Droit des affaires - Insolvabilité des États et dettes souveraines -1 - 210

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Les remèdes

ﬁnanciers au moment de la faillite du fonds spéculatif LTCM. Le secrétaire du trésor de l’époque, Robert Rubin, et Allan Greenspan s’y sont opposés « avec acharnement ». Les professionnels des marchés ﬁnanciers « ont lancé leurs lobbyistes dans une bataille ardente et victorieuse pour faire inscrire dans une loi que les dérivés resteraient non réglementés » 73. Constatons donc que les régulateurs avaient une pleine conscience des dangers qui menaçaient le système ﬁnancier. La faillite de la ﬁnance mathématisée se trouvait sous leurs yeux avec LTCM qui comptait deux prix Nobel d’économie parmi les associés. Le lobbying, appuyé sur la religion du marché, l’a emporté sur l’observation des faits et l’intérêt général 74. La foi l’a emporté sur l’intelligence. Aussi l’argument du caractère imprévisible de la crise ne présente aucun fondement. Mais celui de la responsabilité des agences non plus. Car la crise démontre que l’hypothèse centrale du prix découvert par le marché, expression d’une valeur fondamentale ne fonctionne pas du tout. Aucune vérité ne résulte du marché. Les actifs valent n’importe quoi, beaucoup trop, beaucoup trop peu, voire rien du tout 75. Dans cette dernière hypothèse tout s’arrête. On ne peut même pas parler d’inefﬁcience du marché. Il n’y a plus de marché du tout.
73. Le Commodity Futures Modernization Act de 2000, id. 74. Le lobbying de la ﬁnance est d’une puissance redoutable. Le phénomène est particulièrement frappant aux États-Unis. Le secrétaire du Trésor, Henry M. Paulson qui décide de la faillite de la banque Lehman Brothers est un ancien dirigeant du rival de toujours, Goldman Sachs, grand proﬁteur de la crise. Pour une analyse de la capture de l’État américain par les lobbies, cf. James K. GALBRAITH, L’État prédateur, Seuil, Paris, 2009 ou Robert REICH, Supercapitalisme, Vuibert, Paris, 2008. En Europe, il convient de signaler une initiative inédite. Des députés européens de tous les bords ont lancé un appel, Finance Watch, destiné à alerter l’opinion sur les risques pour la démocratie de cette « pression exercée tous les jours par l’industrie ﬁnancière et bancaire pour inﬂuencer les lois qui la régissent ». Ils en appellent donc à la société civile pour produire une expertise indépendante. L’épisode en dit long sur le dénudement de la puissance publique en matière d’expertise. Cf. E. GROSSMAN, « Les groupes d’intérêt économique face à l’intégration économique : le cas du secteur bancaire », Revue française de science politique, 2003/5, vol. 53, p. 737 ; ALTER-EU, A captive Commission. The role of ﬁnancial industry in shapping EU regulation, étude disponible sur internet. Enﬁn, au plan national, les banques jouissent d’une impunité inouïe jusqu’au sommet de l’État, par exemple, auprès de Madame Christine Lagarde. Au cours de la séance du 11 octobre 2010 à l’Assemblée nationale consacrée à la loi de régulation bancaire et ﬁnancière, le député Nicolas Perruchot défendait un amendement demandant qu’un rapport soit établi pour étudier la possibilité de répercuter sur les banques européennes le coût de la crise ﬁnancière. Le rapporteur du projet afﬁrme que les banques, particulièrement françaises, ne sont responsables en rien de la crise. Mme Lagarde renchérit et afﬁrme que le prêt consenti aux banques « aurait rapporté aux contribuables français 2,4 milliards d’euros. Pour le contribuable, il s’agit plutôt d’un gain net ». Les juristes apprécieront le recours à la théorie de la causalité adéquate qui limite la responsabilité aux conséquences directes des faits dommageables. Socialement et politiquement, il serait beaucoup plus difﬁcile de démontrer au citoyen français que les banques sont les victimes de la crise ﬁnancière qui les frappe. Pour une évaluation de la crise sous une autre forme que celle d’un « gain net », cf. Rapport de la Commission des Communautés européennes, Tableau de bord des aides d’État, 1er décembre 2010, COM(2010) 701, selon lequel les aides d’État représenteraient 3,6 du PIB. 75. Sur la ﬁxation des prix sur les marchés ﬁnanciers, cf., par exemple, A. ORLÉAN, préc. ; F. LORDON, « Politique de la valeur ﬁnancière. Les stress tests bancaires entre indétermination et coups de force », Politix, vol. 23, n° 89/2010, p. 171 ; P. JORION, Le prix, Éditions du croquant, 2010.

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