Droit des affaires - Insolvabilité des États et dettes souveraines -1 - 242

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Les remèdes

des crises qui frappèrent la livre britannique et la lire italienne au début des années 1990. Ces crises, provoquées par des mouvements spéculatifs favorisés par la grande mobilité des capitaux et par des taux de change alors ﬁxes, mais ajustables, mirent en lumière le caractère illusoire du pouvoir des États sur le marché. L’impuissance étatique face à la contrainte du marché s’explique depuis lors par une conﬁguration issue du système monétaire international et de l’ordre juridique de l’Union. À la suite de l’effondrement du système de Bretton Woods, la convertibilité totale des monnaies s’est imposée en fait, puis en droit dans la plupart des pays. Combinée à la suppression des contrôles de change, elle a provoqué une privatisation des monnaies étatiques 16. Le Professeur Sorel a ainsi démontré comment les États ont contribué à l’apparition, puis au développement des marchés ﬁnanciers 17. Selon cet auteur, la bienveillance étatique à l’égard des marchés s’explique aisément. Les États ont besoin des liquidités que seuls les marchés peuvent leur procurer. Or, lorsqu’il se présente sur le marché, l’État renonce à ses privilèges. Émetteur souverain, il voit son pouvoir normatif neutralisé par les opérateurs de marché au moyen du contrat, « instrument juridique sur mesure » qui permet d’éviter la contrainte de l’ordre juridique national 18. La mondialisation ﬁnancière marque dès lors la victoire du marché sur la souveraineté. Les États entrent en concurrence sur les marchés de capitaux et ce qui, jadis, leur permettait de régir l’ordre économique national – la politique économique et monétaire – est devenu depuis un facteur de compétitivité dans le désordre économique international. Pour prêter aux États, les marchés apprécient leur situation macroéconomique comme ils le feraient des résultats d’une entreprise. Apparaît dès lors un paradoxe. Source d’instabilité pour les États, les marchés ﬁnanciers exigent de ces mêmes États une stabilité macroéconomique. Ils apprécient en effet l’économie d’un État à une aune composée de trois éléments, la stabilité des prix, la soutenabilité des ﬁnances publiques et la conduite des réformes structurelles ; ce triptyque de stabilité, qui conﬁne à la trinité, n’est pas l’expression d’une pensée unique prosélyte. Elle est une exigence de pur fait dont il appartient au juriste d’apprécier la traduction en droit. Quel rôle peut encore jouer le droit dans une économie de marché mondialisée ? Impuissante pour maîtriser le marché, la règle juridique se voit assigner une nouvelle fonction : contraindre l’État à produire la situation de fait économique exigée par le marché. Le miracle de l’État de droit économique se réalise : dans la conduite de la politique économique et monétaire, les États sont liés par des règles qu’ils ont eux-mêmes édictées pour neutraliser
16. V. D. CARREAU, La souveraineté monétaire de l’État à la ﬁn du XXe siècle : mythe ou réalité ?, op. cit., p. 492. 17. J.-M. SOREL, « Les États face aux marchés ﬁnanciers », op. cit., pp. 517-525. 18. Ibid., pp. 520-521.

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