Droit civil - Droit des personnes - 13e - 56

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DROIT DES PERSONNES
égalitaire (l'égalité de l'homme et de la femme) et le poids de la tradition ; entre la
nation et l'étranger ; entre la non-patrimonialisation et le commerce.
33. 1º Usage et loi. - Le nom dépend de l'usage, comme tout ce qui relève de
la langue ; c'est l'usage qui l'a fait naître et le fait vivre. Il est aussi soumis à la loi
écrite :l'identification d'une personne, surtout dans une société aussi nombreuse
et agitée que la nôtre, ne peut accepter un nom imprécis, variable selon les
moments, les lieux, la volonté de l'intéressé et les attitudes des autres. Cette antinomie
met ainsi en jeu la source juridique du nom : usage, loi ou règlement ? Elle
commande aussi sa fixité ou ses changements.
Dans ce domaine, comme dans d'autres, la loi (L. 4 mars 2002 souvent modifiée) et le droit
européen exprimé par la Cour européenne des droits de l'homme7
interviennent de plus en plus
en raison de l'idéologie unitaire et égalitaire de l'Europe contemporaine, traduisant une certaine
indifférence à l'histoire, à la tradition et à la diversité de ses cultures. Mais la loi nouvelle n'est
pas impérative et l'usage continuera d'exercer un rôle prépondérant.
34. 2º Personne, famille et État. - 1) Le nom est enraciné dans le tréfonds de la personne,
puisqu'il en est le signe. 2) Il est aussi l'expression de son appartenance à un groupe familial. Ces
deux aspects ne se contredisent pas, car une personnalité dépend en partie du groupe familial
auquel elle appartient : le nom fait partie de l'état de la personne et du droit civil. Et l'on comprend
ainsi les règles d'attribution du nom : par la filiation et par le mariage, c'est-à-dire par la
famille. 3) De même, il est lié à l'État, car il est une institution de police permettant d'identifier
une personne. Là aussi, l'opposition n'est pas tranchée : une personnalité dépend, en partie, du
groupe national auquel la personne appartient ; le nom relève des lois de police et du droit
administratif. Et l'on comprend la dépendance du nom aux services de l'état civil.
35. 3º Volonté, État, famille, usages sociaux. - Les interférences entre la liberté et le commandement
et entre la personnalité, la famille et l'État mêlent tous les aspects du nom : la combinaison
en est donc compliquée. 1) Si le nom avait seulement exprimé une personnalité, il
aurait dû uniquement dépendre de la volonté individuelle de celui qui le porte : chacun devrait
pouvoir se définir comme il l'entend ; on comprend le régime du pseudonyme, librement choisi
par son auteur ; on comprend aussi le rôle important que depuis 2002 la loi confère pour le nom
à la volonté individuelle, traduisant la place croissante que celle-ci joue maintenant dans le droit
de la famille. 2) Si le nom avait été seulement une identification de la personne, il aurait dû
uniquement dépendre de l'État ; on comprend le régime de la fixité du nom. 3)S'il avait seulement
traduit une appartenance à une famille, il aurait dû uniquement dépendre de celui ou de
ceux qui dirigent la famille ; on comprend le régime traditionnel du prénom, son choix, ses
changements et l'attribution du nom de famille. 4) Si le nom exprime, comme une langue, la
civilisation d'une société et son histoire, il est lié aussi aux usages sociaux, à des pratiques administratives,
des habitudes individuelles et familiales, des actes de volonté individuelle et des
idéologies passionnelles. S'impose ainsi l'entrelacs complexe de la loi, de la volonté individuelle
et de l'usage. Sauf avec de grandes contraintes, à elle seule, la loi est impuissante à régir le
tréfonds d'une personne : toute l'histoire de ses échecs est là pour le montrer. À elle seule, la
volonté individuelle est également impuissante. Sur le nom, le pouvoir de l'usage est aussi incertain
que l'est l'inconscient collectif.
36. 4º Nation et étranger. - Le nom exprime le lien entre la personne et une communauté
nationale. La nation française est de plus en plus ouverte ; ses nationaux ont souvent des origines
multiples : des Germains, des Flamands, des Latins, des Celtes, des Africains, des Basques, des
Vietnamiens, des Juifs, des Arabes, des Libanais, des Syriens, des Algériens, des Marocains, des
7. CEDH, 22 févr. 1994, Burghartz c/Suisse, D. 1995.5, n. J. P. Marguénaud ; JCPG 1995.I.3823,
nº 31, obs. Fr. Sudre : « La progression vers l'égalité des sexes est aujourd'hui un but important des
États membres du Conseil de l'Europe ; partant, seules des considérations très fortes peuvent amener
à estimer compatibles avec la Convention (Conv. EDH) une différence de traitement fondée exclusivement
sur le sexe » ; sur cet arrêt, v. aussi infra, nº 64.
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