ESCP ALUMNI magazine - #194 - Été 2021 - 126

Pourquoi j'aime ? ❙
Par Adrien Candau
L'aventurier du Velay perdu
A Chaque édition d'ESCP Alumni magazine, un Alumni nous dévoile une passion peu commune.
Pour la première édition de cette rubrique, Bruno Mestre (19) nous fait découvrir l'archéologie.
Le jeune homme passe une bonne partie de son temps libre à quadriller la Haute-Loire,
à la recherche de vestiges. Plus gratifiant que passer son samedi à zoner sur Netflix, même si,
à l'entendre, son hobby favori n'a pas grand chose à voir avec une escapade d'Indiana Jones
dans un temple maudit.
Vous n'avez jamais pensé à en faire
votre métier plus tard ?
Pas vraiment. J'ai toujours vu l'archéologie
comme une passion, un espace de liberté.
Quand vous êtes archéologue, vous êtes
contraint par certaines normes, tout est
très régulé et contrôlé. Moi, je peux dire et
faire un peu ce que je veux. Je le conçois un
peu comme une grande respiration en fait.
Certaines personnes jouent au foot, d'autres
vont marcher. Moi, c'est l'archéologie.
Bruno MESTRE (19)
Bruno, vous avez découvert en
janvier dernier les vestiges d'un
théâtre gallo‑romain à SaintPaulien
(Haute‑Loire). Vous êtes
sorti de l'ESCP diplômé d'un
Master spécialisé en ingénierie
financière et juridique. Comment
vous en êtes‑vous retrouvé à
exhumer des théâtres antiques ?
En fait, après mon diplôme à ESCP, j'ai pris
une année sabbatique pour approfondir
ma passion, qui est
l'archéologie et
l'histoire. C'est un truc que m'a transmis
mon père, qui est un ancien archéologue
de la direction régionale des affaires
culturelles. Depuis tout petit, je parcours
avec lui ma région, qui est le Velay -
géographiquement c'est entre la Vallée du
Rhône et l'Auvergne - et chaque weekend
on allait explorer des sites, essayer d'en
découvrir de nouveaux...
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Comment vous êtes ‑ vous
construit une culture historique et
archéologique ?
Beaucoup de lectures, évidemment, mais
pour bien s'auto-former, il faut aussi
énormément aller sur le terrain, tous
les week-end. Ça permet de rencontrer
d'autres passionnés d'archéologie
pour échanger des connaissances, des
impressions, se constituer une base de
données, un réseau aussi. C'est comme ça
qu'on apprend à voir progressivement un
site archéologique, à repérer des poteries,
des restes de structures que personne ne
voit. Quand on sait décerner ce qu'est un
site archéologique, on a tout de suite une
sensibilité pour en découvrir d'autres.
Qu'est ce qu'il vous plait tant dans
cette démarche‑là?
L'archéologie est voisine, mais aussi très
différente de l'histoire, qui est une matière
d'archive. Elle demande un gros travail de
terrain : concrètement, ça revient à explorer
beaucoup, pour peu de résultats. C'est une
ESCP Alumni Magazine numéro 194 ❙ ÉTÉ 2021
discipline qui permet une approche très
intuitive et ça me parle particulièrement:
suivre une piste à partir d'archives, parler
à des tas de gens qui vont vous donner des
indications sur des vestiges qu'ils pensent
avoir vu, aller se balader pour sentir où il
pourrait y avoir un site...Tout cela aboutit
à une démarche assez imprévisible, qui n'a
rien de mécanique finalement. Souvent,
l'archéologie se résume à partir à la
recherche d'une chose, pour en trouver une
autre complètement différente. C'est même
là qu'on a tendance à faire les plus belles
découvertes.
Ce théâtre gallo‑romain que vous
avez découvert à Saint‑Paulien,
vous l'avez trouvé comment alors?
C'est de l'intuition, un peu de chance
aussi. Saint-Paulien, c'est l'ancienne
capitale de la civitas romaine - à savoir
une unité administrative, l'équivalent d'un
département si vous voulez- qui s'appelait
Ruessium. Le truc, c'est que la ville n'a
jamais été vraiment fouillée. Avec mon
père, on s'est intéressé à Ruessium: on a
regardé des cartes d'état-major, des photos
aériennes, et on a repéré une forme étrange,
qui ressemblait vraiment à un théâtre. On
s'est concerté, plongé dans des études de
textes un peu anciens et ça n'a fait que
confirmer notre premier ressenti. Ensuite,
on s'est fait aider par des universitaires,
qui avaient une expérience plus poussée
des bâtiments publics dans l'empire romain
et ont reconnu l'existence de l'édifice
en question.
L'archéologie

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