Centraliens - N°632 - La revue des Arts et Manufactures - Mars/Avril 2014 - 62

Histoire

LE MUSÉE
GUIMET
présente

du 16 octobre 2013
au 13 janvier 2014,
une exposition

organisée autour des travaux de
l'officier de marine, explorateur,
Louis Delaporte (1842-1925)
à Angkor.
C'est pour nous l'occasion d'évoquer
la vie et la carrière du Centralien
Félix Ratte, promotion 1870, membre
de la première mission Delaporte,
puis géologue en Nouvelle Calédonie
et en Australie.
au nord de l'île et y observe les formations
de serpentine. On connaît le trajet qu'il a
suivi lors d'une de ses explorations, par
un article intitulé « Sentiers canaques. De
Gomen à la côte Est », publié en novembre
18784. Ce récit, peu connu, est le premier
consacré à cette région montagneuse du
nord, très difficile d'accès5.
Félix Ratte collecte des échantillons de roches
qu'il envoie au Muséum d'Histoire naturelle
à Paris et publie à Nouméa6 un document
d'une quarantaine de pages comportant à
la fois des explications et un catalogue des
échantillons. Il diffuse sa brochure auprès de
Sociétés savantes. Il reste en Nouvelle-Calédonie et continue des prospections toujours
à ses frais, pendant toute l'année 1 879.

1 880/1881-1890
Premier minéralogiste du
Muséum d'histoire naturelle
de Sydney
Pendant son séjour en Nouvelle-Calédonie,
Félix Ratte profite de la liaison régulière par
bateau vers l'Australie pour se rendre à Sydney, avec peut-être l'intention de s'y installer quand il publie, en 1880, chez un éditeur
local, un catalogue des roches et minéraux
qu'il a recueillis en Nouvelle Calédonie,
entre 1 876 et 18797.
En juillet 1881, Félix Ratte qui a adressé son
catalogue au directeur de l'École des Mines
de Ballarat (Victoria) en Australie, est sollicité pour assurer des cours de chimie et
de métallurgie. Il s'agit d'un remplacement
qui, commencé le 15 août, ne dure que trois
mois mais cet intérim introduit Félix Ratte
auprès de scientifiques australiens.
Le Muséum d'histoire naturelle de Sydney,
l'Australian Museum, a été fondé en 1 827. Il

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a acquis en Allemagne une importante collection de fossiles qu'il faut classer, répertorier et préparer pour son exposition. Cette
tâche, confiée à Félix Ratte fin 1881, s'est
terminée au mois de mars 1882 ; elle marque
l'entrée de Félix Ratte au Muséum de Sydney
dont il sera le premier minéralogiste8.
Il enrichit les collections avec l'aide de
collectionneurs et par apport personnel
d'échantillons trouvés sur le terrain. Il publie des articles et quelques ouvrages, dont,
en 1885, le premier catalogue comportant
plus de deux cents pages de la collection de
minéraux du Muséum9. Sa bibliographie
comporte aussi des ouvrages de vulgarisation : un manuel pour les mineurs10 et des
conseils pour la collecte d'échantillons11.
Bien intégré dans la communauté scientifique, il participe activement aux travaux de
la Société Linnéenne de Galles du sud ou, par
exemple, intervient au congrès de la Société
pour l'avancement de la science (Australasian Association for the Advancement of
Science). Félix Ratte fait partie des personnalités qui accueillent à leur retour les membres
de l'expédition en Nouvelle-Guinée, organisée de septembre 1884 à février 1885 par la
Société de géographie d'Australasie12.
En 1885, il dépose avec W. A. Dixon, lecteur
de chimie au Sydney Technical College, un
brevet protégeant un procédé d'extraction
du cobalt du nickel et du manganèse des
minerais. Je n'ai pas pu établir si ce procédé,
protégé dans plusieurs pays et décrit dans la
littérature13, a été appliqué industriellement,
sous la forme décrite dans le brevet ou sous
une forme perfectionnée.
Concernant ses relations avec la communauté scientifique en France, je n'ai pas trouvé
de trace d'échanges avec le Muséum à Paris,
mais les liens avec la France ne semblent pas
rompus. La bibliothèque du Muséum possède certaines de ses publications en anglais,
et le Bulletin de la Société d'Encouragement
pour l'Industrie Nationale publie, en 1888,
un article sur les productions minérales de
l'Australie14, rédigé d'après un rapport de
Félix Ratte. Par contre, il semble que, à l'occasion de réorganisations des collections du
Muséum, son nom ait disparu des catalogues
de minéraux provenant de Nouvelle-Calédonie, la seule trace de cette collection étant le
catalogue imprimé qui accompagnait l'envoi
des échantillons.
Après avoir consacré dix années de sa vie à la
recherche sur les minéraux d'Australie, Félix

