Arts&MétiersMag - N°422 - Novembre 2020 - 66

HISTOIRE & PATRIMOINE MÃMOIRE DE GADZARTS

Les funÃ©railles du Duc

Le 30Â mars 1827, Ã  Paris, le cercueil de FranÃ§ois de LaÂ Rochefoucauld-Liancourt tombe dans
la boue. La Fondation a rassemblÃ© des documents qui permettent de prÃ©senter les acteurs de
cet incident et de reconstituer le rÃ´le de chacun. DeuxiÃ¨me partie sur quatre, le trajet allant
du domicile du dÃ©funt Ã  l'Ã©glise et les obsÃ¨ques Ã  Notre-Dame-de-l'Assomption.

D

omicile du duc de LaÂ Rochefoucauld-Liancourt,
au 9,Â rue Royale-Saint-HonorÃ© (future rue
Royale), Ã  ParisÂ 8e. Ce vendredi 30Â mars 1827,
entre 9Â hÂ 30 et 10Â heures, l'entreprise de pompes
funÃ¨bres se met en place, pendant que la famille,
conduite par le duc de Doudeauville, accueille les invitÃ©s(1).
De nombreux amis arrivent. Parmi eux, quelques pairs de
France : les ducs de Choiseul, de Broglie, le marquis de
Semonville, grand rÃ©fÃ©rendaire, les dÃ©putÃ©s libÃ©raux de Paris,
Casimir PÃ©rier et Benjamin Constant, les ducs de Brissac, de
LÃ©vis, de Richelieu.
Les porteurs des pompes funÃ¨bres dÃ©posent le cercueil sur
le corbillard. Â«Je n'oublierai de ma vie, dira le duc de Broglie,
l'Ã©trange contraste entre les armoiries du dÃ©funt et la draperie
funÃ¨bre dont le cercueil Ã©tait enveloppÃ©. On y voyait en
broderie, rendue saillante par l'Ã©clat des couleurs, l'image
de la fÃ©e MÃ©lusine tenant un petit miroir oÃ¹ elle se regardait
en souriant et, au-dessous, la devise de la famille, " C'est mon
plaisir " .Â» Comme prÃ©vu, les ducs de Doudeauville, d'UzÃ¨s,
le marquis Desolles ainsi que FranÃ§ois Raynouard tiennent
les quatre coins de la draperie(1).

PHOTO COLLECTION PARTICULIÃRE

LE PORT Ã BRAS DU CERCUEIL

Le comte Alexandre de La Rochefoucauld. Le deuxiÃ¨me fils du Duc, interrogÃ© par le
commissaire de police ThÃ©odore de Mazug, a confirmÃ© que sa famille Ã©tait Ã©trangÃ¨re Ã 
l'initiative des Ã©lÃ¨ves de ChÃ¢lons de rendre hommage au Duc en portant son cercueil Ã  bout
de bras, ce qui, Ã  l'Ã©poque, contrevenait aux rÃ¨glements relatifs au transport des corps.

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NÂ°422 / Novembre 2020

Une trentaine d'anciens Ã©lÃ¨ves de ChÃ¢lons et d'Angers
s'amassent Ã©galement, ainsi que huit Ã©lÃ¨ves venus de ChÃ¢lons.
Ceux-ci veulent Â«rendre leurs derniers devoirs Ã  l'homme
vertueux qu'une longue suite de bienfaits leur avait donnÃ©
le droit de regarder moins comme un protecteur que comme
un pÃ¨reÂ». Ils obtiennent sans difficultÃ© du duc de
Doudeauville l'autorisation de Â«porter Ã  brasÂ» le cercueil.
Avec un peu d'avance, la famille proche rejoint le convoi et
dÃ©couvre avec surprise que le cercueil est portÃ© -Â une
pratique qui avait Ã©tÃ© proscrite sous l'Empire en raison des
chutes de cercueil. L'un des trois fils, GaÃ«tan, s'Ã©critÂ :
Â«Commentâ? Le cercueil est portÃ©â? Est-ce volontaireâ?Â» Son
frÃ¨re Alexandre lui aurait rÃ©ponduÂ : Â«Apparemmentâ!
Laissons-les faire.Â» Et le convoi dÃ©marre ainsi. Plus tard, les
journaux publieront une dÃ©claration du duc de Doudeauville,
qui atteste Â«du bon ordre et de la dÃ©cence qui ont rÃ©gnÃ©
parmi les jeunes Ã©lÃ¨ves qui ont transportÃ© le cercueil depuis
la demeure jusqu'Ã  l'Ã©glise de l'AssomptionÂ»(2). Le commissaire de police du quartier des Tuileries, ThÃ©odore de Mazug,
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