Droit des affaires - Insolvabilité des États et dettes souveraines -1 - 189

Le marché de la dette souveraine

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Avec la crise ﬁnancière, les structures, les rapports de force ou d’inﬂuence, se dévoilent. En répandant une forme d’information, voire de culture économique, la crise déniaise le citoyen. Pour l’ordre établi sur la religion du marché, voilà sans doute l’effet le plus funeste. Si la vision dominante dispose de l’avantage des religions institutionnalisées, ne pas avoir à se justiﬁer, être admise comme argent comptant sans longs discours, elle perd déjà sur ce terrain de la communication. Pour l’ordre établi, la crise la plus grave pourrait être la crise de foi.

SECTION 2

CRISE DE FOI ?
Pourquoi réguler l’information sur le marché des dettes, souveraines ou pas ? C’est tout simplement que le marché parfait supposerait un égal accès aux informations. Toute dissymétrie provoquerait l’inefﬁcience des mécanismes prétendument autorégulateurs en éloignant le prix de la valeur fondamentale. Car une question taraude en permanence les intervenants sur les marchés : est-ce que ça vaut le prix afﬁché ? Autrement dit, les biens auraient une qualité substantielle, la valeur, dont le prix ne serait que le reﬂet. Un marché parfait révélerait cette valeur fondamentale par un prix d’équilibre entre l’offre et la demande. Pourtant la crise ﬁnancière qui secoue la planète montre au grand jour que cela ne fonctionne pas ainsi. Alors que pour les béotiens, le marché ﬁnancier ou la bourse représentent les modèles même du marché, cette croyance se désintègre. Les marchés n’assurent pas les fonctions essentielles que la théorie leur assigne, l’équilibre et la stabilité. Les économistes et leurs outils se trouvent mis en cause pour ne pas avoir su anticiper les événements 17. Le régulateur, trompé par la
17. Si les économistes, orthodoxes au moins, ﬁgurent au banc des accusés, ils tirent un parti remarquable de cette défaillance collective. Les ouvrages sur la crise se sont multipliés ces dernières années. Pour une analyse sans complaisance des évènements, cf. Elie COHEN, Penser la crise, Fayard, 2010. Mais l’auteur ne parvient pas tout à fait à se détacher des intérêts corporatistes des orthodoxes quand il donne la liste des auteurs ayant annoncé les évènements. Il oublie, par exemple, Maurice ALLAIS, qui n’est que le seul français à avoir décroché le « Nobel d’économie » ; Jacques SAPIR, Les trous noirs de la science économique. Essai sur l’impossibilité de penser le temps et l’argent, Seuil, 2003, Albin Michel, 2000 pour la première édition ou encore Pierre-Noël GIRAUD, Le commerce des promesses. Petit traité sur la ﬁnance moderne, Seuil, 2001, avec une nouvelle édition de 2009. Il oublie aussi tous les « hétérodoxes » qui invitent depuis des lustres à penser l’économie autrement (Cf. James K. GALBRAITH, « Mais qui sont donc ces économistes ? Retour sur ceux qui avaient donné l’alerte sans être entendus », disponible sur le site « La vie des idées.fr »). On comprend bien la manœuvre : si tous se trompent ou presque, la faute est moins grave car partagée. C’est « l’argument moutonnier », utilisé pour expliquer les bulles ﬁnancières, étendu à la production des biens de théorie économique.

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