Arts&MétiersMag - N°429 - Septembre 2021 - 53

AMMag - Vous avez interviewé des dirigeants de groupes
internationaux. Avez-vous recueilli des commentaires
marquants, par exemple sur les Gadzarts ?
C. D. - Ces entretiens ont confirmé notre enquête. Quelques
citations sont révélatrices de leur état d'esprit. Ainsi, évoquant
le rôle du manageur, un grand dirigeant de travaux
publics estime qu'il doit être «une boussole plutôt qu'une
horloge». Tel directeur de l'innovation en génie civil pense
qu'une «équipe multifacette couvre avantageusement l'ensemble
des compétences - mais que c'est parfois très inconfortable».
Ce PDG d'une grande entreprise de batteries
veut passer du «command and control» à une «vision and
" adhésion " ». Les dirigeants interviewés sont davantage à la
recherche de talents où qu'ils soient dans le monde que de
diplômés spécifiques. À propos des plus jeunes, récemment
embauchés, le dirigeant d'un grand groupe industriel international
rétorque : «Leur cerveau s'est construit avec le
monde d'aujourd'hui. C'est une richesse évidente. Mais ces
" digital natives " ont une grosse lacune : ils ne sont pas focalisés
sur les objectifs. Ils demandent du sens, par exemple
pour sauver la planète, mais ils ne sont pas énergiques quand
il s'agit de résoudre une difficulté.» Cela signifie que l'ingénieur
manageur 4.0 devra savoir mobiliser son énergie pour
conjuguer ses idéaux avec ses expertises techniques et les
transformer en solutions et résultats concrets.
AMMag - Quelles conclusions tirez-vous de vos travaux ?
V. F. - J'en citerai trois. La première est dans le titre. L'ingénieur
manageur dont nous avons besoin pour concevoir et
faire l'industrie 4.0 sont des femmes et des hommes qui
maîtrisent bien, et de manière équilibrée, la «high-tech» et
la «high touch». «High tech», car le socle scientifique est
indispensable pour assurer la crédibilité. «High touch», car
nous ne sommes pas des robots et, fort heureusement, nous
ne sommes pas près de le devenir ! Deuxième conclusion,
les grandes écoles d'ingénieurs françaises ont un rôle essentiel
à jouer pour permettre à leurs étudiants d'être plus vite
les bons manageurs dont l'industrie 4.0 a un besoin vital.
La formation initiale doit être enrichie de briques structurantes
telles que la connaissance de soi ou la communication
interpersonnelle - qui sert notamment pour présenter un
dossier, donner et recevoir du feedback, mais aussi pour
interagir avec ses pairs, son équipe, sa direction, ses sous-traitants.
Enfin, troisième conclusion, et c'est un enseignement
fort, remonté de manière unanime par les dirigeants et les
ingénieurs : aujourd'hui comme hier, le terrain et la pratique
sont la meilleure école de management.
Propos recueillis par Éric Roubert
(1)
Tous les rapports du Think Tank sont en accès libre sur le site
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Arts&MétiersMAG
N°429 / Septembre 2021
53
L'ingénieur
manageur de
l'industrie 4.0
devra savoir
maîtriser,
et de manière
équilibrée,
aussi bien
la dimension
purement
technique de
son métier,
«high-tech»,
que son volet
humain,
de savoir-être,
«high touch»
Valentine Ferréol
(Ai. 192)
PHOTO S. MEYER / ARTS ET MÉTIERS
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Arts&MétiersMag - N°429 - Septembre 2021

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