ParaMag - N°361 - Juin 2017 - 42

JYRO, «LE DICTATEUR
TOUT-PUISSANT»

Interview de Julien Peelman, à propos de «Jyro»
Nous marquons ici une pause dans l'interview de Julien Peelman,
sorte d'équivalence avec la minute de silence que l'on respecte
au sein d'une communauté suite au décès de l'un
de ses membres. Paul Martyn, dit «Jyro», était le fondateur
de la marque Icarus NZ Aerosports et le concepteur des voiles
s'y rapportant. Il est décédé le 3 mars 2017 en Californie,
c'est-à-dire peu de temps après le Symposium du PIA qui s'est
déroulé en février dernier à Chattanooga (Tennessee, États-Unis,
voir article dans notre édition ParaMag n°358 de mars 2017).
Le milieu de la parachuterie et les fans de la marque ont rendu
un hommage international à celui qui se surnommait lui-même
«le dictateur tout-puissant». Mais le dictat de Jyro était
d'un genre très particulier, mélange de génie,
d'excès et de rigolade.
En 2009, Jyro t'a donc ouvert les portes
de NZ Aerosports. Que peux-tu dire à
son sujet qui pourrait être une sorte
d'hommage à publier ici ?
Sa carrière n'est pas facile à résumer...
C'était une personne influente dans la
parachuterie, de par sa marque Icarus
NZ Aerosports et qui a aussi marqué le
milieu de par sa personnalité
si particulière.
Il a conçu une vingtaine de produits
commercialisés sur le marché parachutiste, et pas seulement pour sa marque.
Il a signé le premier succès commercial
de voile de parachute à caissons croisés
tri-cellulaires, à une époque où les
grands constructeurs défrichaient encore
sur ce domaine. Il a donc joué un rôle
fondamental en termes d'innovation et de
développement des voiles de parachute,
même s'il n'a pas travaillé que sur ça.
Comment a-t-il débuté sur le plan
professionnel ?
Je n'étais pas né lorsqu'il a créé sa
première voile de parachute, au début
des années 80. Il s'est passionné pour ce
sport avant même de le pratiquer et il a
commencé à sauter très jeune, à l'âge de
15 ans. Bien qu'extrêmement intelligent,
il ne s'est jamais tourné vers les études.
Il s'est tourné rapidement vers la
machine à coudre, en commençant à
fabriquer des pochettes pour les carnets
de sauts. Puis il s'est mis à fabriquer des
combinaisons et il a créé sa marque :
JYRO, acronyme de «Jump your rig out».

Juin17:361
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42

NZ Aerosports

HOMMAGE

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FUCK YEAH !

C'est de là qu'est venu son surnom
«Jyro». Ensuite, il a commencé à
fabriquer des voiles principales sous la
marque «Icarus Extreme». Il produisait
des voiles hautes performances,
semi-elliptiques, fabriquées en tissu
porosité zéro, avec un bord d'attaque

semi-fermé et des caissons croisés
tri-cellulaires.
La première apparition de ces voiles
en France remonte à 1995, lors des
championnats du monde à Gap. C'était
avant-gardiste, car ce modèle mixait
certaines caractéristiques des marques
leaders : le tissu porosité zéro des Blue
Track * ou les nervures rappelant celles
de l'Excalibur **. Mais c'est surtout la
fabrication «sur mesure» qui démarquait Jyro de ses concurrents : en
1995, un des membres de l'équipe nationale néo-zélandaise sautait avec une
83 pieds-carrés, c'était très surprenant
à cette époque. Est-ce que les choses
ont changé depuis ?
C'était la politique commerciale de Jyro :
la satisfaction du client en faisant tout ce
qu'il demandait dans la mesure où c'était
techniquement réalisable, n'importe
quelle taille, n'importe quelle couleur.
La fabrication sur mesure était sa façon
de se différencier des autres grandes
marques, à une époque où lui n'était
qu'un petit fabricant.
C'était sans doute l'avantage d'une
fabrication artisanale au début, mais
durant ces 20 dernières années, Jyro
est resté fidèle à cette politique. De nos
jours, tous les modèles de la gamme sont
disponibles dans n'importe quelle taille,
au pied carré. Nous avons fabriqué récemment une JVX de 66,6 pieds carrés.
En revanche, nous avons instauré des
tailles limites, mini et maxi, mais avec
des fourchettes très larges.
Et le tarif reste unique et sans surcoût :
il ne dépend pas des couleurs, pas de la
taille et pas du lieu de livraison.
La Nouvelle-Zélande étant très excentrée,
le lieu de livraison n'entre pas dans le
prix, qui est le même pour tout le monde.

Peux-tu nous dire quelques mots sur la
carrière parachutiste de Jyro ?
Il totalisait environ 5000 sauts et il a été
longtemps compétiteur en vol relatif.
Il faisait partie de l'équipe nationale
de VR-4 qui a représenté la NouvelleZélande durant plusieurs championnats
du monde. Certains de ses équipiers
étaient aussi ses collègues chez NZ
Aerosports : Atilla Csizmadia (le directeur
général) et Richard Munro (le chef de
production). Il y a beaucoup de parachutistes au sein de l'entreprise, et certains
participent aux tests des voiles.
Jyro lui-même faisait de nombreux essais
en vol et, fait notoire : il n'a jamais libéré
de toute sa carrière parachutiste ! Jyro
a décidé d'arrêter de sauter il y a une
dizaine d'années environ.
...Et quelques mots sur la façon dont il
gérait NZ Aerosports ?
Il était très connu, et reconnu pour son
ouverture d'esprit, celle dont il a fait
preuve à mon arrivée dans l'entreprise.
C'était mon premier job et j'ai vraiment
beaucoup appris à ses côtés, que ce soit
sur la fabrication des parachutes,
mais aussi sur la vie en entreprise,
la gestion du travail, etc.
Je l'ai vu agir comme ça durant 8 années,
toujours s'intéresser à tout et écouter
tout le monde. Car il partait du principe
que chaque personne a quelque chose
d'intéressant à dire.
Je trouve cela admirable.
Et aussi sa façon de gérer son business :
pour lui, c'est l'entreprise qui doit
être au service de ses membres et non
pas
l'inverse.
ce quedecela
* Blue
Track fut leQuitte
premierà modèle
voile limite
le
développement
NZ Aerosports,
semi-elliptique
en tissude
porosité
0, commercialisé
Parachutes
de Francel'ambiance
en 1989.
ilparvoulait
y préserver
** Excalibur était un modèle hautes performances
et
l'environnement
de
travail.
de Performance Designs du début des années 90,
mais qui fut un échec commercial.
http://www.paramag.fr
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