La revue RH&M - N°77 - Avril 2020 - 45

appuie l'hypothèse selon laquelle les
entreprises qui intègrent dans leur
stratégie de génération de valeur,
les ressources humaines, naturelles
et sociales, apportent aux parties
prenantes financières une meilleure
visibilité sur les risques pris avec une
gestion optimisée de leurs ressources
et sont récompensées sur les marchés
boursiers. La recherche réalisée par
Radhouane, Nekhili, Nagati & Paché
(2019) sur la relation entre la divulgation environnementale et la performance financière des entreprises
françaises du SBF 120 montrent
également que le marché des capitaux réagit positivement à un niveau
élevé de divulgation environnementale. Cependant, il n'en est pas ainsi
pour les entreprises opérant dans des
secteurs dits « polluants » qui doivent
relever de nombreux défis dans leur
stratégie de communication sur leurs
engagements environnementaux.
L'alignement stratégique
Le processus d'alignement stratégique joue un rôle essentiel pour l'intégration des considérations sociales,
sociétales et environnementales dans
le pilotage de la performance globale.
Le rapport du groupe de travail de
France Stratégie animé par le professeur Odile UZAN (2019) brosse
un état des lieux des pratiques et fait
ressortir l'apport de la DPEF qui a
favorisé la recherche d'indicateurs
de mesure des impacts des actions
RSE sur la société avec des indicateurs de performance (KPI) intégrés au modèle d'affaire. L'approche
Balanced Scorecard (BSC) pour le
pilotage de la performance en lien
avec la stratégie intègre aujourd'hui la
stratégie RSE au modèle d'affaire. En
reprenant l'architecture du tableau de
bord BSC avec ses quatre catégories
d'indicateurs, l'entreprise peut intégrer la prise en compte des parties
prenantes dans la partie « client ».
Elle peut également rajouter un cinquième axe pour la performance non
financière, sociale, sociétale et environnementale.

La matrice de matérialité
La notion de matérialité, introduite
par la norme AA1000 et reprise par
la Globale Reporting Initiative (GRI),
est la clef de voute du reporting
extra-financier. Afin de hiérarchiser
leurs champs d'action, les entreprises
sont invitées à apprécier leur caractère stratégique du fait de leur importance pour les parties prenantes et/
ou de leur impact sur la capacité de
l'entreprise à créer de la valeur économique. La matrice de matérialité
permet de concentrer le suivi sur les
éléments identifiés comme les plus
pertinents et les plus problématiques
et de s'assurer du lien entre une
action et l'impact étudié. Disposer
d'outils de mesure pertinents permet
d'opérationnaliser la matrice.
L'indice de positivité
Si un nombre croissant d'outils dans
le domaine environnemental sont
formalisés, les outils de mesure dans
les domaines social et sociétal sont
plus variés, et moins reconnus et
représentent un champ de recherche
à fort enjeu. En France, l'indice de
positivité développé dans le rapport
« Pour une économie positive » propose une évaluation synthétique.
L'indice de positivité des entreprises
est une note annuelle comprise entre
0 et 100, mesurée par 35 indicateurs répartis dans 5 dimensions :
empreinte environnementale, conditions de travail, partage positif de la
valeur produite par l'entreprise, formation et recherche, vision stratégique de long terme. Il est centré sur
l'amélioration continue et prend en
compte le temps long, puisque pour
chaque indicateur, le score de positivité tient compte des progrès accomplis et de la capacité à se projeter dans
l'avenir avec des objectifs concrets.
Cet indice a l'ambition d'apporter
une aide à la réflexion stratégique
permettant d'explorer de nouvelles
façons de mesurer, d'analyser et de
communiquer sur la performance
des entreprises à la lumière de leur
impact sur les générations suivantes.

Améliorer l'information
extra-financière
Le pilotage de l'impact nécessite une
information extra-financière de qualité. Le rapport de Patrick de Cambourg (2019), président de l'Autorité
des normes comptables (ANC), émet
20 propositions pour faire de l'information extra-financière un véritable
outil de pilotage de la «transition
écologique, énergétique et solidaire»
des entreprises. Le rapport souligne
le problème de cohérence des référentiels, la multitude de pratiques, les
difficultés de la digitalisation difficile
(hétérogénéité, définitions insuffisantes, informations qualitatives...) et
note une dynamique de la pratique de
l'Information Extra Financière, une
progression de l'audit de ces informations et le poids croissant de la
notation extra-financière.
De nouveaux champs de recherche
s'ouvrent : sur quoi doit porter l'impact ? Quelles méthodes de mesure ? ;
Comment agréger les impacts de
différentes natures ? Peut-on compenser entre impact positif et impact
négatif ?

Références bibliographiques :
* Patrick de Cambourg, « Garantir la pertinence
et la qualité de l'information extra-financière
des entreprises : une ambition et un atout pour
une Europe durable », rapport au ministre
de l'économie et des finances, mai 2019.
* Terramorsi P. (2019), « De quoi les rapports
intégrés sont-ils le nom ? », in Question(s) de
Management, 26, pp 109-120.
* Radhouane, I., Nekhili, M., Nagati, H. & Paché,
G. (2017). Divulgation environnementale et
performance financière des grandes entreprises
française. La Revue des Sciences de Gestion,
287-288(5),
* France Stratégie (novembre 2019) , « RSE et
performance globale : mesures et évaluations »
* Kuassi Mahugnon Charles Zinsou, « Reporting
Intégré (RI) : étude de sa diffusion, de sa mise
en œuvre et de son adoption par les sociétés
cotées françaises », Thèse de doctorat en Sciences
de gestion soutenue le 14-10-2019 à Toulouse I.

LA REVUE RH&M N°77 | AVRIL 2020 | P.45

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