ParaMag - N°377 - Octobre 2018 - 46

INTERVIEW

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ParaMag : Qu'est-ce qui te plaisait le
plus dans ton palmarès, qui était déjà
bien fourni avant cette double victoire
en août cette année ?
Déborah Ferrand : Ma première victoire
en compétition, qui est aussi un
record du monde F.A.I. avec six carreaux
consécutifs suivis de 2 cm, c'était durant
le Critérium interarmées ( N.D.L.R. :
Équivalent du championnat de France) à
Montauban, en octobre 2009.
Et aussi ma première victoire en
international, en 2011 aux championnats
d'Europe à Kikinda, en Serbie, où j'ai
battu mon propre record avec six
carreaux consécutifs suivis de 1 cm.
J'ai gardé ces records du monde F.A.I.
jusqu'en 2013, lorsqu'une Russe a réussi
7 carreaux consécutifs.
Ensuite je me suis approchée de la
médaille d'or. J'ai fait pas mal de
médailles d'argent en championnats
du monde, civil et militaire, en P.A.
et au combiné individuel. Mais je n'en
garde pas toujours un bon souvenir,
comme en 2014, où je me suis fait voler
le titre de championne du monde à Banja
Luka, en Bosnie. Ou encore en 2016,
à Chicago, où je suis passée à côté de
ma compétition. En 2017, je gagne la
médaille d'argent (encore...) au championnat d'Europe, en P.A. et au combiné
individuel. De temps en temps, je gagne
une médaille en voltige...
Peut-on revenir sur ce qui s'est passé
aux championnats du monde en 2014,
en Bosnie, et sur ce titre «volé «?
À l'issue de la première manche de P.A.
féminine, le capitaine de l'équipe du Danemark a déposé un protest car, selon lui,
les juges n'appliquaient pas un point du

Durant les sauts d'équipe, Déborah est en position
leader, au largage et première à se poser,
ici durant une compétition militaire.
Photo Samuel Herrenschmidt

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règlement concernant la pose de pied*.
(*N.D.L.R. : Les juges doivent vérifier que
le pied qui frappe la galette correspond
bien au premier point de contact du
corps avec la cible. Si tel n'est pas le cas
- pied opposé ou fesse en premier), la
performance n'est pas validée.)

aussi. Et c'est ainsi qu'elles se retrouvent
championnes du monde. Alors que, si
on réinclut les résultats de la manche 1,
nous les Françaises, serions reparties au
départage contre elles pour la deuxième
place. Nous étions donc certaines d'avoir
une place sur le podium et une médaille.

Ce protest concernait la méthode de
communication utilisée par les juges
entre eux pour valider - ou non - la pose
de pied. Mais c'est la même méthode
qu'ils utilisent depuis plus de dix ans !

Je ne remercierai jamais assez Patrice
Girardin et la FFP qui ont réalisé un travail
titanesque pour monter un dossier de
réclamation auprès de la F.A.I., afin de
faire invalider cette décision du jury. Mais
cela n'a pas abouti, la pilule était amère et
l'impact psychologique de cette mésaventure aux championnats du monde 2014 a
fait des dégâts les années suivantes.

Toutes les compétitrices avaient accepté
leur performance en signant la feuille
de match (y compris la compétitrice
danoise...), mais le jury a décidé d'arrêter
la compétition. Il a ensuite délibéré (au
bord de la cible...), puis décidé d'annuler
la première manche.
Pour les compétitrices qui avaient bien
réussi cette première manche, et parmi
lesquelles il y avait les Françaises, ce fut
un choc, car les compteurs ont été remis
à zéro pour tout le monde. Les résultats
et donc le podium de ces championnats
s'en sont trouvés modifiés.
En plus, nous n'avons pu faire que
cinq manches sur les dix prévues par
le règlement, et c'est court pour une
compétition de P.A. Après cinq manches,
je me retrouvais ex aequo avec la Slovène
Maja Sajovic. On est parties sur un saut
de départage, elle a fait carreau et j'ai fait
1 cm. J'ai perdu le départage, j'ai donc
perdu le titre et la médaille d'or, sachant
qu'à la manche 1, j'avais fait carreau et
elle avait marqué 2 cm...
En équipe, les Russes, qui avaient fait
une première manche catastrophique
à 23 cm, s'en sont trouvées avantagées

En tant qu'athlète de haut niveau, quand
tu ne ramènes pas les résultats attendus,
quelle que soit la raison, on te regarde
différemment. Deux ans plus tard, nous
n'étions que quatre filles à partir pour les
championnats du monde à Chicago.
Parle-nous de tes débuts en parachutisme, tes premiers sauts, c'était où
et quand ?
J'ai débuté le parachutisme sportif le
3 juin 2001 à Nîmes. J'avais 18 ans et
je m'engageais dans l'armée de l'air en
septembre. En attendant d'y rentrer, je
voulais savoir ce que ça faisait de se jeter
d'un avion, avant de sauter en tant que
militaire et de faire mes premiers sauts
T.A.P. (N.D.L.R. : Troupes aéroportées).
J'avais mis un peu d'argent de côté et
je me suis payé ma formation civile. J'ai
donc eu le temps d'avoir un avant-goût
du parachutisme sportif avant d'entrer
en école militaire. À Nîmes, le directeur
technique, qui était Dominique Bueno,
pratiquait la P.A. C'est lui qui m'a orienté
rapidement vers cette discipline, avant la
coupure de mes débuts dans l'armée.

Anti-intox :
La méthode «lalala»

L'intox, ça existe aussi en compétition de précision d'atterrissage.
Le compétiteur qui pousse un grand
cri victorieux en arrivant sur le
carreau, ses supporters qui crient de
joie autour de la cible , tout est bon
pour tenter de distraire et casser le
moral du leader qui est encore sous
voile lorsque les départs se font
dans l'ordre inverse du classement !
La génération des années 90,
Philipe Valois (Philou), les frères
Olivier et Ronan Henaff, utilisaient
et partageaient une technique assez
simple : «sous voile, tu te bouches
les oreilles et tu fais lalala...»
Cette méthode inspire encore la
génération de compétiteurs actuelle,
dont fait partie Déborah Ferrand.

28/09/2018 15:52
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