Arts&MétiersMag - N°429 - Septembre 2021 - 35

DOSSIER GLOBAL INDUSTRIE
Le CGR et ses salariés,
montés sur ressorts
L'usine du futur ne se résume pas à une automatisation extrême. Au contraire, puisque les
composantes humaines y sont essentielles. Dans son usine de Saint-Yorre, où travaillent une
centaine de personnes, le Comptoir général du ressort a révolutionné l'organisation humaine.
Ainsi, chaque équipe est responsable de la gestion globale d'une famille de produits.
J
oseph Varoqui (Ai. 167) (1)
, président du
groupe Comptoir général du ressort (CGR),
organise ses entreprises en entités les plus
autonomes possible. L'idée est de générer «agilité»
et motivation. Les strates sont limitées (pas plus
de deux niveaux hiérarchiques entre l'opérateur
et le PDG) et l'approche ascendante du management
est favorisée. Elle privilégie la remontée des
idées des salariés vers la direction («bottom-up»)
plutôt que les ordres des chefs aux salariés
(«top-down»). Directeur jusqu'en 2017 de l'usine
de Saint-Yorre, dans l'Allier, Marc Chauvet
(Bo. 171) est passionné par la gestion des êtres
humains. Il s'était emparé du concept et l'avait
déployé avec le concours actif des salariés. En
misant sur le capital humain, le site de SaintYorre
a pu pousser cette méthode et atteindre un
niveau de performance que l'automatisation seule
n'aurait pas permis.
FAIRE CONFIANCE À L'INTELLIGENCE
Au cours des années 90, les démarches 5S (2)
et «lean» avaient été déployées au CGR.
Smed (3)
«Les performances de l'entreprise en étaient nettement
améliorées, témoigne Marc Chauvet, mais
rares étaient les salariés épanouis. Des experts
leur expliquaient pourquoi ils s'y prenaient mal
et comment ils devaient faire.» Par conséquent,
les salariés étaient peu impliqués : 20 % activement
désengagés, 65 % désengagés et seulement
15 % activement engagés (selon l'entreprise de
sondage Gallup).
En 2015, Marc Chauvet découvrait le concept
d'entreprise libérée : offrir de l'autonomie aux
salariés dans le cadre de valeurs et d'ambitions
partagées. Un an plus tard, Alexis Martel (Li. 193),
directeur général du groupe, organisait un séminaire sur ce
(1) Lire aussi AMMag de février 2021, p. 17.
(2) Les 5S ou 5 principes à respecter pour améliorer son environnement de travail
selon la méthode Kaizen : «seiri» (débarrasser), «seiton» (ranger), «seiso»
(nettoyer), «seiketsu» (maintenir l'ordre), «shitsuke» (être rigoureux).
(3)
La méthode Smed pour «single-minute exchange of die», en français
«changement rapide d'outil», a été mise au point par Shigeo Shingo pour Toyota.
La performance de
l'unité de production
s'appuie sur les
savoir-faire de
chacun et des choix
collectifs. Ci-dessus,
un opérateur vérifie
le filetage d'un axe de
moteur de machine
fabriquant des bras
d'essuie-glace.
,
JOSEPH VAROQUI
(Ai. 167), président du
groupe CGR.
PATRICE COUMONT,
actuel directeur de
l'usine de Saint-Yorre.
MARC CHAUVET
(Bo. 171), exdirecteur
de l'usine
de Saint-Yorre.
WILFRIED MARIDET,
leader de l'unité
ressorts spiralés.
thème avec deux intervenants externes. Les
représentants des vingt usines du groupe y assistaient.
Le management de CGR s'en est inspiré pour développer
son concept d'entreprise «intelligente» : une entreprise
dans laquelle tous les participants à une activité ont accès à
toute l'information (commerciale, technique, comptable, stratégique,
etc.) et décident ensemble des actions à mener. «Le
CGR, résume Marc Chauvet, a fait confiance à l'intelligence et
aux capacités des salariés pour mettre en œuvre les actions
BENOÎT GAUDRON
(Bo. 200),
responsable des
ressorts spiralés et
bras d'essuie-glace.
Arts&MétiersMAG
N°429 / Septembre 2021
35
PHOTO CGR
PHOTOS D. KHAMÈS / AMM

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