Hors collection - Réforme du statut de l'entrepreneur individuel - 238

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RÉFORME DU STATUT DE L'ENTREPRENEUR INDIVIDUEL
Comme il a été annoncé, il faut peut-être ajouter aux créanciers les personnes titulaires d'un droit réel
sur un bien inclus dans le patrimoine soumis à la procédure collective. Alors que la jurisprudence
dispensait ces personnes, faute d'avoir la qualité de créancier231
, de déclaration de créance232
,l'article
L. 622-25 semble exiger d'elles qu'elles déclarent leur créance puisqu'il dispose que « la déclaration (...)
précise (...) si la sûreté réelle conventionnelle a été constituée sur les biens du débiteur en garantie de la dette
d'un tiers »233
. La rédaction du texte est néanmoins maladroite et ne permet pas d'affirmer avec
. La situation de ces personnes est d'ailleurs
certitude que la jurisprudence reviendra sur la solution antérieure dès lors que l'article L. 622-24, qui
pose l'exigence de déclaration, ne vise que les créanciers234
à rapprocher de celles qui, sans être des créanciers, bénéficient d'un droit de suite sur un bien dont le
débiteur est propriétaire. Or celles-ci ne semblent tenues à une déclaration, au demeurant spéciale, qui
n'est pas une déclaration de créance235
, que dans le cadre d'une liquidation judiciaire. En effet, l'article
R. 643-5 du Code de commerce ne les soumet pas à la déclaration des créances des articles L. 622-24
et suivants du Code de commerce mais exige qu'elles produisent leur créance « à la procédure d'ordre »,
dans un délai d'un mois à compter de l'avertissement personnel que le liquidateur doit leur adresser par
lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Il est important de noter qu'est également
soumis à cette déclaration particulière le créancier inscrit « du chef de l'entrepreneur sur un bien
compris dans le patrimoine en cause en garantie d'une créance affectant un autre patrimoine ». Ces termes
de l'article R. 643-5 du Code de commerce sont assez intéressants car ils soumettent le créancier de
l'entrepreneur individuel qui a simplement un droit réel sur un bien du patrimoine de la procédure,
non pas à la déclaration de créance de droit commun, mais à la déclaration à la procédure d'ordre236
.
419. Procédure collective affectant deux patrimoines. - Par application de l'article L. 681-2, III, tous
les créanciers de l'entrepreneur sont tenus de déclarer leur créance dans l'hypothèse où la procédure
collective s'applique à la fois au patrimoine personnel et au patrimoine professionnel. Cette procédure
dans la procédure qu'est celle de l'admission de créance, même si elle donnera manifestement lieu à
une ordonnance unique d'admission du juge-commissaire237
, devra bien distinguer les deux
231. Ce qui est discutable au regard de la théorie de Ginossar qui a démontré la relativité de la distinction de la situation du
créancier, titulaire d'un droit dit personnel et de la personne titulaire d'un droit réel sur la chose d'autrui, lequel peut
également être considéré comme étant uni par un lien d'obligation avec le propriétaire de la chose (v. S. Ginossar,
Droit réel, propriété et créance. Élaboration d'un système rationnel des droits patrimoniaux, LGDJ, 1960, p. 5 et s.).
232. Cass. com., 17 juin 2020, nº 19-13153, Act. proc. coll. 2020, repère 177, obs. N. Borga ; BJE sept. 2020, nº 118b4,
p. 24, note C. Favre-Rochex ; LEDEN sept. 2020, nº 113q3, p. 5, note K. Lafaurie.
233. V., en ce sens, S. Atsarias-Dumas, M. Dols-Magneville, « La phase d'identification du passif à la lumière de l'ordonnance
nº 2021-1193 du 15 septembre 2021 et de son décret d'application », Rev. proc. coll. mai 2022, dossier 21, nº 22 ;
M. Tota, « Le cautionnement réel à l'épreuve du traitement de l'insolvabilité », Rev. proc. coll. mai 2022, étude 6, nº 21.
234. V. J. Vallansan, J.-Cl. Procédures collectives, Fasc. 2352 : Déclaration et admission des créances, nº 76.
235. V. Cass. com., 11 juin 2002, nº 00-20982, JCP E 2003, chron. 194, note M. Cabrillac ; JCPG 2002, II, 10116, note
J.-P. Remery ; RTD civ. 2003, p. 328, note P. Crocq ; Defrénois 2003, art. 37691, p. 417, nº 24, note P. Théry.
236. Ce défaut de reconnaissance de la qualité de créancier à l'égard d'un patrimoine, le patrimoine soumis à la procédure,
peut paraître curieux dès lors qu'il est quand même considéré que c'est la personne juridique, unique, de l'entrepreneur
qui est soumise à la procédure collective. La cohérence n'aurait pu être atteinte qu'au prix de la reconnaissance
du dédoublement de la personnalité juridique de l'entrepreneur qui devrait aller de pair avec la pluralité de ses patrimoines
(sur le lien nécessaire entre l'existence d'un patrimoine et la qualité de sujet de droit, v. G. Wicker, La notion
de patrimoine,17e
conférence Albert-Meyrand, Thémis, 2015, nº 18 et s.).
237. Le tribunal traitant, dans un même jugement, des dettes dont l'entrepreneur individuel est redevable sur ses patrimoines
professionnel et personnel, en fonction du droit de gage de chaque créancier (C. com., art. L. 681-2, III, al. 3),
il devrait en effet en aller de même pour le juge-commissaire.
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