ParaMag - N°400 - Octobre 2020 - 12

s
n
o
i
x
e
l
f
é
R
1987-2020 : D'ISIDORE
À L'ICONOCLASTE

C'était en avril 1985 à l'issue du saut de démonstration en voilecontact pour le 10ème anniversaire de l'aéroport international de Lyon
Satolas, devenu depuis Lyon Saint-Exupéry, avec atterrissage en
biplan sur le tarmac de stationnement des avions de ligne devant
l'aérogare. Lors du cocktail qui s'ensuivit, j'ai discuté assez
longuement avec une figure du parachutisme, impressionnante à
mes yeux bien qu'il ne fît jamais rien pour impressionner.
J'avais discuté avec Guy Sauvage, le créateur de l'éphémère et inénarrable revue Chute Magazine en 1976. Je frissonne encore d'un
orgueilleux plaisir qu'il eût parlé avec moi qui n'avais débuté le
parachutisme qu'en 1978. Mais Guy m'avait identifié : il avait lu le tout
premier article que j'avais écrit, paru le mois précédent dans la revue
Pilote Privé, relatant la Coupe du monde de voile-contact en Australie
à laquelle j'avais très anonymement participé à l'automne précédent.
Je ne le savais pas encore, mais ce jour-là a été déterminant pour
mes engagements futurs. C'est cette rencontre et cette discussion
qui ont motivé ensuite mon adhésion à une aventure, une épopée,
qui perdure encore avec le 400ème numéro de ParaMag. Car deux
ans et quelques autres articles dans Pilote Privé puis Ailes Magazine
plus tard, Michel Pissotte m'a proposé de rejoindre l'équipe qui se
constituait pour la création d'un nouveau magazine : ParaMag. Guy
Sauvage en faisait évidemment partie.
C'est ainsi que le premier article du premier numéro de ParaMag est
signé Guy Sauvage. Son titre : « Personne ne m'aime ». Quelques
pages plus loin se trouve le texte que j'ai écrit. Son titre : « Isidore
Quochon de Peyan ». Une phrase de Guy donnait le ton : « La France
parachutiste mérite une presse forte, c'est-à-dire libre ». Bien des années
plus tard, Guy m'écrira un petit mot illustrant ce qu'était pour lui une
presse libre : « En te lisant dans le dernier ParaMag, j'ai eu l'impression d'une soudaine bouffée d'oxygène. Enfin quelqu'un rouspétait !
Enfin un courage s'exprimait, sans souci de ses éventuels désavantages. À la comparaison inévitable avec ce que j'écrivais il y a une
quinzaine d'années, je me suis retrouvé moi-même, donc rajeuni ».
ParaMag est ainsi avant tout une aventure humaine, passionnante et
passionnée. Dans son monumental livre « Histoire du parachutisme
en France » publié en 1991, Baptiste Bourdès a écrit au sujet de
ParaMag : « En juin 1987, arrive la revue ParaMag. L'inénarrable Guy
Sauvage y va de sa rubrique Billet d'humeur, cependant de nouveaux
parachutistes écrivains y font leur apparition : Yves-Marie Guillaud,
Patrick Passe.... Elle assure ce fameux pluralisme de l'information
nécessaire aux parachutistes ».

Octobre20:400
paramag.fr

Les premiers articles étaient écrits à la main, au crayon à papier et
à la gomme, et expédiés par fax (on disait alors télécopie plutôt que
fax). Puis sur ordinateur et expédiés par e-mail. De l'origine à nos
jours, une totale liberté a été accordée par les rédacteurs en chef,
tant pour le choix des sujets que pour leur contenu. Alors Isidore a
été suivi de textes sur toutes sortes de sujets, allant par exemple de
l'aérodynamique sans chiffres ni formules en douze épisodes que les
Américains ont fait traduire, à des fictions à prétention philosophique,
en passant par des reportages de compétitions ou de records ou des
essais de matériels...

