Droit civil - Droit des personnes - 13e - 394

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DROIT DES PERSONNES
médicalement constatée et estampillée par le greffe. Il est capable, mais d'une capacité diminuée,
« sauvegardée ». Le majeur qui s'était cru protégé par son mandat est en réalité mal protégé,
d'une protection peu efficace et illusoire. Sauf démonstration (difficile) de son insanité d'esprit,
il ne pourra faire annuler les actes qu'il a conclus après altération de ses facultés (c'est-àdire
après la prise d'effet du mandat au greffe). Il (ou ses héritiers) pourra, tout au plus, les faire
réduire ou rescinder selon une procédure judiciaire dont tout le monde connaît le coût et l'aléa.
Au surplus, ce mandat peut aboutir à la cacophonie : mandant et mandataire ayant chacun les
mêmes pouvoirs sur les mêmes biens, que deviendront les aliénations consenties par chacun sur
les mêmes biens à des personnes différentes ?
Certains auteurs y sont favorables, y voyant ce qui devrait être désormais le mode normal de
protection, les autres n'étant que subsidiaires63
. Telle est la position du droit français qui, depuis
la loi de programmation et de réforme pour la justice du 23 mars 2019, fait primer le mandat de
protection future sur tout autre dispositif de protection (C. civ., art. 428) et de la convention internationale
relative aux droits des personnes handicapées, entrée en vigueur en France en 2010,
qui met au pilori les mesures substitutives attentatoires à la capacité juridique.
Au Québec, la déclaration médicale d'inaptitude constitue une incapacité dès qu'elle a été
homologuée par un juge : une vraie protection, qui a réussi, bien que souvent soit demandé
encore plus de contrôle judiciaire. En Espagne, le mandant a le choix entre deux mandats :
l'un à la française (sans homologation) ; l'autre à la québécoise (avec homologation) ; là aussi,
une bonne protection, qui a bien réussi.
Avec l'expérience que l'on peut maintenant en avoir en France, ce mandat fonctionne mal
dans les familles qui ne s'entendent pas64
mais c'est aussi le cas des mesures de protection judiciaire
lorsque la famille s'oppose à la mesure.
À vrai dire, l'organisation d'une publicité des mandats de protection future signés et de ceux
mis en œuvre pourrait réaliser un véritable progrès, de nature à améliorer le fonctionnement de
ces mesures conventionnelles de protection. Il en serait de même de l'ouverture du mandat de
protection future au mécanisme de l'assistance et de la possibilité de le mettre en œuvre dès sa
conclusion, tout en permettant son ajustement sous le contrôle du juge en fonction de l'évolution
de l'état de santé du mandant, ainsi que l'ont suggéré le rapport de la mission interministérielle
sur la protection juridique des majeurs présidée par Mme Anne Caron-Déglise en 2018 et
le 116e
congrès des notaires consacré, en 2020, à la protection. La loi du 8 avril 2024 a prévu la
création d'un registre national dématérialisé regroupant les informations relatives à l'ensemble
des mesures de protection juridique des majeurs, et, notamment aux mandats de protection
future mis en œuvre. L'entrée en vigueur de cette disposition a été reportée à une date fixée
par décret, et au plus tard au 31 décembre 2026 (C. civ., art. 427-1). L'article 477-1 du Code
civil, prévoyant la création d'un registre spécifique aux mandats de protection future, n'a pas
été abrogé par la loi. Deux registres devraient donc voir le jour. En revanche, le législateur a
abandonné le projet, un temps envisagé par la proposition de loi, d'ouvrir le mandat de protection
future à l'assistance.
63. J. HAUSER, « Les mesures judiciaires, solutions subsidiaires au mandat de protection future », in
Nouveau droit des majeurs protégés, p. 13.
64. Ex. : dans l'affaire Liliane Bettencourt, la fille a contesté le choix du mandataire de protection
future et obtenu du juge des tutelles la mise sous tutelle de sa mère ; un avis antérieur de la Cour de
cassation avait, à sa demande, constaté son désistement de l'instance de mise sous protection judiciaire
de sa mère, Cass. civ., avis, 20 juin 2011, RTD civ. 2011.512, obs. J. Hauser ; v. supra, nº 391.

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