ParaMag - N°390 - Novembre 2019 - 43

Photos ci-contre
Tableau blanc et petits bonshommes en plastiques,
ce sont les quelques outils utilisés par Ahmed Sferi
dans l'application de sa «vision chirurgicale» de
l'apprentissage du freefly.
Photos Stéphane Blanc

PÉDAGOGIE

Voilà ! Le mot est lâché, être un «bon» enseignant. Il n'a pourtant pas été choisi au
hasard non plus. Mais évitons de tomber
dans la classification facile, même si les
enseignants qui prennent la mauvaise
voix sont présents dans tous les sports.
Oui ! la mauvaise «voix» (avec un «x») !
Vous avez bien lu; nous y reviendrons.
Tout le monde peut enseigner. Nombreux
sont ceux qui le font avec passion, plus
rares ceux qui le font aussi avec talent.
Un bon technicien n'est pas à fortiori un
bon pédagogue. Ceux qui connaissent
un peu le monde des sports de combat
en savent quelque chose. Aux coins
des rings, peu d'anciens champions
finalement.
Alors, en quoi l'enseignement est-il différent dans le parachutisme ? S'y joue-t-il
les mêmes enjeux entre élèves et professeurs que dans les autres sports ?

L'argent

Une particularité que le parachutisme
partage avec entre autres, les sports
mécaniques et la plongée sous-marine,
est le rapport à l'argent.
À chaque fois qu'il est question de
pratiquer, il est question d'argent.
Une question à laquelle chacun répond
avec ses propres moyens. On sait donc
dès le départ que la course à la progression sera inégale. Car si avoir de bons
moyens financiers ne garantit pas une
progression rapide, elle est la condition
«sine qua non» de toute progression,
quel que soit son rythme.
Lorsque l'on débute dans le para, rapidement arrive à nos oreilles l'adage qui dit :
«le parachutisme est un sport de riches,
pratiqué par des pauvres». Un adage qui
n'est pas à prendre au pied de la lettre,
mais qui traduit une réalité plus complexe. Il n'y a pas que des riches dans
le para, mais beaucoup de pratiquants
y sacrifient, parfois jusqu'à l'excès, leur
argent.

Cette influence s'exprime à différentes
périodes de l'apprentissage. Marin Ferré
nous dit que, dès la PAC, les élèves se
mettent la pression pour ne pas avoir à
payer, en plus du forfait, des sauts supplémentaires avec un moniteur.
De la même façon, le moniteur subit cette
pression financière à travers l'élève.
«On se met la pression sur le plan
pédagogique pour ne pas avoir à
demander à l'élève de payer davantage
(....) mais on ne peut pas laisser un
élève partir en solo s'il n'a pas le niveau»
rajoute Marin Ferré.

«La notion
d'argent
s'inscrit en
toile de fond
de l'enseignement.»

Pas facile d'expliquer au sautant de la
PAC, qui a investi une somme d'argent
déjà conséquente, qu'il doit payer davantage pour sa propre sécurité.

De la même façon, le passage des brevets fédéraux est logiquement associé à
des sauts avec des instructeurs.

Une problématique qui peut parfois
engendrer un peu de culpabilité chez le
moniteur, qui pourtant, lorsqu'il a correctement fait son travail, n'est pas responsable du degré d'aptitude de son élève à
intégrer son enseignement.

L'argent entre en ligne de compte doublement au débit du sautant, puisqu'il doit
aussi payer la place avion de son moniteur, afin que ce dernier ne se retrouve
pas dans la situation absurde d'avoir à
payer pour enseigner alors qu'il doit être
rétribué pour cela.

43
Novembre19:390
paramag.fr

Ce paramètre financier, en toile de fond,
influe plus ou moins sur l'enseignement
en fonction de la place et de la nature
qu'il prend dans l'esprit de celui qui le
distille (enseignant) et dans l'esprit de
celui qui le reçoit (élève).

Stéphane Blanc

Avant d'entrer en profondeur dans les
arcanes de la relation qui lie le maître à
l'élève, il est un point particulier qu'il faut
aborder.

http://www.paramag.fr

ParaMag - N°390 - Novembre 2019

Table des matières de la publication ParaMag - N°390 - Novembre 2019