Droit des affaires - Insolvabilité des États et dettes souveraines -1 - 209

Le marché de la dette souveraine

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jeunes femmes parmi un échantillon, le gagnant du concours ne doit pas se ﬁer à ses goûts personnels. Il doit essayer d’anticiper sur le choix des autres. Ainsi tout actif ﬁnancier a la nature d’une bulle spéculative. Sa valeur dépend plus de représentations et d’anticipations que de « fondements réels ». Le « dénouement » de l’opération ﬁnancière démontre cette absence de relation au réel. Commencée dans la sphère monétaire, l’opération se dénoue en argent. À la différence des marchés de matières premières, également spéculatifs, mais qui, à terme, se terminent dans le monde réel. Il faudra bien livrer le sucre ou en prendre livraison. Pour les dettes souveraines, les analystes doivent évaluer non seulement des capacités de l’émetteur à respecter ses engagements ﬁnanciers. Mais encore la volonté du Souverain à les respecter. Par hypothèse, une volonté souveraine est une volonté imprévisible. Cela conduit les agences à utiliser des analyses qualitatives. Elles prennent en considération des ratios économiques et ﬁnanciers. Mais aussi les caractéristiques politiques et institutionnelles des États. Voire même des préjugés. Dans la pratique, et l’expression PIGS est particulièrement révélatrice, cette appréciation révèle des préjugés voire un racisme latent. Paul Krugman 71 décrit bien la situation intenable, dans laquelle les États se trouvent en cas de crise, sur laquelle les agences doivent porter un jugement. Chacun sait que la lutte contre la récession suppose une politique monétaire expansive, une baisse des taux d’intérêt et la croissance des dépenses publiques. Pourtant, et les exemples de la Grèce ou de la Grande-Bretagne aujourd’hui, le montrent bien, c’est tout le contraire que les États pratiquent. Alors que le déﬁcit est, pour une très large partie, une conséquence de la crise, les États se disent contraints de mettre en œuvre des politiques aux conséquences déplorables, voire désastreuses, pour les populations. L’auteur observe que « la politique économique internationale ﬁnit par avoir bien peu en commun avec l’économie. C’est devenu un exercice de psychologie amateur. Le besoin ressenti de jouer le jeu pour rétablir la conﬁance supplante toutes les autres considérations de la politique économique. Cela paraît assez fou, mais c’est ainsi ». Les agences de notation portent directement le poids de ces contradictions. Elles servent d’alibi au pouvoir politique qui s’est lui-même désarmé face aux injonctions du marché. De ce point de vue, Joseph Stiglitz 72 raconte une anecdote très instructive. Dans les années 1990, le directeur de la Commodity Futures Trading Commission, Brooksley Born, avait proposé d’introduire une réglementation des produits
71. Pourquoi les crises reviennent toujours ?, Seuil, Paris, 2e éd., 2009, p. 119. Cf., également, Ch. DE BOISSIEU, « À propos du rôle international de l’Euro », Reﬂets et Perspectives, XLIV, 2005/ 1, p. 73, qui écrit que « faire de la politique monétaire aujourd’hui, c’est moins surveiller la progression de tel ou tel agrégat … que pour la banque centrale, envoyer des messages et communiquer avec son environnement » (p. 78). Les agences de notation noteraient-elles une stratégie de communication ? 72. Le triomphe de la cupidité, Les liens qui libèrent, 2010, p. 250.

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