Arts&MétiersMag - N°422 - Novembre 2020 - 59

CONFÃRENCES & DÃBATS CLIMAT

HERVÃ LE TREUT
Climatologue
spÃ©cialiste de la
simulation
numÃ©rique du climat,
HervÃ© Le Treut est
membre de
l'AcadÃ©mie des
sciences et mÃ©daillÃ©
de bronze du CNRS
(1990). Il a soutenu en
1985 une thÃ¨se de
doctorat sur la
modÃ©lisation des
nuages dans le
systÃ¨me climatique.
Directeur, de 2009 Ã 
2019, de l'Institut
Pierre-Simon-Laplace
(IPSL), une fÃ©dÃ©ration
de 9Â laboratoires de
recherche dans les
domaines des
gÃ©osciences, ses
compÃ©tences,
internationalement
reconnues lui ont valu
de faire partie du
Giec, le Groupe
d'experts
intergouvernemental
sur l'Ã©volution du
climat. Il a aussi
Ã©tudiÃ© l'influence
humaine dans l'effet
de serre. Ses travaux
ont donnÃ© lieu Ã  une
centaine de
publications, dont
Â«Les impacts du
changement
climatique en
AquitaineÂ» (Presses
universitaire de
Bordeaux,Â mars 2019).
ParallÃ¨lement Ã  ses
activitÃ©s de
recherche, HervÃ© Le
Treut est professeur
en mÃ©canique et
physique de
l'environnement Ã 
l'Ãcole polytechnique
et Ã  l'universitÃ©
Pierre-et-Marie-Curie.

LE CHAMP

DES POSSIBLES
Le climatologue HervÃ© Le Treut, directeur de l'Institut Pierre-Simon-Laplace (IPSL) de 2009 Ã 
2019, Ã©tait l'invitÃ© de la visioconfÃ©rence coorganisÃ©e par le groupe territorial Pau-BÃ©arn et le
groupe professionnel Environnement, le 6â¯juillet dernier. AnimÃ© par Christophe Tardieu (Ai.Â 185),
le dÃ©bat a portÃ© sur les scÃ©narios possibles du changement climatique. Morceaux choisis.

L

'Ã©volution climatique fait dÃ©jÃ  sentir son impact. On
n'Ã©chappera pas Ã  un rÃ©chauffement, dÃ©jÃ  inscrit par
les gaz anciennement Ã©mis et par notre incapacitÃ©
actuelle Ã  rÃ©duire rapidement les Ã©missions de gaz
Ã  effet de serre (GES). Il est donc temps d'Ã©valuer
les diverses options qui s'offrent Ã  nous pour s'y adapter.
Le systÃ¨me climatique est un systÃ¨me physique difficile Ã 
analyser car il a Ã©normÃ©ment de composantes hÃ©tÃ©rogÃ¨nes
et solidaires - atmosphÃ¨re, hydrosphÃ¨re, biosphÃ¨re...- qui
bougent sans cesse. Par exemple, les ocÃ©ans se meuvent Ã 
cause de l'atmosphÃ¨re par l'Ã©change de chaleur, d'eau douce
ou salÃ©e... et d'autres molÃ©cules.
Ã la fin de la pÃ©riode holocÃ¨ne, d'une durÃ©e de dix mille ans,
on observe un accroissement rapide, mÃªme en valeur relative,
des niveaux du CO2, de l'oxyde d'azote et du mÃ©thane. Le
niveau du CO2 est passÃ© de 280Â ppm (parties par million
dans l'atmosphÃ¨re) Ã  plus de 400Â ppm. L'augmentation est
nette depuis le milieu des annÃ©esÂ 50. On Ã©met annuellement,

hors cumul, 10Â fois plus de CO2 dans l'atmosphÃ¨re en 2018
que dans les annÃ©esÂ 60. Et on ne voit pas cette courbe
s'arrÃªter. Le confinement a aidÃ© Ã  amÃ©liorer la qualitÃ© de l'air
de maniÃ¨re transitoire, mais a eu peu d'effet sur les GES.
Ceux-ci restent longtemps dans l'atmosphÃ¨re, un demi-siÃ¨cle
pour le CO2, par exemple. Et on en a Ã©normÃ©ment stockÃ©
ces derniÃ¨res annÃ©es. Ce fait n'est malheureusement pas bien
compris. Autrefois, on espÃ©rait arrÃªter le rÃ©chauffementÂ ;
aujourd'hui, on parle de l'attÃ©nuer.

DES CONSÃQUENCES DIRECTES ET INDIRECTES
Jusque dans les annÃ©es 80, on avait encore quelques incertitudes mais, aujourd'hui, c'est prouvÃ©Â : on est vÃ©ritablement
face Ã  un rÃ©chauffement liÃ© aux GES, oÃ¹ la variabilitÃ© provoquÃ©e par l'homme est plus forte que la variabilitÃ© naturelle.
Les prÃ©visions d'aujourd'hui ont de bonnes chances de se
rÃ©aliser (celles d'hier Ã©taient dÃ©jÃ  correctes). Elles indiquent
toutes un rÃ©chauffement dÃ» aux GES qu'on ne sait pas

Les modÃ¨les numÃ©riques
prÃ©disent l'Ã©volution du climat
PHOTO CEAâ/âCNRS/âMEÌTEÌO FRANCE 2019 /âANIMEA STUDIO

PHOTO DR

CHANGEMENT CLIMATIQUE

Exemple de modÃ©lisation numÃ©rique. L'ocÃ©an et
l'atmosphÃ¨re y sont dÃ©coupÃ©s en cellules reprÃ©sentant des
lignes de calcul. Plus le maillage est fin et les lignes de
calcul nombreuses, plus les projections sont prÃ©cises.

Les travaux d'HervÃ© Le Treut portent sur la modÃ©lisation
numÃ©rique du systÃ¨me climatique et la comprÃ©hension des
perturbations radiatives du climat, en particulier celle du
rÃ´le de l'effet de serre additionnel liÃ© aux activitÃ©s
humaines.
Les modÃ¨lesÂ  de planÃ¨tes numÃ©riques servent Ã  observer ce
qui pourrait se passer sur la planÃ¨te rÃ©elle. Au dÃ©part, on
s'appuyait sur des modÃ¨les atmosphÃ©riques. On a ensuite
ajoutÃ© les ocÃ©ans, puis les processus nuageux, puis les GES,
etc. Les modÃ¨les se sont compliquÃ©s au fil du temps.
Aujourd'hui, un modÃ¨le compte un million de lignes de
calcul. Cela fonctionne beaucoup sur des principes
physiques. Ainsi, les rÃ©sultats simulÃ©s se rapprochent de
plus en plus de ceux rÃ©ellement observÃ©s sur la Terre.
Plus d'infos sur le site https://www.climat-en-questions.fr crÃ©Ã© par l'Institut
Pierre-Simon-Laplace (IPSL).

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