DISBOOK #3 - 2013 - (Page 193)
Ver sio n Fr anç aise - Disbook #3
THE DNA OF FRENCHSPEAKING AFRICAN
TELEVISION
L'A.D.N. DE LA TELEVISION AFRICAINE
FRANCOPHONE
Télés d'hier, d'aujourd'hui, de demain, particularismes
africains, ... Une conversation tous azimuts avec Tidiane
Dioh, qui se définit lui-même comme un «consommateur
de télévision absolu» et qui a consacré plus de quatre ans
de sa vie à écrire «L'histoire de la télévision en Afrique
noire francophone, des origines à nos jours».
Tidiane Dioh est un homme passionné et passionnant. Sa
passion? Les médias.
Les médias, il les a étudiés au cours de ses années
universitaires, il en a fait l'objet de ses recherches et de sa
thèse de Doctorat, il les enseigne à la faculté, et il dirige
actuellement un programme sur les médias francophones
à l'OIF (Organisation Internationale de la Francophonie).
Dioh a également une connaissance terrain, comme
journaliste dans la presse internationale pendant une dizaine
d'années (Jeune Afrique,TV5 Monde.) Et puis surtout,
Tidiane Dioh est un spectateur de toutes les télés d'Afrique
francophone et plus particulièrement de leurs actualités.
Regarder les journaux télévisés depuis Paris (où il réside)
en décalé ne le dérange d'ailleurs absolument pas, «Car
au-delà de ma curiosité personnelle, dit-il, je suis un
chercheur fondamental et c'est très intéressant de faire des
comparaisons entre les différents journaux de télé africains.»
Pour son ouvrage «L'histoire de la télévision en Afrique
noire francophone, des origines à nos jours» , Dioh
s'est entretenu avec une centaine d'acteurs-clé dans
dix-sept pays d'Afrique francophone, dont certains lui
ont confié des archives personnelles, des photos ou des
rapports de mission. Quatre ans de lecture, d'écoute, de
recoupements d'informations, pour aboutir à un livre riche
et unique en son genre: à la fois précis, technique, mais
qui se lit comme un roman.
«Pour réunir des données sur l'Afrique, dit Dioh, il faut
prendre son temps, rencontrer les personnes, les écouter.
Grâce à mes activités au sein de l'OIF, je passe une
grande partie de mon temps à voyager. Je connais donc
tous les médias africains, mais aussi tous les acteurs, les
patrons des journaux, des radios et des télévisions.»
Intrigues, acteurs, révolutions, renversements politiques,
jalousies, temps d'arrêts, accélérations, ... L'histoire des
débuts de la télévision en Afrique noire francophone est
un roman-feuilleton captivant, avec quelques moments
décisifs. «Deux dates retiennent l'attention, dit-il, le 2
octobre 1958 et le 1er juillet 1962. Entre l'indépendance
de la Guinée et celle du Burundi, s'est joué le sort,
nécessairement collectif de dix-sept nations qui accèdent
à la souveraineté internationale. Et l'histoire du petit
écran, est ici, plus que partout ailleurs, intimement
liée à la trajectoire économique, politique et sociale
de ces nations (Bénin, Burkina Faso -ex-Haute Volta-,
Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, Côte d'Ivoire,
Gabon, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, République
Démocratique du Congo -ex-Zaïre-, Rwanda, Sénégal,
Tchad, Togo).»
Pour Dioh, «L'histoire a pris naissance au Congo
Brazzaville, où le Président Fulbert Youlou, le premier,
dès avril 1962, introduit une demande d'assistance
technique auprès de la France. En octobre 1962, à
l'issue d'une séance de travail à Paris, il est convenu de
réaliser, à l'occasion de l'anniversaire de la proclamation
de l'indépendance de la République du Congo, trois
journées d'émissions expérimentales à Brazzaville, les 27,
28 et 29 novembre 1962. Lorsque la télévision du Congo
Brazzaville entre en service, elle est reçue à Kinshasa,
ce qui exaspère au plus haut point le colonel Mobutu
dont le pays n'a pas de télévision nationale. L'«affront»
sera réparé en novembre 1966 lorsque le signal de la
toute nouvelle télévision de Kinshasa, capté sur un
rayon de 30km, inondera Brazzaville. Dans la foulée des
premières diffusions au Congo Brazzaville, une station
est construite, puis le Gabon inaugure sa télévision le 9
mai 1963, suivie par la Haute Volta (actuel Burkina Faso)
qui inaugure Volta Vision le 5 août 1963 - soit 48h avant
celle de la Côte d'Ivoire !» Cela a-t-il créé des jalousies?
« Bien évidemment, dit Dioh, cela a eu le don d'irriter le
Président Félix Houphouët Boigny. D'ailleurs Paris est
au coeur de cette course et lorsque la population de
Lomé au Togo reçoit la télévision ghanéenne en langue
anglaise, Paris débloque une somme de près de 3,5
milliards de francs CFA pour faire accélérer l'installation
de la télévision togolaise.»
