ParaMag - N°385 - Juin 2019 - 49

Photo Pierre Bedin

HOMMAGE

souvent ton sens de la famille, de la difficulté de tout concilier parfois.
De l'expérience de tes missions, tu avais
essayé de nous traduire ce que « entendre les balles siffler » voulait dire.
Sylvain, ta personnalité exemplaire et
digne demeure.

HOMMAGE À
SYLVAIN
GRANDGIRARD
Sylvain, sky poto,
Nous faisions partie du cercle de la
fraternité parachutiste, de ceux qui savent
pourquoi les oiseaux chantent et ont souvent le regard tourné vers le ciel. Ce ciel
qui a refusé de te rendre et t'a gardé pour
lui ce jour-là. (N.D.L.R. : voir «flash accident mortel FFP» du 6 mai en premières
pages du magazine).
Tu t'es élancé pour ton 464 saut,
sur cette belle région normande que tu
aimais, à la vue des falaises crayeuses
de Dieppe qui plongent dans une mer
aux multiples couleurs. Ce saut ne sera
jamais couché sur ton carnet.
ème

Si l'on mesure la grandeur des disparus à
l'amour qu'ils ont donné et au vide qu'ils
laissent, alors tu étais grand, Sylvain.
Tu n'étais pas l'homme des grands
discours, ni celui qui gueulait le plus
fort dans les grandes tablées. Tu étais
l'homme des rapports vrais, des relations
individuelles, des échanges de qualité
aux termes desquelles ta belle
personnalité se révélait.

Père attentif, tu suivais les études de ta
grande, et les premiers pas de ton petit,
témoin de toute son énergie. Tu évoquais

Sourcilleux sur la sécurité, tu faisais
bien plus que ta part dans le pliage des
parachutes élèves. Tu savais rassurer,
encourager, accompagner, avec simplicité
et sans emphase. Pour nous, tu faisais
partie du sel de la terre et tes valeurs de
droiture, d'esprit de camaraderie et de
sens de l'autre sont éternelles.
Tu as su envoyer valser la main d'un
Président et mépriser le regard courroucé
d'un Premier ministre, toi l'homme calme
et réfléchi ! Tu es resté ce jour droit dans
tes bottes, le visage déformé de chagrin,
par la perte de Jean-Baptiste
et de Jessica ; sûr de ton droit.
Les journalistes avaient repéré tes béquilles et en avaient déduit que tu avais
été blessé en service, mais en fait tu
t'étais fait la cheville dans un champ de
patates le week-end précédent ^_^
Par ce geste tu es devenu une sorte de
modèle pour une profession qui manque
de moyens et de reconnaissance et qui
pourtant donne sans compter. Dans
d'autres circonstances, tu aurais été l'un
des premiers à te lever et à dire non.
Toi, le collègue, le fils, l'époux, le frère,
le père, le parrain, nous avons vu une
magnifique assemblée se réunir pour
t'accompagner sur ton dernier chemin.

Nous étions des centaines de personnes,
ta famille, tes collègues, tes amis,
écrasés de chagrin. Tous ces visages
déformés par la peine qui s'interdit
de s'abandonner.
Dignes, pétris de douleur, mais droits
dans la tempête, tentant de colmater
cette brèche béante que tu avais faite
dans nos vies.
En particulier les collègues de ton groupe
qui te considéraient comme un frère,
un Sensei, un Jedi, l'homme auquel il
fallait ressembler. Celui dont on est fier
de suivre les traces dans la neige, sur la
paroi, ou au moment de s'élancer dans
le vide.
Celui auquel on n'hésite pas à confier sa
vie le cas échéant.
« Slyinthesky » était ton nom sur les
réseaux sociaux- « le sky » l'endroit d'où
maintenant tu nous regardes, l'endroit
toujours emprunté, mais jamais conquis.
Maintenant chaque regard porté vers
notre terrain de jeu aura une pensée
pour toi, accoudé sur un nuage avec une
binouze à la main.
Nous te rejoindrons. Mais laisse-nous un
peu de temps quand même !
Que Saint-Michel veille sur toi, mais aussi
sur Laurence, Thomas et Julie.
Signature : Tes skypotos de l'EDCL,
de L'APPN et tous ceux que tu as pu
toucher. n

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Juin19:385
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Entre les sauts en parachute, les moments d'attente et de partage sont nombreux. Souvent en face de la peur ou du
danger potentiel, les cœurs s'ouvrent plus
naturellement et l'on parle sans détour.

Tu aimais transmettre et partager, sans te
raconter. Beaucoup de jeunes parachutistes te doivent le fait d'avoir réussi à
puiser au fond d'eux cette énergie et cette
part de folie qui irrigue le premier saut, et
les quelques suivants.

Photo ci-dessus
En septembre 2017, sur l'aérodrome de CaenCarpiquet, 120 parachutistes (civils, militaires
et «reconstituants») sont en attente d'embarquer
pour sauter sur le Mont-Saint-Michel. Parmi eux,
une délégation de douze membres de l'APPN-EDCL.
Sylvain Grandgirard se trouve tout à gauche sur la
photo. Photo APPN-EDCL

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