Ratte, dépressif et malade, (il s'était absenté
43 jours depuis le début de l'année15), peutêtre aussi en proie à des soucis financiers,
met fin à ses jours le 27 avril 1890. Marié en
1887, père de trois très jeunes enfants, son
souvenir a été entretenu dans sa famille. Son
fils né en 1889, prénommé Prospère comme
son arrière-grand-père paternel français, a
combattu en France en 1916. Sa petite fille
(Yvonne Emery) a, au début des années
1980, confié au Muséum de Sydney quelques
souvenirs personnels, dont une copie de son
diplôme d'ingénieur de l'École centrale et la
photographie illustrant cet article.
Il repose au cimetière historique de Gore
Hill, à Sydney.
n
Annie Lagarde-Fouquet
https://australianmuseum.net.au/History-of-theMinerals-Department Histoire du département

4. F. Ratte, Sentiers canaques. De Gomen à la côte Est,
Nouvelle-Calédonie. Moniteur de la Nouvelle-Calédonie. 13 novembre 1878, p.229 .
5. Margaret E McKEE. Exploration de l'intérieur de
la Nouvelle-Calédonie. In: Journal de la Société des
océanistes. N°36, Tome 28, 1972. pp. 199-229. doi :
10.3406/jso.1972.2380.
6. F. Ratte.Note Sur les roches et gisements metallifères de la Nouvelle Calédonie et catalogue explicatif
de la collection envoyée à Paris en 1878, J Bouillaud
éditeur, Nouméa, 1878, 39 pages.
7. F. Ratte, Nouvelle Calédonie. Catalogue de roches
minéraux et minerais recueillis en 1876-1879 par
F. Ratte J Sands, Sydney 1880, 9 pages.
8. R. D. Chalmers, History of the department of
Mineralogy-Australian Museum, part I 1827-1901,
Journal of Mineralogical Society of NSW, vol 1 1979,
page 19, et Minerals in the Australian Museum, part II
1901 to 1945, Records of the Australian Museum,
1992, p; 111.
9. F. Ratte, Descriptive catalogue (with notes) of
the general collection of minerals in the Australian
Museum, Sydney, Thomas Ridchards government
printer, 1885.
10. S. H. Cox et F. Ratte, Mines and minerals; a guide
for the Australian miner, Sydney, J. Woods & Co.,
Printers, 1885.
11. F. Ratte, Hints for collectors of geological and
mineralogical specimens, Sydney : C. Potter, government printer, 1887 et avec E. P; Ramsay, Notes for
collectors: containing Hints for the preservation of
specimens of natural history, Sydney, C. Potter, government printer, 1887.
12. Return of the New Guinea expedition, The Sydney Morning Herald, 4 février 1885, page 7.
13. Frémy, Edmond (dir.). - Encyclopédie chimique.
Tome V.- Applications de la chimie inorganique. 2e
section : industries chimiques. 2e partie : métallurgie.
Nickel et cobalt, par M. A. M. Villon, pages 102-103,
Paris, Dunod 1891.
14. F. Ratte, (d'après un rapport de), Mines. Sur les
productions minérales de l'Australie, Bulletin de la
Société d'encouragement pour l'industrie nationale,
4e série, tome III, octobre 1888, pages 591 à 612.
15. R D Chalmers, History of the department of
Mineralogy-Australian Museum, part I 1827-1901,
Journal of Mineralogical Society of NSW, vol 1 1979,
page 19.

Centraliens no632 [mars/avril 201
4]
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