Précis Domat - Droit des biens - 6e - 172

DROIT DES BIENS
personnellement engagé par un acte auquel il demeure étranger, mais qu'il doit en
supporter malgré tout les conséquences.
2. Sanction des actes irréguliers
193 Difficulté. - La question du sort des actes irrégulièrement consentis par un indivisaire
est complexe : elle embarrasse doctrine et jurisprudence. La nullité, qui
vient immédiatement à l'esprit, a paru une sanction trop radicale au regard de l'effet
déclaratif du partage. Qu'il advienne en effet que le bien en cause soit placé dans le
lot de l'auteur de l'acte irrégulier et il s'avérera qu'en définitive celui-ci a été
accompli par le propriétaire légitime du bien : l'annuler n'aurait aucun sens. Il
semble pourtant difficile de différer la solution du problème jusqu'au partage de
l'indivision. L'état du droit positif sur la question est loin d'être satisfaisant. Son
exposé suppose de distinguer nettement le statut de l'acte irrégulier quant aux parties
et quant aux coïndivisaires dont le consentement a fait défaut.
194 Rapports entre les parties à l'acte. - La question est de savoir si le tiers
acquéreur peut arguer de ce que l'acte n'a pas respecté les exigences de l'article
815-3 pour en poursuivre la nullité105
. La Cour de cassation a tendance aujourd'hui,
en s'appuyant sur l'idée de quote-part, à retenir la nullité partielle de l'acte :
l'indivisaire a en partie disposé de sa chose, en partie disposé de la chose d'autrui si
bien que l'acte est partiellement valable106
taire de la chose entière et la situation de concurrence dans laquelle il se trouve
placé n'y change rien107
la validité partielle est délicate à manier108
efficacité ou inefficacité totale de l'acte.
. Il faut au problème une solution claire,
■ 105. Lorsque l'acte juridique est une action en justice, la Cour de cassation se prononce pour l'irrecevabilité
de la demande en cas de non-respect des conditions de majorité requises (Cass. 3e
civ., 12 avr.
2018, nº 16-24566 ; Bull.). Cette position est critiquable, ces exigences ayant trait non à la validité (ou à
la recevabilité) de l'acte, mais seulement à son efficacité. Ainsi, lorsque l'action peut être rattachée à la
catégorie des actes d'administration, il serait nécessaire que les indivisaires demandeurs représentent au
moins les deux tiers des droits indivis pour que la décision rendue soit de plein droit opposable aux autres,
étant toutefois observé que cette opposabilité resterait toujours conditionnée à ce qu'ils aient été au moins
mis en cause dans l'instance (arg. C. civ., art. 815-3, al. 2. - pour une action conservatoire : Cass. 1re
civ.,
18 déc. 2013, nº 12-27059 ; Bull. ; JCP G 2014, p. 751, obs. H. PÉRINET-MARQUET ; RTD civ. 2014, p. 405,
obs. W. DROSS. - Cass. 1re
civ., 13 févr. 2019, nº 18-13484).
■ 106. Cass. civ., 18 nov. 1897, DP 1880, 1, p. 55. - reprochant aux juges du fond de ne pas avoir recherché
si l'échange d'une parcelle consentie par un seul coïndivisaire n'était pas valable pour la seule part
indivise de celui-ci : Cass. 3e
civ., 25juin 1975, nº 73-14726 ; Bull. civ. III nº 222. - pour la prorogation
civ., 21juin 1995, nº 93-17522 ; Bull. civ. III nº 154. - pour la vente d'un immeuble
d'une promesse de vente consentie par un seul indivisaire, valable pour la portion indivise qui lui appartient
dans le bien : Cass. 3e
indivis, Cass. 3e civ., 12 mai 2010 ; nº 08-17186 ; Bull. civ. III nº 95 ; RDC 2011, p. 158, obs. M.MEKKI.
■ 107. Contre cette représentation des choses, il faut affirmer au contraire que le cédant est propriétaire
non de sa quote-part mais de la totalité du bien, cela de manière concurrente. Dès lors qu'il n'y a pas de
division de l'objet cédé, il ne saurait y avoir nullité partielle de l'acte.
■ 108. D'ailleurs, si l'on estime avec la Cour de cassation que la cession n'a pas porté sur la chose indivise
mais sur la seule quote-part du disposant, une telle cession pourrait être annulée faute de purge du droit
de préemption des coïndivisaires.
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. Le raisonnement est très contestable car
l'idée de quote-part est un faux-semblant (supra no 160) : l'indivisaire est proprié.
Il conduit de surcroît à des solutions inopportunes, tant
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