Centraliens - N°628 - La revue des Arts et Manufactures - Août/Septembre 2013 - 20

Dossier

De l’influence des arts

sur les territoires

L’art comme
levier de
développement
des territoires,
le phénomène
est récent.
Il met en lumière
une évolution
du statut même
de l’art.
Exemples
et analyses.

Centre Georges Pompidou - Metz.

a place des arts et de la culture dans
nos sociétés contemporaines a évolué au cours des dernières décennies.
Le soutien traditionnel de la culture,
au sens beaux-arts ou encore culture « légitime », érigée en valeur suprême ou modèle,
que l’on souhaite rendre accessible au plus
grand nombre (politiques de démocratisation culturelle), se serait progressivement
transformé en soutien de la culture comme
source de création et de créativité susceptible d’irriguer l’ensemble des secteurs économiques et de contribuer au développement économique et social des territoires.
Le domaine des arts visuels, dont notamment l’art contemporain, participe de cette
évolution et devient un enjeu pour les territoires.
On évoquera tout d’abord « l’effet Guggenheim », devenu depuis la fin des années
1990, le symbole du renouveau d’une métropole déshéritée ; Bilbao, faisant oublier
son déclin industriel (chantiers navals) et
la montée du chômage, mais aussi l’image
négative renvoyée par le terrorisme dans la
région. La décision de créer ce musée, sur
un ancien site de construction navale, et en
faisant appel à un architecte de renommée

internationale, Frank Gehry, est immédiatement apparue comme le projet phare de
la revitalisation de la métropole de Bilbao.
Les espoirs n’ont pas été déçus, le musée
ayant accueilli, dès la première année trois
fois plus de visiteurs que le nombre attendu,
dont 30% venaient de l’étranger et 32% du
reste de l’Espagne, les dépenses liées à la
visite du musée ayant généré une valeur
ajoutée de plus de 150 millions de dollars,
ce qui représente le financement de plus de
3500 emplois.
À ces effets directement mesurables en
termes monétaires, s’ajoutent des retombées
en termes d’image et une valorisation des
habitants eux-mêmes.
Plus près de nous, on évoquera le cas du
Centre Pompidou-Metz, ouvert en 2010,
qui dès 2011 est devenu, en termes de fréquentation, la première institution muséale
hors Paris, 11% des visiteurs venant de pays
étrangers, et parmi les visiteurs nationaux,
35% venant d’autres régions. 47% des visiteurs sont venus spécialement à Metz pour
visiter le musée, et ont dépensé à cette occasion 142 euros en moyenne (le prix d’entrée
est de 7 euros), cette dépense moyenne étant
plus élevée pour un visiteur étranger.

Sylvie Pflieger
Maître de conférences
HDR en économie, Uni
versité Paris Descartes,
Faculté des Sciences
Humaines et SocialesSorbonne ; rattachée au
CERLIS (Centre de recherches sur les
liens sociaux).
Directrice adjointe du Master Economie
et gestion des produits culturels à
l’Université de Paris 1.
Domaine de recherches en économie de
la culture : politique culturelle, culture
et développement local, marché de l’art.

Centraliens no628 [août/septembre 201
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