Les toutes premières télévisions publiques d'Afrique
francophone ont donc surgi au lendemain des
indépendances, dans un contexte de régime de parti
unique. C'est le modèle français de l'ORTF qui a été
reproduit avec une centralisation administrative, une
dépendance très forte au pouvoir politique et une
concentration de tous les aspects de la télé depuis
l'archivage, en passant par la production et la diffusion
(radio et télé comprises). Il y eut ensuite, après
l'instauration du multipartisme des années 90 sur fond
de crise de régime, les télévisions internationales par
satellite dont les plus connues sont CNN, à la fin des
années 90, mais aussi Canal Plus Horizons -qui démarra
en Afrique francophone par le Sénégal le 21 décembre
encore dans le rythme qu'il faudrait, il leur recommande
de porter une grande attention à la formation du
personnel et, surtout, de ne pas reconduire les erreurs
du passé en achetant n'importe quelle technologie ou en
multipliant les choix technologiques. Pour les actualités, il
déplore le fait que «La plupart des pays n'ont pas changé
la présentation des actualités depuis quarante ans,
avec toujours la primeur accordée à l'actualité du chef
d'Etat, et beaucoup de temps consacrées aux actualités
institutionnelles (telles que des signatures de contrats de
coopération).» Or, pour Dioh «Dès que les téléspectateurs
auront le loisir de zapper, ils le feront. Quand vous
surexposez l'image d'une autorité, elle finit par s'user.
C'est une loi universelle.»
Dioh va conclure cet entretien sur un mode plus affectif
que technique, plus optimiste que critique. «Si pendant
des années j'ai été très sévère à l'égard des télévisions
d'Afrique noire francophone, aujourd'hui je relativise
beaucoup. Vous savez, en Afrique, rien ne se fait comme
ailleurs. Quand on analyse l'histoire des médias en
Afrique, on comprend que c'est une histoire inventée. La
télévision en Afrique s'est faite autrement et par d'autres
personnes que partout ailleurs. Regardez combien de
temps peut durer une émission: parfois deux heures,
trois heures. On a l'impression que le temps y est
dilaté. Et ceci ne gêne personne. Je me souviens d'une
amie présentatrice du journal télévisé, qui me racontait
qu'elle sortait de celui-ci épuisée et vidée, car il durait
parfois plus d'une heure et demie et se faisait dans des
conditions souvent difficiles. Aujourd'hui, je finis par
me dire qu'il n'y a pas qu'une seule manière de faire de
la télévision. Il faut accepter cette inventivité africaine
et cette manière de raconter le monde avec des points
de vue, une durée et un rythme propres. Pourquoi un
talk-show ne durerait-il pas trois heures si les gens
sont scotchés devant leur télévision? Pour moi, c'est
uniquement en ce sens que la révolution technologique et
le passage au digital a un sens. Longtemps l'histoire de
l'Afrique a été racontée depuis l'extérieur. La chance de
l'Afrique aujourd'hui, c'est qu'elle va pouvoir raconter son
histoire avec ses mots.»
«L'histoire de la télévision en Afrique noire francophone,
des origines à nos jours» (éditions Khartala, 2009 - http://
www.karthala.com)
1991. L'année suivante, TV5, la télévision internationale
francophone commence à diffuser sur le continent. Au
cours des années 2000 on a ensuite vu les télévisions
privées nationales et les organes de régulation se
généraliser sur ce vaste ensemble géographique de près
de 10 133 545 km².
Selon Dioh, il y a deux choses qui ne trompent jamais
au sujet d'un Etat: sa télévision et son aéroport. «Un
aéroport, la manière dont il est organisé, cela donne
beaucoup de renseignements sur le pays. Mais la
télévision, plus encore. A travers la télévision, on
comprend le régime politique -par exemple sur la façon
dont les minorités et la diversité culturelle sont prises en
compte-. L'histoire de la télé d'un pays, c'est plus que son
histoire politique et sociale, c'est sa carte d'identité, ou
plutôt: son ADN.»
Si Dioh avait des conseils à donner aux télévisions
d'Afrique noire francophone, ils concerneraient le
passage au numérique d'une part et les actualités.
Concernant le passage au numérique en 2015, à propos
duquel Dioh pense que la plupart des pays ne sont pas
SENSE MEMORY
L'HISTOIRE D'AyA
Rencontre avec Marguerite Abouet, l'Ivoirienne qui monte.
Le cas Aya démarre lorsque Marguerite Abouet, une
assistante juridique d'origine ivoirienne qui travaille
dans un cabinet d'avocats à Paris, présente à Clément
Oubrerie, illustrateur pour la publicité et pour des livres
Jeunesse, un texte autour de sa petite enfance à Abidjan.
Oubrerie apprécie la tonalité et l'écriture originales de
Marguerite, lui suggère de développer le récit sous forme
de bande dessinée qu'il présente à Gallimard, l'une
des plus prestigieuses maison d'édition françaises qui,
justement, souhaitait lancer une collection de bande
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http://www.karthala.com
Table of Contents for the Digital Edition of DISBOOK #3 - 2013
Cover
Foreword
Contributors
Content
Vibes
Portraits
Trends & Business
First look with televisa
Meet the stars from South Africa
Special report
Magazine
French version/Version française
DISBOOK #3 - 2013
http://www.nxtbook.fr/newpress/BasicLead/Disbook_9_November_2016
http://www.nxtbook.fr/newpress/BasicLead/Disbook_7_Novembre_2015
http://www.nxtbook.fr/newpress/BasicLead/Disbook_6_Juin_2015
https://www.nxtbook.com/newpress/BasicLead/Disbook_5_November_2014
https://www.nxtbook.com/newpress/BasicLead/Disbook_4_March_2014
https://www.nxtbook.com/newpress/BasicLead/DISBOOK_2013-3
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