La revue RH&M - N°75 - Octobre 2019 - 9

LE GRAND ENTRETIEN

par semaine, généralement sur une
demi-journée, voire plus. Je suis
très partisan à ce qu'on partage
beaucoup de choses au niveau du
CoDIR, à ce qu'on évite les silos et
à ce que tout le monde participe, de
manière transverse, aux décisions
importantes, même ne relevant pas
de son champ. Le DSI, la DRH, le
DAF participent à des décisions
business. Je crois que c'est important que les gens se rendent compte
des contraintes de chacun. Par ailleurs, de la discussion naît souvent
la lumière et on améliore la qualité
des décisions.
Quel impact de la raison d'être
dans le CoDIR ?
Pour nous, le sujet de la raison d'être,
plus généralement celui de l'engagement de l'entreprise dans la cité,
est un sujet stratégique extrêmement important. Je considère que
c'est un sujet de pérennité de l'entreprise. Pourquoi ? En deux mots,
demain, nous serons concurrencés
par des Amazon, Google, Alibaba,
des gens infiniment plus puissants
que nous, ayant une puissance commerciale incomparable par rapport
à la nôtre, une puissance de collecte et de traitement des données
là aussi infiniment supérieure à la
nôtre. Ils pourront mener, pendant
des années, une bataille tarifaire
qu'on ne pourra pas soutenir. Avec
les armes traditionnelles habituelles
classiques de la concurrence, on ne
pourra pas résister très longtemps
contre ces acteurs. Je pense que de
plus en plus, une partie croissante
de l'opinion publique est attachée
à l'engagement des entreprises
en faveur de l'environnement, en
faveur du social, à son comportement également en interne avec les
clients. Je pense que ça devient de
plus en plus, un critère de choix de
leur fournisseur, de leur banquier,
de leur assureur. Et cela ira croissant. Je pense que c'est notre seule
chance demain face aux géants

" Je crois que le passage de la RSE à la raison
d'être, c'est le passage du vingtième au
vingt-et-unième siècle. Ça change tout. Ce n'est
pas simplement faire des choses à côté de son
activité, c'est inscrire une forme d'engagement
au cœur même de son activité. "

américains ou chinois du numérique. Les gens choisissent la MAIF
pour la qualité du service et aussi
parce qu'elle est à juste titre identifiée comme une marque engagée,
un assureur militant, parce qu'on a
une raison d'être, parce qu'on est
entreprise à mission...
Par ailleurs, le fait de bien traiter ses
parties prenantes immédiates (ses
collaborateurs, ses clients), c'est
aussi une source de performance
en interne. Tout ça, vous l'avez
compris, est au cœur de la stratégie de l'entreprise à tel point que
le pilotage se fait sur la base de ce
qu'on appelle un quadriptyque. On
a quatre familles de critères pour
mesurer la performance de l'entreprise ou mesurer la pertinence d'un
projet :
* l'épanouissement des collaborateurs,
* la satisfaction des clients sociétaires,
* la contribution au bien commun social, sociétal, environnemental,
* la performance de l'entreprise ellemême - dimension économique
ou de développement de l'entreprise.
On pilote véritablement l'activité
à travers ce quadriptyque. Et donc
bien sûr, cela veut dire que dans le
fonctionnement interne du Comex,

en permanence, la raison d'être est
centrale. Quand on évoque un nouveau projet, une nouvelle activité,
une nouvelle offre, un investissement, évidemment, on regarde le
sujet à travers ces différents prismes
qui correspondent à la raison d'être
de la MAIF. De la même manière
dans la relation avec le conseil d'administration, notre feuille de route
annuelle est construite autour de
ce quadriptyque. Cela imprègne
complètement nos réflexions, nos
échanges, et le pilotage de l'entreprise.
Comment avez-vous construit
et définit votre propre raison
d'être ?
Cela a été un processus long, plus
d'un an au total pour parvenir au
texte final. On est descendu très
profond, à la fois dans l'histoire
de l'entreprise, son origine, pourquoi elle avait été créée, quelle
était l'intention des fondateurs...
Puis dans sa projection : qu'est-ce
qu'on projette comme entreprise
dans dix, vingt, cinquante ans, sa
réalité du moment, etc. De tout
cela, on a essayé de comprendre
quelles étaient les caractéristiques
propres à la MAIF qui la différencient des autres entreprises et de
ses concurrentes. Il y a eu à la fois
un processus en toute petite équipe
où l'on a travaillé sur le fond, et en

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