Bibliothèque de droit public - Tome 333 - Nouvelles recherches sur la condition juridique des établissements publics - 63

L'INCIDENCE LIMITÉE DE LA LÉGALITÉ
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de l'action du pouvoir »77. Ainsi, l'auteur retient que l'ordonnance de police du 9 août
1828, « se contente de prescrire pour accorder l'autorisation, l'accomplissement de
certaines mesures de salubrité, d'hygiène et de police, inséparables de tout établissement
de ce genre, mais ne vise aucun texte de loi restrictif de la liberté de créer de tels
établissements »78. Et, « quant à l'autorisation du préfet de police, elle ne peut être
refusée dès lors que l'établissement remplit toutes les conditions voulues. Un refus
d'autorisation motivé arbitrairement sur d'autres raisons que l'inobservation des
règles ordinaires de sûreté, de salubrité et d'ordre exposerait le fonctionnaire à un
recours judiciaire »79.
2. La concrétisation d'une catégorie légale préexistante
83. L'État ne retient plus la création de toutes les personnes morales. Il crée des
catégories de personnes morales que les particuliers ou l'administration concrétisent.
Conformément à l'ancienne maxime du droit public français, selon laquelle « c'est le
pouvoir législatif qui donne l'existence virtuelle »80, le législateur est compétent pour
créer les catégories de personnes morales. Cette maxime a notamment été utilisée au
début du XIXe
siècle dans les débats relatifs à la question de savoir qui du roi ou des
chambres était compétent pour autoriser la formation des congrégations religieuses de
femmes. Louis de Bonald développa devant la chambre des pairs un argumentaire en
faveur d'une répartition des compétences entre le pouvoir législatif et le pouvoir
réglementaire, reposant sur une maxime générale prescrivant que « c'est le pouvoir
législatif qui donne l'existence virtuelle et c'est le pouvoir administratif qui réduit
en acte cette existence. [La loi fixera] le mode et les conditions d'existence de cette
personne collective et morale qu'on appelle une communauté religieuse ; et l'ordonnance
appliquant ce principe, autorisera, conformément à la loi, les communautés religieuses
qui demanderont à s'établir. [...] Le droit de créer abstractivement une personne
morale, capable d'acquérir et de posséder, appartient au pouvoir législatif; la
faculté de réaliser ostensiblement cette création par l'établissement d'une congrégation
religieuse appartient au pouvoir administratif»81. Le Conseil d'État a eu l'occasion
d'appliquer cette maxime. Il a par exemple refusé à une congrégation religieuse
d'hommes, sur le fondement des « principes de notre droit public », le droit de recevoir
des dons et legs. En effet, alors que le Gouvernement avait été autorisé par une
loi à constituer les congrégations religieuses de femmes en personnes morales par un
simple décret, ce qui leur donnait le droit de recevoir des dons et legs, aucune loi
n'étendait cette faveur aux congrégations religieuses d'hommes82.
84. La doctrine libérale ayant remis en question la prérogative de l'administration
pour concrétiser les catégories de personnes morales, ce n'est plus seulement « le pouvoir
administratifqui réduit en acte l'existence [des personnes morales] ». Le législateur
distingue les catégories de personnes morales qui sont concrétisées par les particuliers
en application de leurs droits et libertés fondamentaux et celles dont la mise en acte est
77. Henri Becker, La Loi, les hôpitaux homoéopathiques et les ambulances homoéopathiques à
Paris, en France et à l'étranger, Baillère, Paris, 1870, p. 87.
78. Ibid., p. 87.
79. Ibid., p. 89.
80. L.-L. Charrier, Commentaire de la loi des congrégations religieuses de femmes, J.-L. Chanson,
Paris, 1825, p. 9.
81. Ibid.,p. 9.
82. CE, Avis, 16juin 1881, Société de Marie, D. P., 1882, 3, p. 21.

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