REFLETS MAGAZINE - Revue d'information et de réflexion économique - n°100 - 14

ACTU
LES MARDIS

Chaîne cryptée
et salles obscures
Bertrand Méheut, président du groupe Canal+,
est un caméléon et n'a pas la langue dans sa poche. Paroles éclairantes
d’un grand patron du petit écran.

l est patient, il sait s’adapter, il attend que
ses concurrents fassent un faux pas
pour les prendre en défaut. Le groupe
TPS s’était enorgueilli de concurrencer la
chaîne cryptée, celui-ci n’est maintenant
plus qu’un lointain souvenir dans le parc
audiovisuel français. Tableau de chasse à
l’appui, le président se défend d’être inquiet
de la présence sur le marché de BeIN Sport
et d’Al Jazeera : des concurrents qui ne sont
pas rentables feront long feu.

« Les chaînes du groupe Al
Jazeera vont perdre 300 millions cette année »
Nombreux sont ceux pourtant qui s’inquiètent de ces géants qataris. Bertrand
Méheut dissipe ces préoccupations en rappelant que les réserves de croissance de
Canal sont aujourd’hui en Afrique francophone, en Pologne ou au Vietnam. Excès
d’orgueil ? Il n’est certes pas inquiet mais
reste raisonnablement vigilant. Il parie sur la
complémentarité des chaînes gratuites et
payantes du groupe Canal+ pour affirmer sa
présence sur la TNT. D8, D17 et autre iTélé
sont les fers de lance de la stratégie du
groupe sur un marché qui réclame de
l’agressivité et de la compétitivité – question
de survie.

« La France n’est qu’un élément
du dispositif Canal+ »
Trois quarts des films produits en France le
sont par le groupe Canal : on pourrait dire que
la bobine détraque, mais Bertrand Méheut
n’est pas de ceux qui se font des films. En
bon père de famille qui rassemble ses
enfants autour de la télévision, il explique la
logique de ses nouvelles offres et rappelle
que la France est le seul pays, en dehors des
États-Unis, à posséder une véritable industrie du cinéma. Celle-ci ne saurait faire vivre
l’exception culturelle française si des relais
puissants comme le distributeur Studio
Canal ou le diffuseur Canal+ n’existaient pas.
Entre 3 000 et 5 000 œuvres ont été produites grâce à Studio Canal : c’est le plus
grand catalogue indépendant d’Europe.

« Trop de choix tue le choix. Le
rôle d’un diffuseur de films, c’est
de proposer ce qu’il y a de meilleur »
Qu’en est-il de la concurrence avec les studios américains ? Serein, Bertrand Méheut
répond que la ligne éditoriale n’est pas du
tout la même, que la culture du blockbuster
n’est pas privilégiée par le groupe et qu’il faut
plus y chercher une complémentarité
qu’une concurrence. Sur les séries, en

La France est
le seul pays, en dehors
des États-Unis,
à posséder une
véritable industrie
du cinéma .

N° 100 - JUILLET/AOÛT 2013

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