créanciers professionnels. Le danger n'est-il pas
22. V. infra, nº 284.
23. Sur ce point, v. supra, nº 250.
24. V. not. J. Moury, « Du prix symbolique au prix négatif, ou la divagation des qualifications en matière de vente »,
D. 2014, p. 1950 et s.

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