Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 31 - Les droits des obligataires confrontés à la procédure collective de l’émetteur - 338

338 LES DROITS DES OBLIGATAIRES CONFRONTÉS À LA PROCÉDURE COLLECTIVE DE L'ÉMETTEUR
de commerce prévoit en effet que « les détenteurs de capital forment une ou plusieurs
classes », distinctes du reste des autres classes de parties affectées. Subrepticement, le
critère d'identité de droits réapparaît. Si les détenteurs de capital sont amenés à voter
ensemble au sein d'une ou plusieurs classes, c'est parce qu'ils relèvent de (i) l'assemblée
générale extraordinaire ou de l'assemblée des associés, (ii) des assemblées spéciales
mentionnées aux articles L. 225-99 et L. 228-35-6 du Code de commerce et (iii)
des assemblées générales des masses visées à l'article L. 228-103 du Code de commerce.
De là à dire qu'àl'identité de droits correspond l'identité de classe, il n'ya
qu'un pas. Cette lecture serait confortée par l'idée que les détenteurs de capital « forment
», aux termes de l'article L. 626-30, III du Code de commerce, une ou plusieurs
classes, à la différence des créanciers qui sont simplement « répartis » au sein d'une
ou de plusieurs classes de parties affectées. On pourrait en conclure que par exception,
les détenteurs de capital bénéficient d'un regroupement fondé sur le régime juridique
dont ils relèvent, ce qui revient à dire qu'à chaque catégorie de détenteur de
capital correspondrait une classe attitrée. Les classes des détenteurs de capital et a
fortiori celles des porteurs d'obligations donnant accès au capital seraient ainsi « prédéterminées
», qualification résultant du rapport au président de la République relatif
àl'ordonnance du 15 septembre 2021200 laissant peu de doute quant à l'intention du
législateur de voir ces classes formées en considération du régime juridique qu'il leur
est applicable. Pour le cas spécifique des détenteurs de capital, le critère de la communauté
d'intérêt suffisante ne serait ainsi pas requis.
Peut-on aller plus loin et affirmer que les porteurs d'obligations donnant accès au
capital relevant d'une même masse sont garantis de voter au sein d'une classe dédiée ?
La rédaction de l'article L. 626-30, III 3º du Code de commerce est, à cet égard, peu
explicite. Que vise-t-on par l'expression « une ou plusieurs classes » ? Peut-on en
conclure que pour le cas spécifique des porteurs d'obligations donnant accès au capital,
intérêts communs et communauté d'intérêt(s) économique suffisante se confondent
? On retrouve les mêmes interrogations que celles suscitées par
l'article R. 626-61 du Code de commerce au sujet des obligations ordinaires201.
364. Tentative de réconciliation des textes - Une autre approche, que l'article
L. 626-30, III du Code de commerce semble également suggérer, consisterait à
considérer qu'en dépit d'une consultation distincte du reste des parties affectées, les
détenteurs de capital n'en demeurent pas moins soumis, entre eux, au principe de
répartition en classes représentatives d'une communauté d'intérêt économique suffisante.
Dans le cadre de la procédure de sauvegarde accélérée ouverte au profit de la
société Pierre et Vacances le 31 mai 2022202, les porteurs d'ORNANE ont ainsi été
consultés en qualité de détenteurs de capital dans une classe distincte de celle des
actionnaires, au motif que n'étant pas eux-mêmes actionnaires de la société à l'ouverture
de la procédure collective, ils « ne partageaient pas avec ces derniers une communauté
d'intérêt économique suffisante pour justifier la constitution d'une seule
classe de « détenteurs de capital » au sens de l'article L. 626-30 du Code de
200. Rapport au président de la République relatif à l'ordonnance nº 2021-1193 du 15 septembre
2021 portant modification du livre VI du Code de commerce.
201. V. supra nº 353.
202. T. com. Paris, 31 mai 2022, nº P202201039, Pierre et Vacances.

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