Centraliens - N°632 - La revue des Arts et Manufactures - Mars/Avril 2014 - 23

santé : l'affaire de tous

l'avènement de la biologie moléculaire et
la découverte de l'ADN. Ces fins de cycles
sont redoutées et combattues par tous les
acteurs établis. L'histoire est parsemée de
changements de paradigmes technologiques
(le transistor vs. la lampe électronique, le
moteur électrique vs. le moteur à vapeur)
qui ont vu la disparition difficile au départ
puis soudaine des acteurs installés qui ne
pouvaient/voulaient pas changer/évoluer.

« consensus d'experts » ; mettant un coup
d'arrêt aux innovations de rupture. Car
une des conditions nécessaires, mais pas
suffisante, pour détecter une innovation
de rupture est le désaccord partiel ou total
entre experts représentatifs du domaine.

Malgré une volonté des acteurs
du secteur pour l'innovation
pourquoi sommes-nous
dans cette situation ?

Nous avons donc deux choix :

L'innovation n'est pas un phénomène singulier mais un ensemble de processus qui
n'obéissent pas aux mêmes règles :

1. L'innovation incrémentale, la plus

répandue car la plus facile à mettre en
œuvre, et pour laquelle le système d'évaluation par « consensus d'experts » du
secteur est parfaitement adapté.

2. L'innovation de rupture, plus rare,

beaucoup plus prestigieuse, est aussi la
notion la plus galvaudée par les acteurs.
Une particularité du secteur de la santé :
généralement, la dernière idée ou nouveau dogme à la mode d'un expert/
leader d'opinion est qualifiée systématiquement d'innovation de rupture qui
va « soigner le cancer ou la maladie
d'Alzheimer ! » pour tenter d'obtenir des
moyens nécessaires à son étude.

3. Et enfin, le changement de paradigme,
véritable tsunami culturel et conceptuel qui change en profondeur les bases
scientifiques, économiques ou intellectuelles d'un domaine avec des conséquences à hauts risques pour les acteurs
installés.

Le "serial killer" d'innovations
de rupture identifié
Dans un système ouvert, où les financeurs
de l'innovation veulent le meilleur rendement de leur investissement, on pourrait
s'attendre à ce qu'ils mettent en place les
processus d'évaluation les mieux adaptés
à la nature de l'innovation afin de ne pas
passer à côté d'une innovation majeure. Les
financeurs (France, Europe, Commission
Européenne) ont choisi, pour tous les types
d'innovations, le processus d'évaluation par
www.centraliens.net

Est-il encore temps de mettre
un terme au déclin programmé
de notre R&D ?
1. Le plus facile : Ne rien changer et croi-

ser les doigts ! Face à un mur de défis,
Il est toujours tentant de retarder les
décisions très difficiles en faisant des
ajustements d'effectifs ou en continuant
les investissements de recherche et en
espérant, des résultats. Des accords de
recherches externes avec des biotech n'y
changeront rien.

2. Le plus courageux : Forcer, organiser et

accompagner le changement de paradigme et redéfinir les étapes et les compétences clés nécessaires pour démultiplier la recherche biomédicale supportée
par une réalité biologique.

Manuel GEA,
52 ans, est co-fondateur et PDG de BioModeling Systems. Il
est le fondateur et coprésident de CentraleSanté; co-fondateur et
vice-président du Comité Biotech du
Leem, co-fondateur & membre bureau
exécutif de Medicen Paris-Région; V.P.
Adebiotech, co-leader groupe Prospective du Comité sciences de la vie et la
santé du MEDEF .
Manuel Gea a été PDG de Hemispherx
Biopharma Europe, créateur de la pratique Pharma de McKinsey en France,
directeur de division chez BoehringerIngelheim France, responsable business development chez Colgate-Palmolive Company USA.
Manuel Gea est diplômé de l'École Centrale Paris (83) et de l'Université Paris IX
Dauphine en sociologie.

Faire collaborer l'intelligence
humaine créatrice et la
puissance des technologies
de l'information au service
de la santé
Ce changement passe par une modification
de leadership de la recherche biomédicale et
suppose un retour de la biologie/physiologie pour la compréhension holistique et intégrée du vivant. Ce retour au pragmatisme
et à l'intelligence humaine des débuts doit
être soutenu par des outils technologiques
et des méthodes maitrisées et comprises par
des utilisateurs biologistes/physiologistes
intégrateurs généralistes en interaction avec
des experts spécialisés. Il est utile de décliner ce changement de paradigme au niveau
des profils des chercheurs, médecins et ingénieurs, ainsi que pour les formations et les
évolutions de carrières qui doivent donner
un leadership scientifique à ces futurs biologistes/physiologistes intégrateurs.
n
Manuel Gea (ECP 83)
Co-Président de Centrale Santé
manuel.gea@centraliens.net

http://www.centraliens.net

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