Droit des affaires - Insolvabilité des États et dettes souveraines -1 - 14

Insolvabilité des États et dettes souveraines

défaillants, il s’est agi de leur octroyer par le truchement de nouveaux prêts des délais de paiement de quelques années, en partant du principe que les versements pourraient ensuite reprendre normalement. Les défauts souverains étaient donc uniquement envisagés comme des crises de liquidité, et non comme – ce qu’ils étaient pourtant bien – des crises de solvabilité. Il y a eu là une appréciation à courte vue qui n’a pas permis de résoudre les difﬁcultés de remboursement propres à ces États. Au mitan de la décennie 1980, le Secrétaire américain au Trésor James Baker a bien proposé une réponse sensiblement différente aux situations de défaut souverain. Il s’agissait toujours d’accorder aux États concernés de nouveaux prêts, mais en soumettant leur octroi notamment par les banques multilatérales de développement à une évolution vers l’économie de marché, à travers des privatisations d’entreprises publiques, des réductions d’impôt et la libéralisation des investissements 16. Ces réformes devaient amener pour ces États la croissance, laquelle devait leur permettre de ﬁnalement rembourser leurs dettes. Toutefois, comme les tentatives antérieures, il est apparu dès 1987-1988 que le Plan Baker n’avait pas permis de réduire la dette souveraine des États concernés. Pendant la période allant de 1982 à 1987, le montant des créances dues aux banques commerciales est certes resté à 250 milliards de dollars, mais, dans le même temps, les créances des institutions internationales sont passées de 50 milliards de dollars en 1982 à 120 milliards de dollars en 1987. Face à ce nouvel échec, la nécessité d’accepter une décote des créances s’est imposée à tous, et en premier lieu au gouvernement américain. C’est ainsi qu’en 1989, le nouveau Secrétaire d’État au Trésor N. Brady a annoncé qu’une réduction de la dette souveraine notamment des États d’Amérique latine était devenue incontournable. Contre une politique de libéralisation des échanges, les États endettés se sont donc vus proposer à la fois une réduction de leurs encours et, accompagnant celle-ci, un échange des prêts bancaires existant contre des titres obligataires négociables. À titre d’exemple, le Mexique a accepté l’échange de ses crédits bancaires existant contre des obligations à 30 ans portant intérêt à 6,25 %, lesquelles étaient émises avec une réduction de 35 % par rapport à la valeur nominale. Ces « Brady bonds » ont connu un franc succès et ils sont à l’origine du développement d’un marché des obligations souveraines au cours des années 1990. Alors que les crédits bancaires prévalant jusqu’ici n’étaient pas cessibles, leur remplacement par des titres négociables a permis l’émergence d’un véritable
16. E.N. GUIER, « La position du gouvernement américain en matière d’endettement des États : du plan Baker à l’initiative Brady » in D. CARREAU et M.-N. SHAW (dir.), La dette extérieure, Kluwer, 1995, p. 111-137, spéc. p. 118-120.

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