Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 31 - Les droits des obligataires confrontés à la procédure collective de l’émetteur - 325

LES CLASSES DE PARTIES AFFECTÉES
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1. Caractérisation de la communauté d'intérêt(s)
353. Intention du législateur européen - Issue de la directive du 20juin
et reprise in extenso par l'article L. 626-30, III du Code de commerce, la
notion de « communauté d'intérêt » dénote par sa singularité dans un corpus de textes
lui préférant traditionnellement les notions plus classiques d'intérêts communs et d'intérêt
collectif101. Dans un contexte où les impératifs d'harmonisation impliquent l'utilisation
d'un « vocabulaire qui puisse se traduire dans chacune des langues de
travail »102, le recours à cette notion par la directive invite à s'interroger sur l'intention
du législateur européen selon la langue dans laquelle le texte a été négocié et
amendé103. La langue source du texte européen ayant probablement été l'anglais104,
on a pu s'interroger sur l'éventuelle filiation de cette notion avec celle de « community
ofinterests », bien connue du monde anglo-saxon où elle revêt une signification totalement
différente de celle qui viendrait à l'esprit pour caractériser les créanciers d'une
entreprise en difficulté. En anglais américain, le terme « community » est ainsi défini
comme « un ensemble des personnes vivant dans une zone ou un lieu spécifique ou
considérés comme constituant une unité en raison de leurs intérêts communs, de leur
appartenance à un groupe social ou à une nationalité »105, partageant de fait un sentiment
d'appartenance, qui se traduit chez les membres de la communauté par une
100. La notion d'intérêt commun est d'abord visée au considérant 44 avant d'être plus amplement
évoquée à l'article 9, 4º, aux termes duquel « les États membres veillent à ce que les parties affectées soient
réparties dans des classes distinctes représentatives d'une communauté d'intérêt suffisante, sur la base de
critères vérifiables, conformément au droit national » puis à l'article 10, 2 b), aux termes duquel « les créanciers
partageant une communauté d'intérêt suffisante au sein de la même classe bénéficient de l'égalité de
traitement, et sont traités de manière proportionnelle à leur créance ».
101. Sur les développements relatifs aux notions d'intérêts communs des obligataires et d'intérêt
collectif des créanciers, v. supra nº 25 et s. et 57 et s.
102. SAUTONIE-LAGUIONIE L., L'ordonnance nº 2021-1193 du 15 septembre 2021 : la réforme attendue
du droit des entreprises en difficulté est déjà applicable ! JCP E 2021, actu. 672, spéc. nº 3.
103. Le principe d'accès au droit impliquant que chaque député au Parlement Européen puisse prendre
la parole, écouter, lire et écrire dans sa propre langue, les textes officiels sont à cet effet traduits dans les
24 langues officielles de l'Union Européenne. Pour couvrir les 552 combinaisons linguistiques possibles, le
Parlement recourt parfois au système de langues « pivot » permettant à un texte d'être d'abord traduit dans
l'une des trois langues les plus couramment utilisées (anglais, français ou allemand), puis à partir de celle-ci
vers toutes les autres. Directement interrogé sur la langue « pivot » utilisée pour la directive, le service du
porte-parole de l'Union Européenne nous a indiqué ne pas être en mesure d'apporter une réponse claire, dès
lors que le dossier législatif a été débattu et amendé dans plusieurs Commissions (et en plusieurs langues) et
que le service responsable décide de la langue relais à utiliser en fonction des disponibilités du personnel et
de la couverture linguistique. Toutefois, il nous a été indiqué que le système de relais était utilisé en dernier
recours, lorsque l'unité linguistique ne peut couvrir une combinaison linguistique particulière. Le français
étant une langue relais, l'unité de traduction française couvre presque toutes les combinaisons linguistiques
vers le français, de sorte que la plupart des textes sont traduits de la langue source vers le français sans
recours à une langue relais.
104. V. sur le sujet les développements de Monsieur Thierry Fontenelle, traducteur au sein du Centre
de traduction des organes de l'Union européenne (CDT), qui indique que « la situation linguistique au sein
des institutions européennes a bien changé ces 50 dernières années. Alors que le français était la langue de
travail principale il y a encore une vingtaine d'années, les élargissements successifs de l'Union européenne
ont quelque peu changé la donne (à part probablement à la Cour de justice, où le français reste la langue de
travail principale). Une majorité des documents émanant des différentes institutions sont désormais le plus
souvent rédigés en anglais et traduits dans les autres langues de l'Union afin de pouvoir être diffusés auprès
des citoyens européens », FONTENELLE T., La traduction au sein des institutions européennes, Revue française
de linguistique appliquée 2016, p. 53.
105. Traduction libre de la définition donnée à l'expression « community of interest » par le Cambridge
Dictionnary et le Collins.
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