Dauphinews - Le magazine des Alumni - N°9 / Avril 2023 - 37

upcycling
Édith de Lamballerie (23), doctorante
à Dauphine. Sa thèse porte
justement sur la " valeur perçue des
matières textiles recyclées " .
Explications de notre experte : " Dans
le recyclage, il y a une transformation
de la matière, on revient à ce
qui la constitue : les fibres,
polymères ou monomères pour
produire à nouveau de la matière.
Dans le textile, où cet enjeu est clé,
le recyclage consiste à collecter des
vêtements pour en récupérer les
fibres, afin de recréer de la matière
textile, filer à nouveau les fibres,
puis les tisser ou les tricoter. À
l'inverse, dans l'upcycling, il est
question de récupérer des matières
sans opérer de transformation et en
découpant les vêtements, les
assemblant pour recréer ainsi des
vêtements. "
Édith ajoute que le " up " évoque
également une créativité, une
ingéniosité à composer avec
l'existant, pour proposer une pièce
unique et souvent imaginative.
Il y a en effet dans l'upcycling une
dimension plus artisanale que dans
le recyclage, plus industriel.
" MOINS, C'EST MIEUX "
Comme Patricia, de plus en plus de
jeunes diplômés et de professionnels
en reconversion commencent à
s'y intéresser, avec l'envie de
participer à une consommation plus
responsable et moins énergivore,
tout en valorisant cette création
made in France.
Parmi les (nombreux) projets tenus
par des Dauphinois figure celui
d'Alice Sadrin (95), fondatrice du
site Myownkreation. Après une
première vie dans les affaires et
l'univers bancaire et financier, elle se
reconvertit dans la couture.
Intimement convaincue que " moins,
Dauphinews
c'est mieux " , Alice se base justement
sur les principes de l'upcycling.
" Quand on réalise des coupes dans
un atelier de couture, on a toujours
des chutes. L'idée ici est de les
utiliser et de les valoriser " , lance-telle.
Exemples simples mais
efficaces : ses petits cotons lavables,
réalisés grâce aux chutes de tissus.
Pompons, pochettes, ou même
rembourrage de sacs, tout peut
servir. Et ainsi, rien n'est jeté.
/
DANS L'UPCYCLING, IL EST
QUESTION DE RÉCUPÉRER
DES MATIÈRES SANS OPÉRER
DE TRANSFORMATION ET EN
DÉCOUPANT LES VÊTEMENTS,
LES ASSEMBLANT POUR
RECRÉER AINSI
DES VÊTEMENTS.
QUESTION DE COÛT
Problème : qui dit artisanat et made
in France dit coût, et cela dans une
ère où des noms comme Shein ou
Primark nous proposent sans cesse
des vêtements et des accessoires à
des prix dérisoires. Alors, collectivement,
les consommateurs se sont
habitués aux petits prix du textile et
il leur est difficile d'opérer un
demi-tour, en particulier dans ce
contexte d'inflation. Pourtant, un
sondage Ifop de 2021 annonçait que
59 % des Français étaient prêts à
payer plus cher pour s'offrir du
made in France. " Dans l'absolu, les
gens sont attirés par l'idée d'éviter le
gâchis. Mais ils sont souvent
refroidis par les prix, ils pensent au
départ que parce que les matières
sont upcyclées, le vêtement coûtera
moins cher. Ils oublient que la
majorité du tarif vient de la maind'œuvre,
surtout avec une confection
en France. Et ils ne sont pas
vraiment prêts à mettre le prix, une
fois face à l'étiquette " , regrette Alice
Sadrin.
Vu les manipulations nécessaires
pour transformer des tissus en
vêtements upcyclés, souvent à la
main, il est inimaginable que les prix
de tels produits puissent s'aligner
avec ceux de la fast fashion,
souligne Édith de Lambellerie :
" Forcément, les vêtements proposés
par de petites marques émergentes
sur ce segment seront plus coûteux.
On parle de produits confectionnés
en France, en plusieurs étapes : il
faut découper, enlever les points
durs, réassembler... Souvent, cela
prend même plus de temps que de
confectionner un habit à partir
d'une matière vierge. "
DES VÊTEMENTS
DE MEILLEURE QUALITÉ
Alors, l'upcycling peut-il prendre de
l'ampleur ? Selon l'Ademe, 100
milliards de vêtements sont vendus
chaque année dans le monde. " Leur
production a tout bonnement
doublé entre 2000 et 2014. En
moyenne, une personne achète
40 % de vêtements en plus qu'il y a
15 ans et les conserve moitié moins
Patricia Lavocat
(92)
fondatrice de
Rue Rangoli
Édith de
Lambellerie (23)
doctorante à
Dauphine - PSL

37
https://www.rue-rangoli.com/
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