ParaMag - N°380 - Janvier 2019 - 48

TOURNAGE

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Photo ci-contre
L'assistant du cameraman Craig O'Brien fait un
dernier contrôle des branchements caméra avant
le saut.

donc pour finir l'histoire. Après avoir
consacré une autre semaine à travailler
sur ce deuxième plan séquence, l'équipe
allait se consacrer au troisième et dernier
plan séquence et en finir avec le tournage
parachutiste de Mission Impossible.

Agrippé aux jambes de Walker, et après
une série de «roulades», Ethan parvient à
remettre celui-ci sur le dos, mais toujours
inconscient. Ethan débarrasse Walker
de son tuyau d'alimentation en oxygène
devenu inutile. Ethan déconnecte le sien
pour le brancher sur le casque de Walker.
Puis il lui passe également sa bouteille
dont l'attache est magnétique (histoire de
faciliter la fixation...). Craig O'Brien est
maintenant en plan serré, montrant Tom
Cruise jouant parfaitement son rôle durant
ces secondes dramatiques où il tente de
réveiller Walker. Dessous, le sol qui grossit
très vite a été ajouté en post-production.
Pour Ethan et Walker, il reste quelques
centaines de mètres avant l'impact. Tom
Cruise réalise un superbe mouvement
qu'il a répété de nombreuses fois. Dans
un demi-looping enroulé autour de Rusty
Lewis, Tom passe sur le dos et met Rusty
à plat, face au sol, et lui actionne l'ouverture de son parachute. Craig O'Brien filme
du dessus. Le sol ajouté en post-production (plus exactement l'immense verrière
du toit du bâtiment que doivent infiltrer
Ethan et Walker) montre qu'il ne reste
pour Ethan que 2 ou 3 secondes avant
l'impact.

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L'ouverture de Tom fut bien sûr filmée à
une altitude normale. Craig a capturé la
phase d'ouverture, et au moment où la
voile de Tom est presque entièrement
ouverte, le technicien en post-production
y a incrusté l'extrados de la même voile
ouverte et qui fut filmée séparément,
et en gros plan, afin que soit invisible la
coupe entre la fin de ce troisième plan
séquence et l'arrivée spectaculaire
d'Ethan sur le toit qui, elle, n'est pas
réelle, évidemment.

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Paramount Pictures

La coupure entre le deuxième et troisième
plan séquence se fait au moment où
Ethan attrape Walker. Ça chahute. Craig
O'Brien s'avance alors dans l'action afin
de faire un très gros plan dans lequel
la coupe passera inaperçue. Ethan
est maintenant agrippé aux jambes de
Walker tout au début du troisième plan
séquence. Pour le réaliser, ce fut une
nouvelle série de sauts et une dernière
semaine de tournage pour l'équipe.
Le rythme fut identique : 6 à 8 sauts
d'entraînement par jour, et un saut au
coucher du soleil dans l'espoir d'avoir
réalisé le plan séquence attendu.

Conclusion

Après la sortie du film, dans le milieu
para, les avis furent divergents quant à
l'impact que cette séquence avait pu
engendrer. Il est certain qu'elle a bien
moins marqué le public que certaines
séquences parachutistes dans d'autres
grands films cinéma qui sont devenus
mythiques. Mais, parachutiste ou pas, le
public n'est-il pas de nos jours de plus
en plus difficile à épater ? Avec les effets
spéciaux, les images stupéfiantes nous
transportent maintenant au-delà de ce
que l'on peut imaginer. Nous en sommes
rassasiés au point que le merveilleux
n'existe presque plus. Avec la séquence
parachutiste de MI-6, le réalisateur a
voulu garder de l'authenticité dans l'action. C'était un challenge. Cette séquence
aurait pu être réalisée avec une multitude
de plans courts montés de façon très
dynamique, une recette abrutissante
trop souvent utilisée dans trop de films
d'action.
MI-6 a voulu offrir quelque chose de
plus vrai pour sa partie parachutiste.
C'est donc avec trois plans séquence
riches en mouvement que le pari fut
lancé. Le story-board de chacun de ces
plans séquence était très détaillé avec un
découpage précis de l'action et avec les
placements exacts de la caméra.
Avant chaque saut, les briefings étaient
importants afin que Tom, Rusty et Craig
miment leur rôle et répètent le travail
respectif qu'ils devaient réaliser en une
cinquantaine de secondes de chute. Parachutistes expérimentés, Rusty et Craig
sont habitués à restituer en l'air ce qui
est planifié au sol. Ils ont fait preuve d'un

grand professionnalisme. Mais le grand
coup de chapeau revient à Tom Cruise
qui a su combiner ses talents d'acteur
avec les évolutions en chute libre. Il invita
toute l'équipe parachutiste à un diner 5
étoiles, à Abou Dabi, afin de conclure ce
tournage, et surtout pour remercier toutes
les personnes présentes qui avaient pris
soin de sa sécurité, de son matériel, qui
l'avaient formé et coaché afin d'atteindre
en flèche un niveau en chute lui permettant de sublimer l'agent Ethan Hunt. ■

À propos de l'auteur

Note de la rédaction : Pour nos
lecteurs qui ne le connaissent pas,
il est utile de préciser que Patrick
Passe, avant de se spécialiser dans
l'organisation de sauts et de records
en grande formation, a rempli une
carrière de caméraman parachutiste.
Il a réalisé et produit ses propres
films, tournés sur pellicule 16 mm :
Travelling, Antigravity, Crosswind.
Ils ont marqué les années 90, car il
s'agissait le plus souvent de filmer
les pionniers du parachutisme de
l'époque dans leur discipline respective. Patrick a aussi filmé pour
des productions «grand public», les
plus connues étant les émissions
Ushuaia, pour TF1. À travers cet
article, en «décodant» le tournage
de la séquence parachutiste de MI 6
Fallout, il partage avec le lecteur
son expérience derrière la caméra,
au sol et en chute libre, et aussi
dans les salles de montage.

26/12/2018 20:10
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