Par
Yves-Marie Guillaud

Ah, les essais de matériels ! C'est ainsi que dans les années 90,
j'avais testé toutes les voiles disponibles en France. Même la SuperEvolution d'un constructeur US très connu à l'époque. La conception
très étrange de cette voile (pattes d'oie des suspentes dans la largeur
de la voile, par exemple) ne m'inspirait guère confiance. J'espérais
ne jamais avoir à sauter avec. Las, le rédacteur en chef, Didier Klein,
en a trouvé une, alors qu'il devait y en avoir deux en tout et pour
tout dans toute la France. Il me l'a apportée avec un grand sourire,
satisfait de sa trouvaille. À chaque ouverture, j'étais... disons sur le
qui-vive... Cette voile n'a jamais été imitée et a sonné le glas de ce
constructeur qui a rapidement disparu.
Pour accroître ma crédibilité envers les lecteurs, et les constructeurs
de parachutes dont certains tordaient le nez, j'ai brigué et obtenu le
brevet de parachutiste professionnel en 1988, le BEES1 de moniteur
en 1990, la qualification d'instructeur para-pro en 1997. Aurais-je
passé ces brevets sans y être poussé par ma collaboration à ParaMag ?
Pas sûr, même s'il y avait une continuité avec les années de
compétition en voile-contact débutées à l'orée des années 80. Cela
m'a entraîné jusqu'à la fonction de DT adjoint bénévole à Lyon-Corbas,
puis à celle de président de Lyon-Corbas. Sans la notoriété procurée
par ParaMag, aurais-je exercé ces fonctions ? Rien n'est moins sûr.
Toutes ces aventures m'ont amené, à la fin des années 2000, à faire
acquérir par l'École de Parachutisme de Lyon Corbas, pour 800.000
euros, le Pilatus Delta Mike, qu'elle possède et exploite toujours, sans
autorisation de l'AG en raison de l'urgence, donc en infraction avec
les statuts qui ne permettent pas au président ni au Comité Directeur
une dépense d'un tel montant sans vote à l'AG. Si le remboursement
du leasing avait mal tourné, l'école n'était pas engagée faute de vote
positif de l'AG et seul le signataire des contrats (achat et leasing),
c'est-à-dire moi, aurait eu à le payer sur ses deniers personnels. Pour
les remerciements, ça tombe bien je n'en attendais pas.
En 2007 est née par hasard la chronique mensuelle « Réflexion de
l'iconoclaste ». La présente chronique est la 140ème du nom. Parution
régulière, format unique, un seul sujet par chronique, une analyse,
des propositions, une conclusion : globalement ce plan a été respecté,
ce qui a participé au succès de la formule. L'iconoclaste est le résultat
d'un long processus d'évolution et d'amélioration débuté par Isidore,
et qui méritait bien ce petit regard en arrière sur le chemin parcouru
jusqu'au numéro 400, ainsi qu'une entorse au sacro-saint principe
que m'avait enseigné mon professeur de français au lycée : ne jamais
utiliser le « je », ne jamais parler de soi.
Oui, mais toute chronique iconoclaste doit finir par une conclusion.
Eh bien, dans ce numéro 400, c'est une leçon de vie en guise de
conclusion. Parfois, la vie présente des opportunités qu'on peut saisir
ou laisser passer. Il faut les saisir, on ne sait jamais jusqu'où elles
peuvent vous porter. Elles m'ont porté loin, et peut-être me porteront-elles encore plus loin à l'avenir, dans des contrées que je n'aurais
jamais imaginé parcourir un jour. Et surtout, elles m'ont permis des
rencontres, tantôt belles, tantôt moins belles. Elles m'ont permis de
nouer des amitiés fortes comme avec Bruno Passe sans la passion,
l'énergie et la ténacité de qui ce numéro 400, et nombre des précédents, n'aurait jamais existé. Elles m'ont permis de vivre pleinement.
Et ce n'est pas fini : l'aventure continue...
« La vie, ce n'est pas d'attendre que les orages passent, mais
d'apprendre à danser sous la pluie » (Sénèque). N'attendez pas... n

http://www.paramag.fr

ParaMag - N°400 - Octobre 2020

Table des matières de la publication ParaMag - N°400 - Octobre 2020