Bibliothèque des sciences criminelles - Tome 73 - Le cumul de sanctions - 396

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LE CUMULDESANCTIONS
réaction à la communication par le contribuable, peut-être innocemment, de déclarations
ou informations inexactes ou incomplètes, et elle vise aussi à compenser les
ressources humaines etfinancières considérables consacrées par les autoritésfiscales
pour le compte de la collectivité aux contrôles et vérifications destinés à repérer les
déclarations erronées »21. Pourtant, dans ce même arrêt, elle considère que les pénalités
fiscales s'identifient en des mesures relevant de la matière pénale, conformément
à sa jurisprudence antérieure22.
D'abord, n'y a-t-il pas là quelque contradiction à considérer qu'une mesure
relève de la matière pénale tout en ne poursuivant pas un objectif punitif? La punition
n'est-elle pas l'essence même de la matière pénale23 ? De plus, comment adhérer à
l'idée que l'infliction d'une amende fiscale aurait uniquement pour but de compenser
les coûts supportés par l'État et générés par la lutte contre les contribuables ayant
communiqué des informations incomplètes ou inexactes24 ? Enfin, si le caractère
purement compensatoire des pénalités fiscales devait être admis, cette pénalité ne
devrait-elle pas être précisément calculée, afin de déterminer au plus près la réparation
due ? En effet, la réparation doit être strictement appréciée, afin de réparer ni plus, ni
moins que ce que le dommage a causé. Or, il n'existe pas de mode de calcul spécifique
de la réparation en droit norvégien à l'examen dans l'arrêt concerné. Le droit
français, quant à lui, prévoit un système d'infliction des amendes fiscales similaire à
celui de l'amende pénale, sans égard au préjudice subi par l'État du fait du manquement
poursuivi. Sa conventionnalité apparaît alors douteuse.
506. Le caractère restrictif de la complémentarité des procédures pour l'appréciation
de l'idem - En second lieu, l'opinion dissidente du juge Pinto de Albuquerque
au sein de l'affaire Aet B c. Norvège25 expose que les tempéraments apportés
par la majorité au principe ne bis in idem à travers les critères utilisés pour l'appréciation
de l'étroitesse du lien matériel ont pour effet corrélatif de diminuer la portée de
la jurisprudence Zolotoukhine, cette dernière ayant imposé une conception matérielle
de l'idem pour l'application de ne bis in idem26.
En effet, la Cour de Strasbourg reconnaît que les États membres peuvent appréhender
un même comportement à travers différentes procédures sans atteindre ne bis
in idem, pourvu que ces dernières soient suffisamment complémentaires, notamment,
en poursuivant des fins distinctes en vue d'appréhender différents aspects de ce même
comportement. Ce raisonnement conduit, après avoir affirmé l'unité matérielle du
comportement poursuivi, à le fragmenter de nouveau, dans le but de justifier son
appréhension à travers des procédures distinctes. Ainsi, un comportement unique,
par exemple l'absence de déclaration fiscale dans les délais impartis, pourra être
21. Cour EDH, gde ch., 15 novembre 2016, Aet B. c. Norvège, préc., § 144.
22. Ibid., §§ 138 et 139.
23. C'est d'ailleurs là le critère Engel (v. supra, nº 192) revêtant la plus grande importance pour
l'examen de l'appartenance d'une mesure à la matière pénale, v. not. Cour EDH, gde ch., 23 novembre
2006, Jussila c. Finlande, préc., §38 : « Le deuxième critère, qui touche à la nature de l'infraction, est le
plus important ». Or, la nature de l'infraction s'identifie par référence à la portée des personnes concernées
par la mesure, et le but que cette dernière poursuit.
24. Ne faudrait-il pas alors, à ce compte, considérer par extension que les amendes pénales ont pour
but de financer les services d'enquête ?
25. Opinion dissidente du juge Pinto de Albuquerque dans l'arrêt Cour EDH, gde ch., 15 novembre
2016, Aet B. c. Norvège, préc., pp. 55 et s.
26. V. supra, nº 132, Cour EDH, gde ch., 10 février 2009, Zolotoukhine c. Russie, préc.

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